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Quel type de vérité vise l'oeuvre littéraire ?

Publié le 31/01/2011

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Analysez et discutez, à partir d'exemples, les remarques suivantes d'un philosophe du XXe s. :«Lorsque je parle de l'affinité actuelle de la philosophie et de la littérature, il ne saurait être question d'oeuvres bâtardes et mal venues où l'on voit un romancier se muer en dialecticien ou un dialecticien devenir romancier : malheureusement, le mauvais goût et l'esprit de confusion qui règnent en notre temps, portent trop à de tels mélanges. L'affinité réelle est ailleurs ; elle est dans une communauté de préoccupation, dans la pensée lancinante, constante du destin (ou de l'absence de destin) de l'homme. C'est pourquoi le philosophe est attiré par la littérature plus que l'homme de lettres par la philosophie. Car, tandis que l'écrivain moraliste a cherché dès longtemps à saisir l'homme en lui-même, privé des valeurs dont il est accidentellement le siège, ce sont ces valeurs qui faisaient en grande partie l'objet de l'anthropologie philosophique. En revenant à l'humain, le philosophe a repris contact avec le lettré.« (Certificat d'aptitude à l'inspection des écoles primaires, 1965, examen probatoire.)

«Ce n'est pas la passion qui détruit l'oeuvre d'art, c'est la volonté de prouver.« (A. Malraux.) (ENS, Ulm, 1956.)

Commentez ces lignes de Robert André :«La littérature n'est pas la philosophie qui, elle, a vu sans doute son objet changer, son domaine se restreindre sous l'effet du progrès scientifique. La littérature, en raison de la perspective qu'elle adopte, demeure l'inépuisable. Je le répète : chacun de nous, en tout temps, recrée un champ d'aventures susceptible d'être réfracté par le langage ; en corrélation, dans la mesure où nous nous rêvons dans et par ce langage et trouvons par ainsi un prétexte à vivre - parce qu'autrement nous ne saurions pas vivre - il y a aussi une société qui se rêve en nous. La justification permanente du roman réside dans cette interférence, dans ce pacte insolite entre la fiction et la réalité.« («Éloge du larcin«, dans Vie ou survie de la littérature, Revue N.R.F., octobre 1970.)

Zola écrivait en 1881 :«Les types de la tragédie et de la comédie classiques sont vrais sans être réels. Ils ont la vérité générale, les grands traits humains résumés en beaux vers, mais ils n'ont pas la vérité individuelle, vivante et agissante, telle que nous l'entendons aujourd'hui.« Que vous inspire ce jugement? (ENS, Sèvres, 1965.)

Expliquez et, s'il y a lieu, discutez cette opinion de Valéry :«Comment ne pas choisir le meilleur dans ce vrai sur quoi l'on opère ? Comment ne pas souligner, arrondir, colorer, chercher à faire plus net, plus fort, plus troublant, plus intime, plus brutal que le modèle ? En littérature le vrai n'est pas concevable.« (Stendhal, 1927.)

Jean-Pierre Richard écrit :«L'élaboration d'une grande oeuvre littéraire n'est rien d'autre que la découverte d'une perspective vraie sur soi-même, la vie, les hommes. Et la littérature est une aventure d'être.« Expliquez et discutez. (Littérature et Sensation, Le Seuil, 1954.)

Que pensez-vous de cette analyse de l'idée de vraisemblance par Gérard Genette :«Le récit vraisemblable est un récit dont les actions répondent, comme autant d'applications ou de cas particuliers, à un corps de maximes reçues comme vraies par le public auquel il s'adresse ; mais ces maximes, du fait même qu'elles sont admises, restent le plus souvent implicites. Le rapport entre le récit vraisemblable et le système de vraisemblance auquel il s'astreint est donc essentiellement muet : les conventions de genre fonctionnent comme un système de forces et de contraintes naturelles, auxquelles le récit obéit comme sans les percevoir, et a fortiori sans les nommer. Dans le western classique, par exemple, les règles de conduite (entre autres) les plus strictes sont appliquées sans être jamais expliquées, parce qu'elles vont absolument de soi dans le contrat tacite entre l'oeuvre et son public. La vraisemblance est donc ici un signifié sans signifiant, ou plutôt il n'a pas d'autre signifiant que l'oeuvre elle-même. D'où cet agrément très sensible des oeuvres «vraisemblables«, qui souvent compense, et au-delà, la pauvreté ou la platitude de leur idéologie : le relatif silence de leur fonctionnement.« (Figures Il, Le Seuil, 1969.)

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