peine de mort en Chine
Publié le 14/05/2011
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La peine de mort en Chine
La pratique de la peine de mort est l’aveu de se mettre au même niveau qu’un meurtrier. Pourquoi tue-t-on des hommes qui tuent pour leur montrer que tuer n’est pas bon ? Le paradoxe n’est pas simple à comprendre. Premièrement, prenons l’exemple de la Chine, le pays le plus peuplé du monde avec 1,3 milliards d’habitants. On y pratique la peine capitale comme d’autres font promener leur chien – c’est une chose tout à fait normale et quotidienne. Puisqu’en Chine, c’est assez facile de se voir condamné à mort: une mauvaise déclaration contre le régime suffit pour se trouver incarcéré sans avoir pu prononcer encore un seul mot supplémentaire. « Le degré de civilisation d’une société peut être jugé quand on entre leurs prisons », comme le disait Fjodor Dostojewskij.(1) Contrairement à ce que la Chine essaie de prouver de toutes ses forces, on ne peut que constater qu’elle ne voit apparemment aucune contradiction entre un régime basé sur le peuple et un régime éliminant celui-ci à la pièce. Mais a-t-on le droit de qualifier cela « république populaire » ? Tuer des hommes pour des crimes d’une gravité souvent discutable semble avoir plus d’intérêt que le seul plaisir du gouvernement chinois de se montrer d’une grandeur impitoyable. Bien qu’une minorité de gens défende la thèse selon laquelle la Chine tiendrait tellement à la peine de mort parce qu’elle leur semble un bon moyen de tailler sa population, je suis convaincue que le régime chinois serait tout à fait capable de trouver une solution peut-être un peu moins mortelle, comme par exemple une politique familiale différente. (2)Deuxièmement, il n’y a qu’un autre aspect à prendre en compte : Sert-il vraiment à lutter contre la délinquance d’élaguer les mauvaises branches de la population en appliquant la peine capitale ? Il semble que le fait de déformer les paroles est vu comme sport populaire dans l’empire du Milieu. L’exécution « d’opposants » ne cesse de croître, ce qui inspire à de forts doutes en ce qui concerne la politique poursuivie par les gouvernants chinois. La simple accusation d’espionnage suffit pour lâcher la police aux trousses du présumé traitre. Bien entendu, tout cela n’a pas besoin de preuves pertinentes. Mais la délinquance regarde tout ce spectacle d’un air plutôt insouciant : la peine de mort ne sert pas d’intimidation envers les Chinois. Malgré toutes les mesures prises par le gouvernement, les opposants préfèrent monter sur les barricades. Les Tibétains, roués de coups, maltraités ou tués pendant des émeutes qui se répètent assez fréquemment et dont les dernières ne datent qu’en mars 2008, ne montrent aucune intimidation par des condamnations à mort. Les minorités, qui sont assez nombreuses en Chine, ne cessent alors de lutter contre l’oppression de leurs droits fondamentaux par le régime, malgré la menace permanente de l’exécution. (3) Les chiffres constatant les morts causés par l’intervention de l’armée chinoise sont aussi fiables que la prédiction de la fin du monde des témoins de Jéhovah. Je suis persuadée que beaucoup de ces chiffres et statistiques ne sont qu’un trompe-l’œil. L’image glorifiée de la Chine comme pays discipliné, fort et résolu, comme pays en croissance économique invincible serait endommagée par des statistiques démontrant la dimension totale qui a pris la pratique de la peine de mort sans l’édulcorer. Mais c’est un cercle vicieux : on ne peut pas poursuivre ni soutenir un essor économique en détruisant soi-même la base de celui-ci : le peuple. Finalement, il ne faut pas s’attarder sur la question de l’approbation de la peine de mort ou non. Cette pratique ne permet aucune acceptation dans n’importe quelle culture, dans n’importe quel pays du monde. Œil pour œil et le monde sera aveugle, comme le disait Mahatma Gandhi. (1) : argument par autorité, (2) : argument par concession, (3) : raisonnement inductif
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