L'Édification Dans Les Liaisons Dangereuses
Publié le 26/09/2010
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une enfant alors qu'elle devient une femme, elle agit comme une mauvaise mère et sacrifie le bonheur de sa fille àl'autel de la bienséance et des conventions sociales.
Pourtant, elle a eu un moment de lucidité.
Se méprenant surles larmes de sa fille, croyant qu'elles étaient causées par la tristesse de devoir renoncer à Danceny (elle ne pouvaitpas se douter de ce qui s'était passé, cette situation n'étant pas du tout envisageable par elle), elle s'interroge etse pose les bonnes questions : le devoir d'une mère n'est-il pas de vouloir le bonheur de son enfant ? " la livrer à undésespoir éternel, cela n'est pas dans mon coeur".
Son analyse du mariage de "convenance" est plein de bon senset de sagesse : " Ces mariages qu'on calcule au lieu de les assortir, [...] ne sont-ils pas la source la plus féconde deces éclats scandaleux ?" (lettre 98) ; elle ne veut pas "compromettre [...la] vertu" de sa fille.
Mais ces bonnesrésolutions seront sans effet car empêchées par Mme de Merteuil.
Là aussi on peut reprocher à Mme de Volangesune erreur de jugement : elle s'est laissée berner par les flatteries de Mme de Merteuil ( cf lettre 102) et par lesfaux bons sentiments de cette femme qui parle vertu, devoir sagesse avec une éloquence irrésistible.
La seulechose que Mme de Volanges ait gagné, c'est d'ignorer tout ce qui est arrivé à sa fille et, dans sa dernière lettre, saquestion restera sans réponse : "ma fille est donc coupable ?" (lettre 175)De plus la leçon qu'elle assène sur le danger d'une "liaison dangereuse" dans la dernière partie de sa lettre est sanseffet puisqu'elle reconnaît que "ces réflexions tardives n'arrivent jamais qu'après l'évènement "? Bien plus touteprévention est vaine puisque " l'une des plus importantes vérités [...] reste étouffée et sans usage dans le tourbillonde nos moeurs inconséquentes."
Un but social démontré par les vertus ;Le mérite de Laclos est de toute évidence d'avoir porté un regard sans complaisance sur la société de son temps, etc'est sans doute pour cette raison que son livre a suscité à la fois intérêt et réprobation.
Il nous montre une société:- dominée par l'art du paraître : sur le grand théâtre du monde chacun joue son rôle et le plus hypocrite est celuiqui réussira le mieux.
Dans la lettre 81, Mme de Merteuil explique combien il est nécessaire de cacher qui on est pourréussir.
On va à l'opéra ou au théâtre non par goût du spectacle, encore moins pour se cultiver, mais pour semontrer.
A la fin du roman, le spectacle n'est pas sur scène, mais dans la loge de Mme de Merteuil et chacun seréjouit de sa dégradation physique.- dominée par le pouvoir de l'argent : les mariages s'envisagent à l'aune de la fortune du prétendant ( Gercourt vautmieux que Danceny parce que l'un est riche et l'autre pas) car " Le luxe absorbe tout : on le blâme, mais il fautl'imiter ; et le superflu finit par priver du nécessaire" (lettre 104).
C'est pourquoi mariage ne rime pas avec amour :outre l'exemple de Cécile et de Gercourt, Mme de Tourvel découvre après deux ans de mariage les douceurs del'amour dans les bras de son amant.-dominée par le culte du plaisir : personne n'y échappe, pas même la très vertueuse Mme de Tourvel ou la naïveCécile qui se laisse éduquer très docilement et qui très vite devient presque aussi experte que son maître quientreprend de lui rédiger " un catéchisme de débauche" (lettre 111).
Mme de Merteuil garde à jamais sur son visageinscrit les stigmates de son abandon aux plaisirs multiples.
Mme de Rosemonde se souvient des ses aventurespassées avec tendresse.
La seule qui peut-être y échappe, c'est l'austère Mme de Volanges, mais Valmont yremédie en racontant à Cécile les prétendues frasques sexuelles de sa mère.- dominée par des moeurs dissolus : le libertinage est montré tel qu'il est : Valmont et Mme de Merteuil sont despersonnages diaboliques qui ne reculent devant aucune vilenie pour mener à terme leurs projets : mensonge,trahison, manipulations, hypocrisie.
Laclos démythifie l'innocence de la jeunesse et fait de Cécile une élève libertinetrès prometteuse.
La religion est bafouée par Valmont, nouveau tartuffe qui feint le repentir et le désir de s'amenderpour mieux séduire Mme de Tourvel.
Les vertus théologales ne sont plus des remparts solides contre l'appel du désir.- dominée par l'oisiveté : personne ne travaille ( noblesse oblige) ; les seules occupations de cette société sont lesdîners, les sorties au théâtre, les après-midi passées à faire et à défaire les réputations.Laclos s'élève contre "la sévérité des Lois et contre ce reste de barbarie (=le duel) qui infecte encore nos moeurs"(lettre 164).
Bref, Laclos, en fidèle observateur, montre l'envers du décor de la noblesse, son déclin moral.
Lapremière fin envisagée par Frears montrait Mme de Merteuil montant à l'échafaud, clin d'oeil à la révolutionfrançaise, symbole de la fin d'une époque et de la noblesse.
Sans vouloir faire du roman de Laclos un roman"politique" il n'en demeure pas moins que cet éclairage n'est pas à exclure..
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