LES DÉBUTS DU LYRISME
Publié le 16/12/2018
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LES DÉBUTS DU LYRISME
Définition
du
une poésie les Contem-ou récitée. (lyrisme vient de lyre), la poésie lyrique est une poésie musicale dont
lyrisme
Nous entendons aujourd’hui par lyrisme inspirée par des sentiments personnels (ainsi plations de Victor Hugo), simplement lue
Mais à l’origine
les paroles sont accompagnées par une mélodie. Au XVIe siècle encore, Ronsard et Du Bellay insisteront sur les rapports étroits entre lyrisme et musique. Au Moyen Age les jongleurs et les ménestrels sont à la fois poètes et musiciens.
Le lyrisme courtois Lorsque le lyrisme trouve son expression littéraire (vers le milieu du XIIe siècle), son inspiration est courtoise et aristocratique. La forme la plus ancienne est la chanson de toile ou chanson d'histoire. Il s’agit de brefs récits en vers, où l’amour joue un grand rôle, et qui charmaient les dames occupées à broder ou à tisser (d’où le nom de chansons de toile).
Ce lyrisme courtois est l’œuvre tantôt de poètes de profession, attachés à un seigneur ou allant de château en château, trouvères en pays de langue d’oil, troubadours en pays de langue d’oc (approximativement au nord et au sud de la Loire), tantôt de grands seigneurs lettrés comme Conon de Béthune, Jean de Brienne et surtout Thibaud, Comte de Champagne (1re moitié du XIIIe siècle).
La littérature méridionale, si elle a ignoré longtemps les chansons de geste, offre au contraire très tôt une poésie lyrique originale et variée. L’influence de cette poésie des troubadours ne tarde pas à se traduire, dans les pays de langue d’oil, par un souci croissant de finesse et d’élégance, et par l’emprunt de nombreux genres d’origine méridionale.
Les divers genres A la chanson de toile succèdent des poèmes lyriques
de type très varié. Nous citerons la chanson d'amour, la chanson de croisade, la rotrouenge, le jeu parti (poème dialogué engageant un débat tranché par un « juge »), l'aube (deux êtres qui s’aiment sont éveillés par le guetteur, au point du jour), la pastourelle, enfin, cultivée surtout dans le Nord, où l’on voit un chevalier courtiser une bergère (« pastoure » ou « pastourelle »). Ce genre est très gracieux, complexe par son origine (peut-être à la fois populaire et aristocratique), et appelé, sous des formes diverses, à une longue fortune. Ne parlons-nous pas encore du « temps où les rois épousaient des bergères » ?
II. LE LYRISME BOURGEOIS AU XIIIe SIÈCLE
L’esprit bourgeois Le lyrisme courtois ne répondait guère aux tendances
de la bourgeoisie. Aussi voit-on apparaître au XIIIe siècle un nouveau courant poétique où la verve satirique et réaliste s’unit au lyrisme : l’opposition s’affirme entre esprit aristocratique et esprit bourgeois. Le lyrisme bourgeois correspond aux Fabliaux, au Roman de Renard et au théâtre comique. L’amour et ses délicatesses y ont peu de place ; piété, satire du temps, lyrisme personnel et réaliste, teinté d’un humour tantôt gai, tantôt amer, tels sont les principaux thèmes de cette poésie.
Parmi les « jongleurs » de la société bourgeoise nous citerons Jean Bodel, Colin Muset et surtout Rutebeuf.
JEAN BODEL. — Auteur du premier miracle que nous possédions, le Jeu de saint Nicolas, Jean Bodel fut aussi un poète lyrique de talent. Atteint de la lèpre (1202), il composa le « Congé », émouvant adieu à ses amis. Il mettait ainsi à la mode un genre qui sera repris plus tard par Villon sous la forme du « Lais » et du « Testament ».
COLIN MUSET. — Originaire de l’Est, Colin Muset vécut sous le règne de Saint Louis. Par son épicurisme, sa gaîté réaliste et sa façon piquante de solliciter de hauts protecteurs, il annonce l’esprit de Marot. S’adressant par exemple à un comte qui a omis de lui payer ses « gages » (« Sire comte, j’ai viellé... »), il déplore le triste état de ses finances ! Lorsqu’il rentre chez lui sans un sou, chacun, dit-il, lui fait grise mine ; mais quel accueil s’il rapporte quelque argent !
RUTEBEUF (f 1280)
Sa vie Parisien, Rutebeuf vécut sous le règne de Saint Louis.
Il était poète de profession et connut la misère, lorsque Saint Louis, toujours charitable, n’était pas là pour le secourir. Au milieu de ces difficultés matérielles, il gardait sa bonne humeur, et il ironisait sur son propre sort, ce qui nous fait songer à Villon. Sa principale joie, nous dit-il, réside dans l’espoir d’un avenir meilleur : « L’espérance du lendemain. Ce sont mes fêtes. »
Son œuvre Auteur du Miracle de Théophile, de nombreux « dits »,
de fabliaux et de poèmes intimes, Rutebeuf nous a laissé une œuvre très variée qui résume les principales tendances de l’époque et du milieu. Deux aspects nous intéressent surtout aujourd’hui : la satire et un lyrisme personnel plein de spontanéité.
La Satire. — Rutebeuf unit à une piété ardente cet esprit gaulois et populaire qui se moque volontiers des religieux lorsque, manquant à leurs devoirs, ils ne donnent pas l’exemple d’une vie édifiante. Contre les moines et leurs empiètements il prend parti pour les maîtres séculiers de l’Université de Paris. Il intervient dans toutes les querelles qui passionnent son temps.
Le Lyrisme. — Ce poète refuse de prendre trop au tragique sa propre détresse. Cela donne à ses plaintes sans cesse relevées par quelque calembour, un accent original et sympathique. Les poèmes où il nous parle de lui-même, de sa pauvreté (La Pauvreté Rutebeuf), du triste accueil qui l’attend chez lui lorsqu’il rentre les mains vides, de ses amis que « le vent » a emportés, tous ces poèmes sont vraiment vivants et attachants. Pas de grande déclamation, la peinture réaliste de la vie quotidienne avec ses tracas mesquins lorsqu’on est pauvre en dépit de son talent.
L’Art. — Ces poèmes n’étaient pas destinés à être chantés : on s’achemine donc vers le lyrisme au sens moderne du terme. Rutebeuf compense l’absence de musique par un grand souci du rythme : composition des strophes, agencement de vers de longueur différente, disposition des rimes. Il soigne aussi le détail de la forme, et va même trop loin parfois ; certaines de ses recherches d’expression nous paraissent aujourd’hui bien artificielles. Mais il faut tenir compte des goûts du temps et ne pas oublier la variété de cette œuvre, où une simplicité directe et sincère voisine avec les acrobaties les plus contestables.
LA PAUVRETÉ RUTEBEUF
Ce poème nous révèle aisément sa propre date : il fut composé entre le départ de Saint Louis pour la VIIIe croisade (ier juillet 1270), et le moment où l’on apprit en France la mort du roi, survenue devant Tunis le 25 août de la même année. Il prend ainsi la valeur d’un suprême hommage rendu à la charité de Saint Louis. On notera l’humour de Rutebeuf qui plaisante constamment sur sa propre détresse, et le caractère intime de cette poésie. Le réalisme le plus direct s’unit à une recherche amusante mais un peu artificielle : la poésie tend à devenir un jeu, mais elle est sauvée par la sincérité. Ce ton n’est pas sans ressemblance avec celui de Marot implorant l’aide de François Ier.
Je ne sais par où je commence 1
Tant ai de matière abondance
Pour parler de ma pauvreté.
Pour Dieu vous pri 2, franc Roi de France,
Que me donniez quelque chevance 3,
Si 4 ferez trop grand charité 4.
J’ai vécu de l'autrui chaté 5
Que l’on m’a creü 6 et prêté :
Or me faut chacun de créance 7,
10 Qu’8 on me sait pauvre et endetté :
Vous r’avez hors du règne été 9
Où toute avoie m'attendance 10.
Entre cher temps et ma mainie 11
Qui n’est malade ni fainie 12,
Ne m’ont laissé 13 deniers ni gage 14.
— 1 Subj. de délibération : par où commencer. — 2 Prie : l’e final est analogique. — 3 Argent (bien). — 4 Ainsi (latin sic). — 5 Chaté ou chatel : bien, fortune ; autrui : cas régime : j’ai vécu du bien d’autrui... — 6 Creü (2 syllabes) : donné à crédit. — 7 Faut : de faillir = manquer ; maintenant chacun cesse de me faire crédit. — 8 Car. — 9 C’est le préfixe re- marquant la
répétition (cp. v. 19) ; allusion à la 2e croisade de Saint Louis, cp. v. 20-24. — 10 Où a pour antécédent vous : vous en qui je mettais tout mon espoir’, avoie: j’avais. — 11 Maisonnée, famille. — 12 Faible, abattue; donc tout le monde a bon appétit! — 13 Entre eux deux, à eux deux, cher temps et ma mainie ne m’ont laissé... — 14 Objet à déposer en gage, en échange d’un prêt d’argen
«
II.
LE LYRISME BOURGEOIS
AU XIII" SIÈCLE
Le lyrisme courtois ne répondait guère aux tendances
L'e sp ri t bour geoi s
de la bourgeoisie.
Aussi voit-on apparaître au XIIIe siècle
un nouveau courant poétique où la verve satirique et réaliste s'unit au lyrisme : l'oppo
sition s'affirme entre esprit aristocratique et esprit bourgeois.
Le lyrisme bourgeois
correspond aux Fabliaux, au Roman de Renard et au théâtre comique.
L'amour et ses
délicatesses y ont peu de place ; piété, satire du temps, lyrisme personnel et réaliste,
teinté d'un humour tantôt gai, tantôt amer, tels sont les principaux thèmes de cette poésie .
Parmi les «jongleurs , de la société bourgeoise nous citerons JEAN BoDEL, CoLIN MusET
et surtout RUTEBEUF.
JEAN BODEL.
-Auteur du premier miracle que nous possédions, le Jeu de
saint Nicolas, JEAN BoDEL fut aussi un poète lyrique de talent.
Atteint de la lèpre
(1202) , il composa le « Congé», émouvant adieu à ses amis.
Il mettait ainsi à la mode un
genre qui sera repris plus tard par Villon sous la forme du "Lais , et du " Testament "·
COLIN MUSET.
-Originaire de l'Est, COLIN MusET vécut sous le règne de
Saint Louis.
Par son épicurisme, sa gaîté réaliste et sa façon piquante de solliciter de
hauts protecteurs, il annonce l'esprit de Marot.
S'adressant par exemple à un comte qui
a omis de lui payer ses" gages»(« Sire comte, j'ai viellé ...
"), il déplore le triste état de ses
finances ! Lorsqu'il rentre chez lui sans un sou, chacun, dit-il, lui fait grise mine ; mais
quel accueil s'il rapporte quelque argent !
RUTEBEUF (t 128o)
Sa vie Parisien,
RuTEBEUF vécut sous le règne de Saint Louis.
Il était poète de profession et connut la misère, lorsque
Saint Louis, toujours charitable, n'était pas là pour le secourir.
Au milieu de ces diffi
cultés matérielles, il gardait sa bonne humeur, et il ironisait sur son propre sort, ce qui
nous fait songer à Villon.
Sa principale joie, nous dit-il, réside dans l'espoir d'un avenir
meilleur: «L'espérance du lendemain.
Ce sont mes fêtes.
,
Son œuvr e Auteur
du Miracle de Théophile, de nombreux « dits "•
de fabliaux et de poèmes intimes, RuTEBEUF nous a
laissé une œuvre très variée qui résume les principales tendances de l'époque et du milieu.
Deux aspects nous intéressent surtout aujourd'hui : la satire et un lyrisme personnel plein
de spontanéité.
LA SATIRE.
-Rutebeuf unit à une piété ardente cet esprit gaulois et populaire qui se
moque volontiers des religieux lorsque, manquant à leurs devoirs, ils ne donnent pas
l'exemple d'une vie édifiante.
Contre les moines et leurs empiètements il prend parti
pour les maîtres séculiers de l'Université de Paris.
Il intervient dans toutes les querelles
qui passionnent son temps.
LE LYRISME.
-Ce poète refuse de prendre trop au tragique sa propre détresse.
Cela
donne à ses plaintes sans cesse relevées par quelque calembour, un accent original et
sympathique.
Les poèmes où il nous parle de lui-même, de sa pauvreté (La Pauvreté
Rutebeuf), du triste accueil qui l'attend chez lui lorsqu'il rentre les mains vides, de ses
amis que « le vent » a emportés, tous ces poèmes sont vraiment vivants et attachants.
Pas de grande déclamation, la peinture réaliste de la vie quotidienne avec ses tracas
mesquins lorsqu'on est pauvre en dépit de son talent..
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