À l'époque où se déroulent les événements de cette texte, les Abbassides avaient déjà commencé à envahir l'empire Byzantin quand Hârûn Al-Rashîd n'était que fils du calife en 782. Ils recommencèrent une nouvelle conquête encore de 786 à 798, sous le califat d'Hârûn cette fois, ces deux expéditions se terminèrent par une victoire arabe et un tribut versé par les byzantins pour garantir la paix. En 803 donc, l'année ou se passe l'histoire raconté dans cet extrait, Hârûn Al-Rashîd (786-809) était calife des arabes après la mort de son frère et qu'il ait forcé son neveu à le reconnaître en tant que souverain en 786. Côté byzantin, c'est Nicéphore Ier l'empereur après le coup d'état qu'il a fomenté pour déposer Irène en 802. C'est cette dernière qui était au pouvoir lors des premières défaites byzantines contre les arabes et c'est donc elle qui consentit à leur verser un tribut pour garantir la paix. Ce texte est un extrait d'une chronique écrite par Tabarî : "Histoire des Prophètes et des Rois". Ce dernier est le plus grand historien arabe, il est né en 839 au Tabaristan et est mort en 923 à Bagdad. Musulman de tradition sunnite il écrit tout ses ouvrages en arabes, c'est une des figures les plus représentatives du "savant paisible". Il est connu pour ses oeuvres impressionnantes que sont "Histoire du monde musulman" ou encore "Histoire des Prophètes et des Rois", ouvrage dont est extrait notre texte. Historien mais aussi commentateur du Coran qu'il connait par coeur, il écrivait de nombreux ouvrages qui servirent de références et d'exemples pour de nombreux autres auteurs qui lui sont postérieurs. Le texte raconte des lignes 1 à 7 comment, en 803 donc, Al-Qâsim (ou Al-Amîn, 809-813), qui est le premier fils du calife Hârûn (786-809), mène une expédition dans l'empire byzantin. Il remporta le conflit et rentra avec des musulmans libérés et une promesse de tribut annuel. Mais ensuite l'empereur byzantin de l'époque, Nicéphore Ier (802-811), refuse de continuer à verser le tribut sous prétexte que ce tribut avait été concédé par l'impératrice lui succédant, Irène (797-802), et il veut se détacher des décisions qu'il considère comme faible car ayant été prit par une femme. On dit même qu'il écrivit une lettre au calife après avoir déposé Irène pour annoncer son refus, on voit tout ça des lignes 7 à 16. Après de la ligne 17 à 30, les deux souveraines s'échangent des lettres. L'empereur des Rûm (ou Roûm : nom donné aux byzantins par les arabes) dans la sienne provoque le calife Abbasside non seulement en annonçant avoir décidé de ne plus payer le tribut annuel mais aussi en demandant le remboursement des tributs précédemment versés. En lisant cette lettre Hârûn entre dans une grande colère si bien qu'aucuns de ses proches n'osent lui adresser la parole, le calife écrit ensuite au dos de cette lettre une réponse annonçant une future guerre arabo-byzantine.Enfin des lignes 31 à 37, on apprend qu'Hârûn est donc parti tout de suite en expédition contre l'empereur Nicéphore, s'empare du ville en massacrant la population et en faisant de nombreux butins si bien que l'empereur Rûm doit se soumettre et négocier une paix où encore une fois il fait la promesse de verser un tribut annuel. Mais ce dernier rompt encore cet accords lors du retour de Hârûn pensant que ce dernier ne pourrait plus revenir l'attaquer pour à ce moment là à cause du climat. Est ce que le fait que Tabarî est un auteur arabe l'empêche de raconter ces conflits arabo-byzantins de manière objective ? En quoi ce texte témoigne-t-il de la supériorité arabe dans les conflits les opposant aux byzantins ? Pour répondre à cela dans un premier temps nous parlerons des protagonistes, ensuite dans un second temps les conflits. Tout d'abord nous allons voir l'empereur des Byzantins aux moments des faits relatés par cet extrait, Nicéphore Ier. Ce dernier, selon l'auteur, est arrivé au pouvoir en 802 après que les byzantins aient chassé Irène, l'impératrice dirigeant les Rûm de 797 à 802 donc comme nous l'apprend la ligne 12 : « Or les Rûm avaient cassé Irène du pouvoir, l'avaient déposée et l'avaient remplacée par Nicéphore », Tabarî affirme ici qu'Irène et Nicéphore Ier n'ont été que remplacés l'un par l'autre sans avoir leur mot à dire. Ce premier affirme ensuite que les byzantins donnaient Jafnah comme ancètre à Nicéphore Ier. Jafnah (220-265), étant le premier roi de la dynastie Ghassanides, tribue arabo-chrétienne ayant fondée un royaume arabe pré-islamique dans la Jordanie actuelle tout en restant des vassaux de l'Empire Byzantin. On voit cette affirmation de l'auteur à la ligne 13 : « Les Rûm disaient que Nicéphore était le descendant de Jafnah, de la maison Ghassan », cette affirmation nous indique également que l'auteur n'est pas sur de cette information et insiste sur le fait que ce sont les byzantins qui tenaient de tels propos, on le voit au débout de la ligne 13 donc : « Les Rûm disaient que […] ». Les lignes 15 et 16, « On a dit que lorsque Nicéphore s'empara du pouvoir impérial, et qu'il eût reçu l'allégeance de tous les Rûm, il écrivit au calife al-Rashîd la lettre suivante [...] », nous montre que l'auteur affirme que Nicéphore à d'abord attendu d'avoir le soutient de tous pour provoquer Hârûn dans sa lettre lui informant de son refus de continuer à payer le tribut et lui demandant un remboursement des tributs déjà versés. Enfin la ligne 14 : « avant d'assumer le pouvoir impérial, il avait été en charge des finances », par cette ligne Tabarî indique une autre raison qui aurait poussé Nicéphore à ne plus payer le tribut, le fait que pendant son règne il entame une profonde réforme des finances pour pouvoir assainir ces dernières. Cette raison s'ajoutant à celles énoncés aux lignes 17 à 20 : « L'impératrice qui me précédait t'a mis dans la position d'une tour d'échiquier, alors qu'elle-même n'était qu'un simple pion ; elle t'a versé sur ses trésors la somme équivalente au montant que tu devais, de droit, lui verser. Cela vient de sa déficience et de la faiblesse propre aux femmes. », en effet au cour de ces lignes, relatant la lettre ayant été envoyé par Nicéphore au calife Abbasside, l'auteur indique que cet empereur Byzantin énonce « la faiblesse propre aux femmes » et la « déficience » d'Irène comme raison de l'entende pour verser ce tribut et donc, par ces mêmes raisons, que ce dernier n'a pas lieu d'être. L'empereur, selon Tabarî encore une fois, n'hésite pas à provoquer le calife Hârûn al-Rashîd en disant qu'il a été mit en position « d'une tour » sans raison et que ce dernier doit lui rembourser les tributs déjà versé sous la menace d'une nouvelle guerre : « sinon, le savbre nous départagera ».Ensuite nous allons donc parler de Hârûn al-Rashîd le calife Abbasside. Ce dernier est arrivé au pouvoir en 786 après la mort de son frère et après avoir écarté son neveu qui avait été désigné comme légitime successeur par le frère d'Hârûn avant la mort de ce dernier. Tabarî le mentionne une première fois de la ligne 23 à 25 : « Lorsque al-Rashîd eut pris connaissance de cette lettre, une violente colère s'empara de lui, à tel point que personne n'osait lever le regard sur lui, moins encore lui parler […] en paroles ou en actes. » L'auteur explique ici la colère qui s'empare du calife en lisant la lettre provocatrice de l'empereur byzantin dont il était victorieux. Il est prit d'une telle colère que personne n'ose lui adresser la parole de peur de fauter et d'ainsi devenir la cible de la haine du calife. Selon l'auteur, le calife arabe, en plus de s'énerver rapidement, réagissait également au quart de tour étant donné que devant un tel affront il lance immédiatement une expédition contre les byzantins dont il prend la tête, on le voit aux lignes 28 à 31 : « Au nom de Dieu […] Puis il se mit immédiatement en campagne ». Ces lignes nous décrivent la réponse califale à l'empereur byzantin, montrant un calife énervé, n'hésitant pas à insulter Nicéphore : « le chien de Rûm […] fils d'une femme infidèle ». On voit également aux lignes 33 et 34 que le calife Abbasside, malgré qu'il puisse s'énerver rapidement, peut faire preuve de clémence en acceptant la demande de paix et la demande de revenir au système du tribut, de la part de Nicéphore alors que ce dernier l'avait provoqué. Enfin nous allons voir le dernier protagonistes important de ce texte Al-Qâsim (ou encore Al-Amîn ; 809-813) al-Rashîd, premier fils d'Hârûn il prendra sa place en tant que calife en 809 à la mort de son père. Il s'en suivra une guerre de succession de deux ans avec son frère Al-Mamûn al-Rashîd (813-833), ce dernier le fera assassiner en 813 pour pouvoir accéder au califat. Al-Qâsim est cité des lignes 1 à 7 comme étant le commandant des armées arabes entrées dans le territoire de Rûm au cour du premier conflit raconté dans cet extrait qui se déroule au mois de Sha-ban (8ème mois de l'année musulman, ici juillet-août 803) : « Cette année-là, al-Qâsim b. al-Rashîd […] alors qu'il accompagnait al-Qâsim ». Au cour de ces lignes on s'aperçois que comme son père le fera après, il entre dans le territoire byzantin et assiège des villes jusqu'à ce que les byzantins demande la paix en proposant de libérer des captifs musulmans et de verser un tribut. Il accepte ce marché faisant preuve, comme son père plus tard, de clémence, respectant les conventions et les thermes de la paix ainsi mise en place. Dans une deuxième partie nous allons plus nous intéresser aux conflits entre arabe et musulman dans ce texte. Le premier décrit l'est de la ligne 1 à 7 : « Cette années-là, al-Qâsim b. al-Rashîd entra dans le territoire des Rûm au moi,s de Sha'ban. Il s'arrêta devant Quarrah […] qu'il accompagnait al-Qâsim ». On apprend donc que c'est les arabes qui mènent une expédition contre l'empire byzantin avec al-Qâsim à la tête de leurs armées. Ce derner assiègera Qurrah, forteresse de Cappadone, Koron, centre de la Turquie actuelle, suite à ça l'auteur nous dit que les byzantins propose une paix au fils du calife lui garantissant des captifs musulmans si ils consentait à partir, ce qu'il fait. Depuis 802 c'est Nicéphore qui dirige les byzantins mais il n'est pas dit que c'est lui qui se soumet et propose la paix à al-Qâsim. Sûrement car il pense à s'en prendre aux arabes et attend le soutient de tout les siens avant de se lancer dans conflit comme l'auteur nous le dit aux lignes 15 et 16 : « On a dit que lorsque Nicéphore […] et qu'il eût reçu l'allégeance de tous les Rûm... ». Ce premier conflit est donc une victoire arabe, victoire qui leur garantissait un tribut annuel très élévé payé par les byzantin. Ensuite le deuxième conflit décrit par Tabarî est celui qui commence suite à la lettre provocatrice de Nicéphore dans laquelle il annonce rompre les précédents accords de paix en refusant de continuer à payer l'impôt. Comme on l'a déjà vu le calife Abbasside part immédiatement en expédition contre les byzantins et ne s'arrête qu'en arrivant aux portes d'Héraclée, forteresse frontalière entre Byzance et les Arabes, sud-est de l'Anatolie. On le voit aux lignes 31 et 32 : « Puis il se mit immédiatement en campagne et ne s'arrêta que lorsqu'il eut atteint les portes d'Héraclée ». Arrivé ici, il s'empare d'Héraclée et en fait un exemple comme nous le décrivent les lignes 32 et 33 : il fait « du butin », tout en gardant « les meilleures prise pour lui-même », il massacre « la population » et brûle et rase la forteresse la rendant « déserte ». Devant une telle démonstration de force Nicéphore se rend compte qu'il ne fait pas le poids et demande à faire la paix avec les arabes, il doit accepté un traité humiliant avec Hârûm al-Rashîd, traité remettant en place le tribut annuel. Après avoir accepté la paix avec Nicéphore Ier, le calife repart et lorqu'il se trouve à al-Raqqah (ville au centre de la Syrie actuelle), Nicéphore revient encore une fois sur son engagement. Cet événement sera le point de départ d'un troisième conflit arabo-byzantin. La trahison de l'empereur byzantin est décrite aux lignes 34 et 35 : « Quand le calife revint de son expédition, et alors qu'il était à al-Raqqah, Nicéphore rompit l'accord et revint sur son engagement. ». Les dernières lignes de l'extrait quand à elle nous apprennent les raisons de ce revirement, l'empereur avait peut être feint de se soumettre en misant sur le climat, en effet ces lignes 36 et 37 nous apprennent qu'il pensait que les arabes ne pourrait pas « marcher à nouveau contre lui » car le « temps était extrêmement froid ». Le passage ou l'auteur dit « Nicéphore était persuadé que al-rashîd serait incapable de marcher à nouveau contre lui » laisse supposé le contraire, que al-Rashîd reveni quand même, bravant le froid. Pour conclure nous pouvons donc dire que dans cet extrait, malgré ses origines arabes, l'auteur nous décrit des faits de manière objectifs même si certains passage pourraient laisser penser qu'il prend parti pour le côté arabe, mais ces réflexions peuvent également s'appliquer dans le cas inverse. Effectivement ce texte témoigne de l'avantage net que les arabes eurent au cours de tout ces conflits arabo-byzantins décrient dans l'extrait, mais ce sont véritablement les faits et non pas une volonté de refaire l'histoire de la part de Tabarî.