L'impossible Douma de Boris Eltsine
Publié le 22/02/2012
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Cinquante-deux morts israéliens
Les Israéliens l'ont éprouvé, à l'occasion d'attentats le plus souvent qualifiés d' " actes individuels " : lors de l'attaque contre unchauffeur de bus qui provoqua la mort de seize personnes, ou encore lorsque deux passants furent poignardés en pleine rue àJérusalem.
En deux ans, cinquante-deux Israéliens (dont quinze soldats) ont été tués dans des actes de violence liés à l'Intifada.
Ilreste qu'il est difficile d'évaluer l'impact du soulèvement de l'autre côté de la " ligne verte ".
On peut longer le pays du nord au sud,séjourner dans les grandes villes d'Israël, sans discerner le moindre signe apparent du conflit.
L'écrasante majorité des Israéliensne connaissent le soulèvement que par le " Mabat " -le journal télévisé-et le " Miluim " -les périodes de réserve militaire.
AJérusalem, les demandes de port d'arme, rapporte le Jérusalem Post, ont augmenté de 350 %-mais rien de tel à Tel-Aviv.
Et si lapresse israélienne n'a pas baissé les bras, insensiblement, le soulèvement est passé en pages intérieures.
Les répercussions économiques se font sans doute sentir, mais pas de manière intolérable.
De même, si l'image d'Israël s'estternie dans l'opinion occidentale, il n'y a pas eu pour lui de conséquences diplomatiques notoires.
Au contraire, ces deux annéesont vu un réchauffement sensible des relations avec l'URSS et l'Europe de l'Est et la reprise des relations avec certains grandspays africains.
Personne ne parle sérieusement d'une crise morale dans l'armée, comme au moment de la guerre du Liban.
Enfin, à en croire les spécialistes et les résultats des élections de l'an passé, le paysage politique intérieur n'a guère étébouleversé, les deux grands partis, le Likoud et les travaillistes, étant toujours côte à côte.
En dépit des efforts de ses militants, lemouvement de gauche " La paix maintenant " ne paraît guère mobiliser sur la question du soulèvement, pas plus d'ailleurs que lesultranationalistes du Goush Emounim (le Bloc de la foi) qui, en deux ans d'Intifada, n'ont pas réuni une seule grande manifestationde solidarité avec les colons.
La seule étude d'opinion systématique sur l'impact du soulèvement (1) dessine des évolutions ambiguës : à court terme, une légère inclinaison à droite et l'acceptation croissante du fait que les " impératifs de sécurité " en Cisjordanie et à Gaza doiventl'emporter sur le souci du respect des droits de l'homme à long terme, en revanche, la tendance qui domine est celle d'unedisponibilité grandissante à accepter la formule de " la paix en échange de territoires ".
Sentiment d'impuissance
Il y a plus.
Le soulèvement a largement contribué à ébranler dans la classe politique (notamment chez les travaillistes) le taboudu dialogue avec l'OLP-et cela, aussi, s'inscrit dans le nouveau statu quo.
De même qu'en fait partie le progressif rétablissementde la " ligne verte ", cette frontière de plus en plus visible séparant l'Israël d'avant 1967 de territoires dont les Israéliens se sententde plus en plus étrangers et où ils sont de moins en moins nombreux à se rendre (sauf en uniforme).
Les nationalistes palestiniens sont conscients de cette dernière évolution et cherchent à l'accentuer.
Ils veulent développer etrenforcer leurs propres circuits économiques, secouer leur dépendance et consolider ces poches de semi-autonomie conquises enébranlant l'emprise de l'administration israélienne sur la population.
L'important, disent-ils, est de répandre une " culture " de l'Etat indépendant.
Certains observateurs avancent qu' " un doublerégime " est en passe de s'instaurer en Cisjordanie et à Gaza : celui de l'administration israélienne quand l'armée est là pourl'imposer, celui des comités dès que les soldats ont tourné le dos.
La réalité est sans doute plus complexe et nuancée que la formule ne le laisse entendre.
Mais on est loin des constats établis enjuin 1987, lorsque journalistes et officiels, dressant le bilan de vingt ans d'occupation, évoquaient la mise en place progressived'un condominium jordano-israélien sur les territoires.
Quels que soient son avenir, sa portée et les véritables intentions de sesauteurs, l'initiative politique présentée en avril par le gouvernement-le projet d'élections en Cisjordanie et à Gaza-reflète, à safaçon, cette évolution : pour la première fois depuis 1948, l'interlocuteur prioritaire qu'elle désigne n'est plus tel ou tel pays arabe,mais bien les Palestiniens.
ALAIN FRACHON, YVES HELLER Le Monde du 8 décembre 1989.
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