Science sans conscience n'est que ruine de l'âme.
Publié le 15/09/2006
Extrait du document
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Notons qu'à aucun moment le poète n'avance d'argument rationnel en faveur de ses affirmations.
Nous sommes làdans le registre de l'opposition absolue, de l'invective.
UN GENRE POPULAIRE
Lorsqu'il écrit Les Châtiments, Victor Hugo est animé par deux sentiments d'égale violence.
C'est d'abord la haine pour Louis-Napoléon, parjure et tyran ; haine d'autant plus vive que le poète a cru de bonne foi en cet homme et amilité pour son élection à la présidence de la République.
C'est ensuite la volonté de réveiller le peuple français, quiparaît avoir accepté le coup d'État avec passivité, voire indifférence.
Aussi Hugo va-t-il glisser dans son livre dix poèmes, intitulés « Chanson ».
Ces textes, destinés à être repris par lepublic, portent même parfois l'indication de la musique sur laquelle ils doivent être chantés.
Sans doute Hugoespère-t-il sincèrement que ces textes connaîtront un succès populaire et que, devenus autant d'hymnes frondeurs,ils entretiendront un esprit de révolte.
Cet espoir n'est d'ailleurs pas absurde : le pouvoir d'une chanson est bien réel.
Qu'on pense par exemple à La Marseillaise, à L'Internationale ou au Chant des Partisans .
..
Participant à la révolution de 1848, Victor Hugo a pu entendre les émeutiers entonner sur leurs barricades le Chant des Girondins composé par Alexandre Dumas.
Il ne pouvait ignorer, en tout cas, le succès de Béranger (1780-1857).
Celui-ci avait connu entre 1820 et 1845 une extraordinaire popularité grâce à ses chansons anticléricales,antigouvernementales ou évoquant la légende napoléonienne (Le Roi d'Yvetot, Le Vieux Sergent, Le Dieu des pauvres gens...).
Élu « malgré lui » député en 1848, Béranger avait démissionné pour garder sa liberté d'action, mais son influence était restée très grande ; et ses œuvres avaient eu un réel pouvoir politique.
L'exemple de Béranger, en 1853, est bien propre à exalter Victor Hugo, pour qui « le peuple chante / comme le lion rugit » (« L'Art et le peuple »).
Certaines chansons, comme celle que nous étudions ici, sont donc de véritables armes.
D'une chanson, ce poème a d'abord la structure.
Il est composé en vers alternatifs de huit et quatre syllabes, ce quilui donne un rythme léger et sautillant.
Les cinq strophes correspondent à autant de couplets, le refrain étantconstitué par l'avant-dernier vers et par le «Petit, petit » qui revient régulièrement.
Notons que, à la lecture, on est presque obligé de ralentir et de prononcer ce « Petit, petit » plus lentement que le reste du texte.
L'insulte railleuse est ainsi soulignée, amplifiée...
Le mouvement des lèvres se change lui-même, dansla prononciation, en une moue méprisante.
De même, l'avant-dernier vers des quatre premières strophes est écrit de façon un peu hachée :
«Toi, // son singe, // marche derrière,» «Voici de l'or, // viens, // pille // et vole,» «Voici // pour toi,// voici des filles,» «Voici du sang, // accours, // viens boire»,
afin de marquer un rythme sautillant, moqueur et dédaigneux, par opposition au rythme plus ample des six premiersvers.
On remarquera aussi le parallélisme des vers 15, 23 et 31, introduits par le mot « Voici».
L'un des effets de ce parallélisme est de marquer le retour du refrain.
Le genre « chanson » explique aussi la syntaxe parfois relâchée (vers 2-3 ou 19-20) et le sens qui, parfois, paraît sacrifié à la rime (vers 6, 13-14 et 22).
Le vocabulaire, relativement simple, évite les termes savants.
Toutes les formules employées par Hugo, enparticulier celles renvoyant à l'épopée napoléonienne, étaient immédiatement compréhensibles par un publicpopulaire.
Des mots comme « l'aigle d'airain », « Arcole », « bastilles » pouvaient immédiatement faire naître des images exaltantes dans l'esprit d'auditeurs encore imprégnés de la légende impériale.
Même l'évocation du vers 27, « La palme, la foudre et les rênes », renvoie à une symbolique de puissance très employée dans la sculpture de l'époque et ne posait donc pas de problème particulier (qu'on songe, par exemple, aux statues de Rude ornant l'Arcde triomphe de l'Étoile, à Paris).
On remarque néanmoins que le vocabulaire se fait toujours beaucoup plus simple dans les deux derniers vers dechaque strophe.
Nous reviendrons sur ce point dans la seconde partie.
Enfin, le poème est une invective.
Il attaque directement Napoléon III, par l'insulte et le mépris, sans chercher àfonder ou à justifier la moindre accusation.
C'est une imprécation, un discours par lequel Hugo décharge sa rancœur et appelle le malheur sur son adversaire.
Sans doute le poète peut-il penser que, par son coup d'État et les violences qui l'ont accompagné, Louis-Napoléon asuffisamment fait la preuve de son infamie pour qu'il ne soit pas nécessaire d'y revenir.
Mais surtout il respecte(sans peut-être en avoir conscience) un grand principe de la communication de masse : pour être efficace, exprimerune seule idée, de façon frappante, en préférant l'illustration à la rationalisation.
D'une strophe à l'autre, Victor Hugo.
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