Prigogine, Ilya - chimiste.
Publié le 25/04/2013
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Prigogine, Ilya - chimiste. 1 PRÉSENTATION Prigogine, Ilya (1917-2003), chimiste, physicien et philosophe des sciences belge d'origine russe, prix Nobel de chimie en 1977 pour ses travaux en thermodynamique des systèmes irréversibles, l'une des figures majeures de la science de la seconde moitié du XXe siècle. 2 PARCOURS ET RENCONTRES UNIVERSITAIRES Né le 25 janvier 1917 à Moscou en pleine Révolution russe, Ilya Prigogine quitte son pays natal en 1921 avec sa famille, qui fuit le régime de Lénine. Après un court séjour à Berlin, la famille Prigogine s'établit définitivement à Bruxelles en 1929. Plutôt porté vers des disciplines littéraires et artistiques (histoire, archéologie, musique), Ilya Prigogine suit finalement les traces de son père -- ingénieur chimiste --, et entame des études de chimie et de physique à l'université libre de Bruxelles (ULB). Il y obtient son doctorat en 1941 et rencontre deux professeurs qui vont avoir une influence déterminante sur l'orientation de ses recherches. Il s'agit tout d'abord de Théophile De Donder, fondateur de l'École de thermodynamique de Bruxelles, spécialisée dans le domaine méconnu de la thermodynamique du nonéquilibre -- discipline qui compte parmi ses précurseurs, le Britannique John Rayleigh et le Français Pierre Duhem. Parallèlement, il côtoie Jean Timmermans, spécialiste des applications de la thermodynamique classique aux solutions liquides et aux systèmes complexes. Sur l'impulsion de ces derniers, Ilya Prigogine commence en 1945 une thèse d'agrégation à l'enseignement supérieur portant sur l'« étude thermodynamique des systèmes irréversibles «. Cette thèse, achevée en 1951, contient en germes sa théorie des « structures dissipatives «, formulée en 1967. Fidèle à son université de formation, il y effectue l'essentiel de sa carrière de chercheur, dirigeant parallèlement depuis 1959 les Instituts internationaux de physique et de chimie Solvay. 3 OEUVRE SCIENTIFIQUE : LA THÉORIE DES STRUCTURES DISSIPATIVES ET LA FLÈCHE DU TEMPS Alors que la thermodynamique classique et statistique privilégie l'étude des systèmes en équilibre en s'appuyant notamment sur le second principe -- qui stipule que l'évolution au cours du temps d'un système isolé se fera toujours dans le sens de l'augmentation de l'entropie, c'est-à-dire vers un état de désordre maximal (entropie maximale) --, Prigogine cherche à étendre ce principe à des systèmes ouverts et instables, comme la plupart des systèmes réels en interaction avec leur milieu. Il en vient à formuler en 1945 le théorème du minimum de production d'entropie, qu'il applique et généralise en 1967 aux états stationnaires de non-équilibre dans sa théorie des « structures dissipatives « : loin de l'équilibre, un système peut évoluer vers des états stationnaires de manière périodique dans le temps (structure temporelle) ou de manière spontanée et irréversible (structure dissipative). Dans ce dernier cas, le système peut même devenir plus ordonné qu'au départ (état supercritique où le système évolue dans le sens du désordre vers l'ordre) -- phénomène dit d'auto-organisation. Toutefois, il est impossible de prévoir l'évolution d'un tel système car les conditions initiales et les possibilités d'évolution sont infinies. Des exemples de structures dissipatives répondant à la théorie de Prigogine sont observés dans divers domaines scientifiques, notamment en catalyse chimique et en biologie cellulaire. Par ailleurs, dans le sillon ouvert par la thermodynamique des phénomènes irréversibles -- qui met en jeu les notions d'instabilité, d'amplification et de fluctuation -- naît la théorie du chaos déterministe, applicable à des domaines aussi divers que les mathématiques, l'économie ou la sociologie. Pour sa remarquable théorie des structures dissipatives -- qui implique l'existence d'une « flèche du temps « inhérente à toute évolution naturelle et qui rend compte de la valeur créative des phénomènes aléatoires --, Prigogine obtient le prix Nobel de chimie en 1977. 4 OEUVRE PHILOSOPHIQUE : VERS LA FIN DES CERTITUDES Mais l'oeuvre et la pensée d'Ilya Prigogine dépassent le cadre strict de la compréhension des lois de l'Univers. En réintroduisant la dimension du temps en physique -- sa célèbre « flèche du temps « --, Prigogine bouleverse la pensée scientifique contemporaine. Dès lors, de scientifique, le discours de Prigogine devient philosophique et porte principalement sur la possibilité de concilier et dépasser les visions déterministes de l'Univers héritées principalement d'Isaac Newton et d'Albert Einstein -- qui récusent tous deux l'existence du temps en dehors de l'esprit humain --, avec l'observation actuelle du monde qui apparaît instable, fluctuant et en évolution. Selon lui, « l'Univers n'est ni totalement déterministe ni totalement aléatoire «. Les lois physiques considérées comme des certitudes sont du domaine de la théologie. Le développement de la théorie du chaos, auquel il contribue, lui permet de réfuter l'idée d'Einstein selon laquelle « l'incertitude est due à notre ignorance «. Pour Prigogine, « le temps précède l'existence ; il joue un rôle de construction du réel (...) et l'homme n'est qu'un possible qui a été réalisé «. Il développe ces thèmes majeurs inspirés par ses recherches scientifiques dans de nombreux ouvrages de nature philosophique et épistémologique (voir philosophie des sciences), notamment la Nouvelle Alliance (1979), Entre le temps et l'éternité (1988), la Fin des certitudes (1996) -- tous trois écrits en collaboration avec la philosophe Isabelle Stengers --, Physique, temps et devenir (1980), À la rencontre du complexe (1992) -- en collaboration avec le physicien Grégoire Nicolis -- ou les Lois du chaos (1994).
Liens utiles
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- Ilya Prigogine par Marc Cherki Journaliste La science du désordre irréversible La naissance d'Ilya Prigogine, en 1917, est placée sous des cieux chaotiques.
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- La Nouvelle Alliance Métamorphose de la science - Ilya PRIGOGINE et Isabelle STENGERS