Mélancholia de victor hugo
Publié le 16/03/2011
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Le poème Mélancholia, apparaît dans le recueil des Contemplations, au livre III, dans la section « Les luttes et les Rêves », écrit et publié par Victor Hugo en avril 1856. Le poète engagé dans les causes sociales de son époque, dénonce dans ce texte le travail des jeunes enfants, soumis à la folie des hommes cupides. Nous allons étudier les différents moyens utilisés par l'auteur pour argumenter ses idées. Dans un premier temps, le lecteur est fortement ému à la lecture du poème. C'est une stratégie de la part du poète afin de faire prendre conscience de l'inhumanité qui règne en France dans une société dite évoluée, et bien sûr révolter le lecteur. Le registre pathétique est ainsi dominant. L'auteur fait le portrait des jeunes enfants et souligne leur affaiblissement moral et physique, ainsi aux vers 1 et 2 « pas un seul ne rit//la fièvre maigrit », les deux hémistiches se répondant dans un dialogue navré ; de même il est fait mention de leur « pâleur », de leur petitesse d'enfant (v.15), et de leur fatigue extrême, l'adjectif « las » répondant à l'exclamation impuissante « hélas » à la fin du vers suivant. La mise en scène de la parole des enfants est d'ailleurs frappante car Dieu, le destinataire ne répond pas, et la plainte des enfants devient de fait dérisoire et vaine. Tous ces détails contribuent à mettre en scène des êtres faibles, qui ne peuvent qu'apitoyer, brisés par le supplice éternel du travail qui revient sans cesse. Cette idée d'enfermement d'où personne ne peut sortir et qui confine au tragique est exprimée dans le vers 6 où l'allitération de la consomme « m » crée une sensation d'alourdissement du temps, qui se répète et se répète. Enfin la construction symétrique du vers 9 « jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue », avec l'insistance sur la césure de la conjonction de coordination « et », achève de peindre l' atmosphère oppressante d'un cercle infernal. Un autre moyen est utilisé par Victor Hugo pour rendre repoussant le travail des enfants : c'est la personnification. En effet, aux vers 7 et 8 apparaît un « monstre » de fer carnivore, inquiétant qui « mâche on ne sait quoi dans l'ombre ». Le champ lexical du vivant l'anime d'une folie meurtrière inouïe, v.23 « qui prend l'âge tendre en sa serre ». C'est l'incarnation du Diable (référence à l'Enfer v.9) « dont le souffle étouffant ( …) tue », v.18 et 19. La meule ainsi personnifiée prend l'allure d'un ogre avide de chair fraîche. Le champ lexical de l'humain et de la machine s'affronte pour évoquer un monde où les valeurs sont inversées. Les antithèses marquent bien ce revirement de situation : ce n'est plus l'homme qui est le maître mais la machine. Aussi le métal est il acteur dans ce texte, de nombreux verbes d'action lui sont attribués : « défait ce qu'a fait Dieu », v19, « ferait (…) D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin », v.21 et22. Les repères sont anéantis, l'enfant n'a plus le droit à sa place d'innocent. Pis le progrès est accusé : « qui produit la richesse en créant la misère » v.24, et bouleversement terrifiant pour l'homme « qui donne, en somme une âme à la machine et la retire à l'homme. », v.26 et 27.Cette série d'antithèses peint un monde déshumanisé (l'enfant est un « outil » v.25) dont la source des maux est l'industrialisation. Enfin, la colère de Hugo se manifeste directement dans ce texte et passe par des expressions d'une rare violence. L'utilisation du vocabulaire religieux est à cet égard très révélateur. La haine est martelée par l'anaphore de l'adjectif « maudit » aux vers 30 et 31, annoncé au vers29 et repris au vers 32. Les mots » opprobre », « blasphème » et « vice » donnent une connotation immorale au travail , en désaccord avec l'œuvre de Dieu. Les expressions « mauvais », « servitude infâme », « œuvre insensée » propose une vision manichéenne du monde entre le travail odieux, diabolique et le travail « vrai, sain, fécond, généreux ». Il s'agit d'un combat entre deux forces contraires : la liberté et la servitude, combat cher au poète qu'il mettra souvent en scène dans ses oeuvres. La présence du poète est ainsi visible dans l'utilisation des modalisateurs (parfois même l'insulte est éructée « Rachitisme ! » v. 18 qui dénonce l'atrophie du cœur des hommes et du corps des enfants.), et dans la structure propre à ce texte qui commence par un tableau pathétique des enfants et finit par l'indignation franche, la révolte écoeurée d'un homme sensible aux malheurs de son époque.
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