Roberto zucco
Publié le 08/05/2013
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Au coeur de la pièce, il y a cette énigme.Le seul personnage dont soit décliné l'état civil ne cesse en effet d'échapper à toute tentative de reconnaissance et concentre en lui tous les paradoxes : héros médiatique et sanglant aspirant à la transparence de l'anonyme innocent, force qui va sans raison identifiable, révélateur d'une violence généralisée qui lui fait peur mais qu'il incarne et propage en toute conscience de ses actes. On sait que l'écriture de la pièce fut déclenchée par l'histoire vraie de Roberto Succo, serial killer des années 80. A la distance que Koltès prit avec la réalité historique s'ajoute désormais la distance avec les faits eux-mêmes. Demeurent en revanche la thématique éternelle, primitive, tragique, de la violence des échanges humains et l'énigme absolue du passage à l'acte. Roberto Zucco est donc, aujourd'hui, encore moins Roberto Succo. Mais qui est-il et pourquoi nous semble- t-il si proche? Peut-être parce que cette figure mythique du tueur "sans raison" interroge le potentiel de violence de chacun d'entre nous. "Un tueur n'a jamais l'air d'un tueur. Un tueur part se promener tranquillement au milieu de tous les autres comme toi et moi". Roberto Zucco: un frère de sang non reconnu? 3) La problématique du nom dans la pièce: Oublier son nom, c'est ne plus exister, devenir transparent, disparaître: "Et votre nom, imbécile? Etes-vous même capable de me le dire, maintenant? Qui s'en souviendra pour vous?" (La dame, scène 12, p.82). Cette disparition est à la fois le rêve et la grande peur de Zucco: rêve, parce que cela permet de vivre tranquille, de ne pas se faire remarquer, ("Il faut être transparent" p.79) mais peur également parce que cela signifie ne plus exister du tout ("J'ai peur de me retrouver sans savoir mon nom", dit ainsi Zucco, dans la scène 13, alors qu'il a tué ses parents ainsi que l'enfant, c'est-à-dire tout ce qui pouvait le rattacher à un cercle familial capable de lui donner une existence). On voit en effet que Zucco détruit deux familles construites sur le même modèle, la sienne et celle de la Dame: Son père, sa mère, lui (mort des parents) La dame, son mari, l'enfant (mort de l'enfant). La mention de son nom lui confère une existence sûre qui l'inscrit dans le monde des criminels et des héros dont les "habits sont trempés de sang". En l'appelant par son nom, la gamine lui restitue son identité: "Je suis le meurtrier de mon père, de ma mère, d'un inspecteur de police et d'un enfant. Je suis un tueur".
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