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Lettre de Mme De Sevigné

Publié le 05/03/2011

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Mme de Grignan                                                                                                 

16 juillet 1671                                                             Mme de Sévigné       Dieu que me voila heureuse de pouvoir vous saluer en ce matin ma chère ! Après cette épopée digne d’un récit Homérique. Voila seulement quelques jours que la nécessité me vint de traverser le Rhône. Cependant, vous n’êtes pas sans ignorer que deux ans auparavant, ce capricieux fleuve avait emporté le pont dans un de ses fréquents déchainements.

N’ayant à disposition qu’une misérable barque de pêcheur, malgré le danger certain de cette traversée folle, M. Grignan insistât pour franchir le fleuve effréné. Nombreux furent les instant où nous crurent que le bateau allait chavirer et s’écraser contre les et les vestiges de l’ancien pont. Néanmoins, ce ne fut pas la peur qui m’animait l’esprit mais plutôt la volonté et l’instinct de survie qui faisait naître en moi un courage dont je ne connaissais pas l’étendue et que je n’avais jamais vu aussi fort auparavant. Alors, au milieu des torrents et de cet océan enragé, je rassemblais toute la bravoure en moi et pris les rennes de la barque, devenu simple pantin au milieu des bourrasques d’eau et de vents. Chaque vague, semblable à d’immenses remparts infranchissables, nous ébranlait de toute sa puissance et ce fût un effort surhumains qui nous permis de résister. Mais devant cette vision d’horreur nous parvînmes à rejoindre la rive, sains et saufs.

Je connais par avance les peurs et inquiétudes d’une mère affolée par la moindre vue d’une goutte de sang, donc j’imagine avec aisance votre réaction démesuré quand vous aurez reçu cette lettre ; aussi je vais vous demander d’éviter de m’exaspérer en m’envoyant plusieurs pages de louanges exagérées! Evitez aussi s’il vous plaît d’essayer de me persuader que vos prières en ma faveur ont changée quoi que ce soit au sort que le Destin nous réservait, bien que votre foi démesurée vous fasse penser le contraire. Quelques paroles le soir après le repas n’ont jamais sauvées la vie des gens, même si je sais que le prêtre de votre village dit le contraire. En somme, Mr Grignan et moi-même nous portons très bien et ce n’est pas ce maigre filet d’eau qui aurait pu y changer quelque chose.

 

Je vous embrasse.

 

Mme de Grignan

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