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Paul et Virginie – Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre

Publié le 17/08/2010

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bernardin
 
Biographie de Bernardin de Saint-Pierre Né au Havre en 1737, Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre côtoie trop les ports et la mer pour ne pas être attiré par le voyage. Il s’exalte en lisant Robinson Crusoe ́(1719) de Daniel Defoe et La Vie des Saints (recueil hagiographique dû au moine Cyrille, vers 510-557), ce qui lui ouvre deux perspectives parallèles et croisées – aventurière et spirituelle – qui constitueront le cœur de ses deux romans, Paul et Virginie (1787) et La Chaumière indienne (1790). Élève des Jésuites de 1750 à 1757, il obtient son brevet d’ingénieur militaire et, après des voyages à Berlin, Moscou, Malte, Amsterdam, s’installe de 1768 à 1770 à l’île de France. Il en tire la matière de Voyage à l’île de France (1773), apprécié de Rousseau, dont il fit la connaissance en 1772. Il ne cachera jamais l’influence de La Nouvelle Héloïse (1761) et de L’Émile (1762) sur ses idées et sur son écriture. De retour en France, il est élu à la Convention en 1792 et nommé Intendant du Jardin des Plantes. Devenu bonapartiste, il se lance dans la rédaction de ses Harmonies de la Nature, qui connaîtront une publication posthume. Il meurt en 1814. Son credo, illustré par son œuvre et sa vie, a toujours été: «Notre bonheur consiste à vivre suivant la nature et la vertu.« De quoi s’agit-il? Paul et Virginie, publié en 1787, se présente comme un supplément détaché des Études de la Nature(1784) qui ont fait le succès de Bernardin de Saint- Pierre auprès de ses contemporains, particulièrement sensibles au charme exotique des descriptions des paysages, de la faune et de la flore des tropiques. L’aventure débute en 1726 sur l’île de France, où Mme de la Tour, veuve et enceinte, et Marguerite, fille-mère d’origine bretonne, se rencontrent et unissent leurs destinées. Leurs enfants, Virginie et Paul, élevés comme frère et sœur, transcendent la misère de leur condition dans une félicité partagée et sans faille, forgée au cours de leurs innombrables excursions dans la nature luxuriante et dans un temps quasi suspendu qui les libèrent de toutes contingences. Peu à peu, leurs corps s’éveillent à l’amour, mais les deux adolescents sont ramenés brutalement à la réalité. Virginie est contrainte de regagner le continent pour obéir aux caprices d’une tante. Paul connaît une traversée du désert à laquelle met fin l’annonce du retour de son âme sœur. Mais le bonheur est de courte durée: le bateau qui ramène Virginie, en ce jour du 24décembre 1744 (p.75), fait naufrage devant l’île. L’issue tragique imaginée par Bernardin de Saint-Pierre est à la mesure de l’amour des deux adolescents, entière et radicale, au point qu’elle engloutit tous les personnages (Virginie, Paul, Mme de la Tour, Marguerite, Domingue, Marie et même le chien Fidèle). Dominantes littéraires Le roman combine unité ́et pluralité́. D’abord, il se déroule en deux temps : - Le premier dresse le tableau d’un âge d’or (les descriptions abondent, Nature et nature humaine sont en symbiose, même si les orages violents rappellent la cruauté de la première, p.39). - Le second, annoncé par la lettre de la tante (p.42), fait entrer les personnages dans le drame, dans le temps de l’histoire et des événements. Cela coïncide, pour Virginie, avec l’apparition d’émois plus adultes (attirance physique, sentiment de culpabilité). D’autre part, à l’instar des romans du XVIIIe siècle, l’œuvre orchestre différents types de textes qui font varier la trame narrative. Ce sont : - les digressions du narrateur - les lettres (pp. 55, 74), - les citations poétiques (pp. 27-28), - les parties dialoguées avec une mise en texte toute théâtrale (la conversation entre Paul et le vieillard, pp. 64-73). Le modèle qui préside à l’écriture de Paul et Virginie est la pastorale, mais avec des aménagements qui la rendent plus intense, plus feuilletée. Les éléments classiques de la pastorale se retrouvent dans : - le choix du titre (il démarque Daphnis et Chloé́ de Longus, IIIe siècle), - de l’idylle amoureuse - et du cadre naturel (on se déplace des campagnes d’Arcadie aux îles tropicales), - de personnages purs, à la simplicité naïve car originelle. En revanche, la présence du narrateur aux cheveux blancs, qui prête vie par ses mots à des ruines de cabanes, donne une perspective tragique au propos (proche de Tristan et Iseut). Le paysage porte trace du drame («baie du Tombeau«, «cap Malheureux«, p.7), lequel persiste à travers un réseau de signes inquiétants et prémonitoires au cours de la restitution du récit idyllique. Cette orientation n’est guère surprenante, puisque c’est par la fin que Bernardin de Saint-Pierre a eu l’idée d’écrire Paul et Virginie – alors capitaine ingénieur à l’île de France, il apprit l’histoire du naufrage du Saint-Géran, dans lequel périrent Marie Caillou et Longchamps de Montendre, son soupirant. Le cadre du récit est l’île de France, aujourd’hui l’île Maurice. Il s’agira du substrat géographique et historique – l’espace mauricien et les sociétés de l’océan Indien au XVIIIe siècle – du Voyage autour du monde (1771) de Bougainville et du Supplément au Voyage de Bougainville (1772) de Diderot, préfigurant la veine exotique que le roman de Bernardin de Saint-Pierre va sublimer. Personnages Paul et Virginie sont devenus des archétypes littéraires. Il s’agira d’identifier les éléments qui ont contribué à l’édification de ces personnages en icônes. Pour ce faire, on insistera sur la préférence accordée à l’être de la figure romanesque plutôt qu’à ses fonctions énonciatives ou narratives. L’étude psychologique de chacun des adolescents est à la fois très poussée (on suit pas à pas l’évolution de leurs sentiments) et très directe. Ils incarnent des figures authentiques parce que le romancier dresse naturellement leur portrait, évolutif, en mouvement. De fait, ils apparaissent comme des êtres de chair et d’esprit, d’une extrême sensibilité et sensualité, ouverts aux impressions, aux expériences sensorielles. La prose sensitive de Bernardin de Saint-Pierre, vouée aux transcriptions visuelles, auditives, olfactives, tactiles et gustatives, tisse un véritable réseau d’expression vibratile. Elle annonce, en cela, le vers et le verbe romantiques qui consacrent l’épanchement du moi et magnifient les émois. Thèmes et extraits on mettra en valeur les dispositifs descriptifs que déploie le roman. On distingue : - les descriptions picturales (les moments textuels qui font tableau, notamment le naufrage renvoyant à des toiles de Vernet), - les descriptions plus naturalistes (l’incipit, le narrateur qui rapporte les bruits de la forêt, pp. 61- 62), - les descriptions métaphores (l’arbre de Paul et l’arbre de Virginie, p. 29), - les états d’âme (la fièvre qui étreint la Nature et Virginie, p. 39; les retours de Paul dans les lieux d’où Virginie s’est absentée, p. 63). • Prolongements Paul et Virginie appartient aux œuvres charnières de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, parmi lesquelles on compte : La Nouvelle Héloïse (1761) de Rousseau ; Jacques le Fataliste et son maître (1765-1773) et Le Neveu de Rameau (1762-1777) de Diderot ; L’impact du livre fut immense en 1787. L’innocence naïve, la nature sauvage, cela reposait du raffinement extrême des idées et des moeurs ; cela remplissait le vide secret, consolait le profond ennui des cœurs. Il fut tel qu’on représenta des scènes du roman sur des bijoux et qu’on se coiffa «à la Virginie«. Par la suite, il y eut des images d’Épinal, de nombreuses adaptations théâtrales, un opéra …
 

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« En revanche, la présence du narrateur aux cheveux blancs, qui prête vie par ses mots à des ruines de cabanes, donne uneperspective tragique au propos (proche de Tristan et Iseut).Le paysage porte trace du drame («baie du Tombeau», «cap Malheureux», p.7), lequel persiste à travers un réseau de signesinquiétants et prémonitoires au cours de la restitution du récit idyllique.Cette orientation n'est guère surprenante, puisque c'est par la fin que Bernardin de Saint-Pierre a eu l'idée d'écrire Paul et Virginie– alors capitaine ingénieur à l'île de France, il apprit l'histoire du naufrage du Saint-Géran, dans lequel périrent Marie Caillou etLongchamps de Montendre, son soupirant. Le cadre du récit est l'île de France, aujourd'hui l'île Maurice.

Il s'agira du substrat géographique et historique – l'espacemauricien et les sociétés de l'océan Indien au XVIIIe siècle – du Voyage autour du monde (1771) de Bougainville et duSupplément au Voyage de Bougainville (1772) de Diderot, préfigurant la veine exotique que le roman de Bernardin de Saint-Pierre va sublimer. PersonnagesPaul et Virginie sont devenus des archétypes littéraires.Il s'agira d'identifier les éléments qui ont contribué à l'édification de ces personnages en icônes.

Pour ce faire, on insistera sur lapréférence accordée à l'être de la figure romanesque plutôt qu'à ses fonctions énonciatives ou narratives.

L'étude psychologiquede chacun des adolescents est à la fois très poussée (on suit pas à pas l'évolution de leurs sentiments) et très directe.

Ils incarnentdes figures authentiques parce que le romancier dresse naturellement leur portrait, évolutif, en mouvement.

De fait, ilsapparaissent comme des êtres de chair et d'esprit, d'une extrême sensibilité et sensualité, ouverts aux impressions, auxexpériences sensorielles.

La prose sensitive de Bernardin de Saint-Pierre, vouée aux transcriptions visuelles, auditives, olfactives,tactiles et gustatives, tisse un véritable réseau d'expression vibratile.

Elle annonce, en cela, le vers et le verbe romantiques quiconsacrent l'épanchement du moi et magnifient les émois. Thèmes et extraitson mettra en valeur les dispositifs descriptifs que déploie le roman.

On distingue :- les descriptions picturales (les moments textuels qui font tableau, notamment le naufrage renvoyant à des toiles de Vernet),- les descriptions plus naturalistes (l'incipit, le narrateur qui rapporte les bruits de la forêt, pp.

61- 62),- les descriptions métaphores (l'arbre de Paul et l'arbre de Virginie, p.

29),- les états d'âme (la fièvre qui étreint la Nature et Virginie, p.

39; les retours de Paul dans les lieux d'où Virginie s'est absentée, p.63). • Prolongements Paul et Virginie appartient aux œuvres charnières de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, parmi lesquelles on compte : LaNouvelle Héloïse (1761) deRousseau ; Jacques le Fataliste et son maître (1765-1773) et Le Neveu de Rameau (1762-1777) de Diderot ; L'impact du livre fut immense en 1787.

L'innocence naïve, la nature sauvage, cela reposait du raffinement extrême des idées etdes moeurs ; cela remplissait le vide secret, consolait le profond ennui des cœurs.Il fut tel qu'on représenta des scènes du roman sur des bijoux et qu'on se coiffa «à la Virginie».

Par la suite, il y eut des imagesd'Épinal, de nombreuses adaptations théâtrales, un opéra …. »

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