Les BRICS existent ils? Fiche de Lecture de l'article de Zaki LaÏdi.

Fiche de Lecture – Les BRICS existent ils ?

Zaki Laïdi est directeur de recherche a Sciences Po  et fondateur de TELOS, un commentaire de sujets d’actualité « d’inspiration réformiste ». Dans deux articles, publiés en janvier 2010 et en mai 2011, il se pose la question des BRICS. Ceux ci représentent plus de 40% de la population mondiale, 15% du PIB et 50% de la croissance économique actuelle. Composés du Brésil, de la Russie , de l’Inde de la Chine et plus récemment de l’Afrique du Sud, ils représentent respectivement les 9^e, 6^e, 4^e, 2^e et 25^e économies mondiales. En avril 2010 a eu lieu le sommet de Bratislava, où l’objectif commun était de casser le monopole occidental sur la gestion des affaires planétaires. Or les BRICS entretiennent tellement de divergences d’intérêt et de fonctionnement , que l’on peut se demander s’ils représentent vraiment une zone d’influence. Ainsi la question est la suivante : les BRICS , collaboration ou compétition pour le pouvoir ?

Les BRICS entretiennent tout d’abord de nombreuses similitudes. Ce sont des pays fortement peuplés, avec un gigantisme géographique incontestable. Leur part dans l’économie mondiale est en hausse, et ils jouent un rôle dans le dynamisme mondial. Ils ont peu ressenti la crise de 2009, et s’affichent comme des acteurs revendiquant un rôle mondial. Les BRICS ont la volonté apparente de casser l’hégémonie occidentale, représentée par exemple par le G20. Pour la première fois, le commerce est animé par des relations Sud – Sud importantes. Enfin, leur attachement a la volonté étatique est plein. Ils s’affranchissent de la tradition culturelle occidentale notamment en refusant de remettre en question la souveraineté des autres au nom du respect des droits de l’homme : « le sud face à l’occident ». Un autre point commun à certains des BRICS est également une des causes de leur division : ces pays restent avant tout des acteurs nationaux, avec des intérêts locaux, et aspirent à une reconnaissance des Etats Unis et à un rôle complémentaire dans la dynamique mondiale.

C’est ainsi que l’une des premières dissemblances fait surface. En effet, les pays composant les BRICS utilisent cette « organisation informelle » comme levier, pour servir des intérêts souvent divergents. La Russie tout d’abord : cette ex superpuissance est incapable de se doter d’une vraie industrie. Elle essaie de retrouver sa gradeur passée, mais son déphasage puissant entre politique et économie , bref entre tentative de modernisme et retour en arrière l’empêche de reprendre une ampleur mondiale à la hauteur de ce qu’elle attend. Les Etats Unis, au lieu de s’inquiéter de ce « club des 5 » tentent plutôt d’utiliser les intérêts individuels de chacun pour les diviser. Pour la Russie, les USA promettent des mesures en sa faveur si cette dernière les aide dans leur politique contre l’Iran. De la même manière la Chine tente un mouvement de cogestion avec les USA : elle est la deuxième économie du monde et s’imagine bien diriger celui – ci en coopération avec les USA. C’est toute la question de la diplomatie avec l’Afghanistan qui se rapproche de  la Russie et de ses rapports avec l’Iran.  Quand à l’Afrique du Sud, elle est considérée comme un BRICS depuis 2010. Pourtant elle possède ¼ du PIB russe, et 3% de la croissance mondiale provient de celle – ci. Sa légitimité à apparaître au même plan que les 4 autres pays est donc peu importante. Enfin, une autre dissemblance importante est celle des systèmes politiques : la Chine est un régime autoritaire de tradition communiste, la Russie entre dans le post communisme, et les scrutins pluralistes sont présents en Inde et au Brésil.

Ainsi, le problème majeur est peut être celui du manque de confiance mutuelle. Le monde devient de plus en plus multipolaire et pluraliste, mais les BRICS  possèdent trop de divergences pour consister une véritable zone d’influence. Tant que les USA resteront l’interlocuteur privilégié pour la Chine et la Russie, peu de choses pourront se mettre en place au sein de ces BRICS pour briser l’hégémonie occidentale mondiale.