L'évolution de l'humanité dépend-elle de l'accroissement des connaissances ?

Mais Rousseau marque une date essentielle dans l'histoire de la pensée politique - « une révolution dans la spéculation politique », dit l'un de ses commentateurs - en montrant et en démontrant que l'homme est d'abord et surtout une histoire. Il est donc vain de l'expliquer ou le régenter en voulant ne retenir que ce qu'il a de commun avec l'animal : « Ainsi les combats de coqs ne forment point une induction pour l'espèce humaine. » Pour déduire de la simple perfectibilité de l'homme la nécessité de son perfectionnement, Condorcet invoque l'accroissement indéfini des connaissances humaines. Son principal argument, dans son Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain (1793), est qu'il existe un parallélisme entre le développement des facultés intellectuelles de l'individu, année après année, et le développement des connaissances de l'humanité tout entière de siècle en siècle. Condorcet veut ainsi donner un sens scientifique à la métaphore qui compare les époques successives de l'humanité aux âges successifs d'un seul individu. L'histoire n'est que l'actualisation des riches potentialités contenues en germe dans la raison humaine dès l'enfance de l'humanité. Symétriquement, le triomphe de l'homme sur les maux qui l'accablent va de pair avec l'abandon progressif des erreurs et des préjugés qui sont l'unique cause de ses malheurs. Ainsi l'humanité serait-elle promise au perfectionnement continu de toutes ses conditions d'existence.  « Il n'est pas aussi chimérique qu'il le paraît au premier coup d'oeil de croire que la culture peut améliorer les générations elles-mêmes, et que le perfectionnement dans les facultés des individus est transmissible à leurs descendants. L'expérience semble même l'avoir prouvé.