L'esprit de l'auteur, qu'il le veuille, qu'il le sache, ou non, est comme accordé sur l'idée qu'il se fait nécessairement de son lecteur; et donc le changement d'époque, qui est un changement de lecteur, est comparable à un changement dans le texte même, changement toujours imprévu et incalculable.» Paul Valéry, «Au sujet d'Adonis», Variété. En vous référant à votre expérience de lecteur, vous direz quelles réflexions vous inspire cette remarque de Paul Valéry.
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
Valéry évite de simplifier en montrant que si l'écrivain écrit toujours pour un lecteur, il n'a pas toujours une vision très claire de ce lecteur. Il insiste sur le fait que la littérature est une création à deux à laquelle participent l'auteur mais aussi le lecteur.
Nous retrouvons une fois de plus le problème de l'oeuvre ouverte. L'oeuvre riche trouve sans cesse de nouveaux lecteurs. L'oeuvre pauvre ne survit pas au lectorat qui a pu faire son succès.
Montaigne est l'un des meilleurs exemples de ces oeuvres qui renaissent sans cesse, tel le phénix, de leurs cendres. Au XVIIe siècle, il est critiqué et utilisé par Pascal dans la lutte que menait ce dernier contre les libertins ; libertins qui avaient fait eux-mêmes des Essais leur livre de chevet. Au XVIIIe siècle, il devient la référence des Philosophes qui luttent pour la tolérance. Rousseau forge peut-être en le lisant le projet de peindre son âme dans toute sa complexité qui prendra forme avec Les Confessions. Au XIXe siècle, c'est l'humaniste ouvert aux cultures anciennes qui retient l'attention. On se garde bien alors de commenter en classe les chapitres « anticolonialistes » avant la lettre. Cet aspect sera relevé au siècle suivant, Montaigne apparaissant comme l'un des précurseurs du relativisme culturel. Sans compter tous ceux qui réfléchissent sur l'intertextualité ou sur l'autobiographie.
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- «Pour douer notre littérature d'une action efficace, il fallait trouver le secret de l'action sur les esprits : ce secret est la clarté. Comprenons ce mot : il faut évidemment le soustraire à des interprétations grossièrement faciles. Paul Valéry a insisté souvent sur le fait que de nombreuses gens la confondent avec leur propre paresse d'esprit. Il ne s'agit pas d'être compris par les distraits. La clarté de Racine n'est qu'une apparence ; je défie un lecteur moyen d'expliquer tout ce
- « La plupart des lecteurs attribuent à ce qu'ils appellent le fond une importance supérieure, et même infiniment supérieure, à celle de ce qu'ils nomment la forme. Quelques-uns, toutefois, sont d'un sentiment tout contraire. Ils estiment audacieusement que la structure de l'expression a une sorte de réalité tandis que le sens ou l'idée n'est qu'une ombre (...) Pour les amants de la forme, une forme, quoique toujours exigée ou provoquée par quelque pensée, a plus de prix, et même de sen
- Un critique contemporain a dit : « Lorsqu'un poème ou simplement un vers provoque chez le lecteur une sorte de choc, le tire hors de lui-même, le jetant dans le rêve, ou au contraire le contraint à descendre en lui plus profondément jusqu'à le confronter avec l'être et le destin, à ces signes se reconnaît la réussite poétique. » En illustrant votre devoir par des exemples précis empruntés à votre expérience de lecteur, vous direz quelles réflexions vous inspire ce jugement.
- « Il n'y a pas de vrai sens d'un texte. Pas d'autorité de l'auteur. Quoi qu'il ait voulu dire, il a écrit ce qu'il a écrit ; une fois publié, un texte est comme un appareil dont chacun peut se servir à sa guise et selon ses moyens. » Justifiez et discutez cette affirmation de Paul Valéry, en vous appuyant sur des arguments et des exemples précis. ?
- Quelles réflexions vous suggère cette remarque de Paul Valéry :« CHAQUE HOMME SAIT UNE QUANTITÉ PRODIGIEUSE DE CHOSES QU'IL IGNORE QU'IL SAIT. SAVOIR TOUT CE QUE NOUS SAVONS ? CETTE SIMPLE RECHERCHE ÉPUISE LA PHILOSOPHIE ». ?