mais on ne pourra jamais l'expliquer par elles ; car
Publié le 23/10/2012
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mais on ne pourra jamais l'expliquer par elles ; car il n'est pas un phénomène produit par l'activité combinée de ces forces, c'est-à-dire accidentellement, mais une idée supé- rieure qui s'est soumis toutes les autres idées inférieures par une assimilâtion triomphante, parce que cette volonté unique qui s'objective dans toute idée, tendant toujours à la plus haute objectivation possible, quitte ici les degrés inférieurs de son phénomène, après leur conflit, pour apparaître d'autant plus énergique sur un échelon supérieur. Il n'y a pas de victoire sans combat : l'idée supérieure, ou objectivation de la volonté, ne peut se produire qu'en l'emportant sur les inférieures, et elle a à triompher de la résistance de celles-ci, qui, bien que réduites en servitude, aspirent toujours à manifester leur essence d'une façon indépendante et complète. De même que l'aimant qui élève un morceau de fer engage un combat opiniâtre avec la pesanteur, qui, en tant qu'objectivation la plus basse de la volonté, a un droit primordial sur la matière de ce fer, — combat dans lequel l'aimant se fortifie, parce que la résistance du fer exige de sa part un plus grand effort, — de même, et comme tout autre phénomène de la volonté, celui qui apparaît dans l'organisme humain entretient un combat perpétuel contre les nombreuses forces physiques et chimiques qui, en leur qualité d'idées inférieures, ont des droits antérieurs sur la même matière... Par conséquent, on peut dire aussi que tout organisme ne représente l'idée dont il est l'image qu'après déduction faite de la partie de son activité qu'il doit employer à soumettre les idées inférieures qui lui disputent la matière. C'est ce dont Jacob Boehm paraît avoir eu le vague sentiment, quand il affirme quelque part que tous les corps des hommes et des animaux, et même toutes les plantes, sont à demi morts. Suivant que l'organisme réussira plus ou moins complètement à triompher des forces naturelles qui expriment les degrés inférieurs d'objectité de la volonté, il arrivera à une expression plus ou moins parfaite de sa propre idée, c'est-à-dire s'éloignera ou se rapprochera de l'idéal auquel, dans chaque genre, est attachée la beauté. Ainsi, partout dans la nature, nous voyons lutte, combat et alternative de victoire, et ainsi nous arrivons à comprendre plus clairement le divorce essentiel de la volonté avec elle- même. Chaque degré de l'objectivation de la volonté dispute à l'autre la matière, l'espace et le temps. La matière doit perpétuellement changer de forme, attendu que les phénomènes mécaniques, physiques, chimiques et organiques, suivant le fil conducteur de la causalité, et pressés d'apparaître, se la disputent obstinément pour manifester chacun son idée. On peut suivre cette lutte à travers toute la nature ; que dis-je ? Elle n'existe que par là : cette lutte n'est elle-même que la manifestation de ce divorce de la nature avec elle-même. Dans le monde animal, cette lutte éclate de la façon la plus significative ; il se nourrit des plantes, et chaque individu y sert de nourriture et de proie à un autre ; en d'autres termes, chaque animal doit abandonner la matière par laquelle se représentait son idée, pour qu'un autre puisse se manifester, car une créature vivante ne peut entretenir sa vie qu'aux dépens d'une autre, de sorte que la volonté de vivre se refait constamment de sa propre substance et, sous les diverses formes qu'elle revêt, constitue sa propre nourriture. Enfin la race humaine, qui est arrivée à se soumettre toutes les autres, considère la nature comme une immense fabrique répondant à la satisfaction de ses besoins, et finit par manifester en elle, comme nous le verrons dans le quatrième livre, et cela de la façon la plus évidente, ce divorce de la volonté : dès lors se vérifie l'adage : « Homo homini lupus. « (Monde, I, 150-2.) B) DE LA FINALITÉ, DE L'ANGOISSE ET DE LA SOUFFRANCE Supposons-nous tout occupés à observer l'art infini et inexprimable qui préside à la structure de tout animal, fût-ce l'insecte le plus commun. Nous sommes plongés dans l'admiration ; tout à coup l'idée nous vient que la nature livre sans merci à la destruction ces organismes mêmes, si parfaits et si compliqués, que chaque jour elle les laisse périr par milliers, victimes du hasard, de la rapacité animale, du caprice humain ; cette prodigalité insensée nous jette aussitôt dans une profonde surprise. Mais il y a là une confusion d'idées : nous avons dans l'esprit l'oeuvre d'art humaine, qui demande l'aide de l'intelligence pour dompter la résistance d'une matière étrangère et rebelle, et qui coûte ainsi sans doute bien des efforts. Mais les pro- ductions de la nature, quelle qu'en soit la perfection, ne lui coûtent pas la moindre peine : chez elle la volonté d'agir est déjà l'action, l'oeuvre elle-même ; car, je le répète, l'organisme n'est que la réalisation dans le cerveau de la forme visible d'une volonté déjà existante. Il résulte de cette condition nettement exprimée des êtres organisés que la téléologie, hypothèse de l'appropriation de tout organe à une fin, est un guide des plus sûrs dans l'étude de toute la nature organique. Au point de vue métaphysique, au contraire, quand il s'agit de comprendre la nature au delà de toute expérience possible, on ne peut y faire appel que secondairement et subsidiairement, pour confirmer des principes d'explication puisés ailleurs : car ici elle fait elle-même partie des problèmes dont il s'agit de rendre compte. — Aussi, quand on rencontre chez un animal un organe, dont on n'aperçoit pas la destination, il ne faut jamais avancer l'idée que la nature l'aurait produit sans but, par jeu et par pur caprice. Une telle pensée serait tout au plus possible dans l'hypothèse d'Anaxagore, pour qui la nature tiendrait son arrangement d'une raison ordonnatrice, mise en cette qualité au service d'une volonté étrangère ; mais elle est inadmissible dans la théorie qui place l'essence intime (c'est-à-dire extérieure à notre représentation) de tout organisme tout entière dans sa propre volonté : car alors aucune partie ne peut exister que sous condition d'être utile à la volonté qui lui sert de base, d'en exprimer et d'en réaliser quelque tendance, et de contribuer ainsi en quelque manière à la conservation de cet organisme. En effet, en dehors de la volonté qui apparaît en lui et des conditions extérieures, parmi lesquelles il a, de son plein gré, entrepris de vivre, et dont toute sa forme et toute son ordonnance sont disposées en vue de soutenir le conflit, il n'est rien qui ait pu influer sur lui, déterminer sa figure et ses parties, ni l'arbitraire, ni la fantaisie. Tout en lui doit donc être approprié à une fin, et les causae finales doivent être notre guide dans l'intelligence de la nature organique, comme les causae efficientes dans celle de la nature inorganique. De là, en anatomie ou en zoologie, notre étonnement mêlé de colère quand nous ne pouvons trouver la desti-
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