Lecture analytique : Incipit de Madame Bovary

Situation du texte : Ce texte d’ouverture est l’incipit de roman de MB de Flaubert, paru d’abord en feuilleton de la Revue de Paris en 1856. Considérée comme offense à la morale publique à son procès, ce roman va être auréolé de scandale, puis ensuite sera un très grand succès en 1857 lors de sa sortie en librairie.

Bien que Emma soit le personnage principal, Flaubert a choisi d’ouvrir et de fermer son roman sur Charles car cela va rendre plus compréhensible la vie d’Emma.

Idée générale : C’est un portrait pitoyable d’un garçon de 15 ans, personnage rejeté, moqué et qui semble étranger aux autres.

Objet : Médiocrité de Charles annoncée + fait de sa passivité : il est jeté en pâture aux autres, surtout aux regards, à la moquerie de TOUS (écoliers, profs et même auteur). C’est une présentation originale par l’intermédiaire d’un incident révélateur : sa casquette ridicule. Mais c’est également une présentation vivante qui se déroule sous forme de scène. La composition de cette scène théâtrale va du général au particulier, dans un espace clos, ce qui provoque un effet burlesque.

Il y a ici trois mouvements :         - le portrait physique de Charles

                                      - son comportement passif, qui est différent des autres écoliers

                                      - sa casquette ridicule : Charles est la risée de tous

AXE 1 : Une énonciation particulière

→ Présence de la première personne du pluriel ( Nous x5, On x5 )

·          ? Condisciple de Charles → récit de souvenirs d’école

Coutumes d’un groupe dont C est exclu

·          ? (hypothèse) interprète d’une communauté :

-       narrateur extra diégétique [ Un narrateur extra diégétique (la voix narrative, celle qui raconte l’histoire) est extérieur à la narration (à l’histoire racontée) ]

-       C perçue par ce groupe d’élève => la classe est l’équivalent d’une mini société cruelle

·         Marque d’un auteur s’identifiant à tous les personnages ? → focalisation 0 => traduit la complicité entre Narrateur/Personnage/Lecteur

Conclusion : Procédé d’ouverture disparait ensuite (récit à la troisième personne)

→ Localisation spatiale : Charles en classe de 5^ème

                    Temporelle : Charles a 15 ans

         Charles est en retard : cf 1^ère entrée de C en collège

ð  Il n’a pas connu l’école, mauvaise éducation

→ Entrée en matière ironique (portrait)

·         1^ère phrase ironique « habillé en bourgeois « il n’en a que l’apparence

·         Insistance sur le travail fourni par les élèves

Antithèse : dormir ≠ se réveiller

Apparition de l’ENNUI

·         Parole utilitaire du proviseur

Premiers renseignements sur Charles : « il ira chez les grands, où l’appelle son âge «

ð  On donne ici une première impression de Charles plutôt péjorative

AXE 2 : Le Portrait de Charles

Ce portrait est mené par une figure de répétition : son statut de « nouveau «.

8 occurrences + italiques

·         Portrait physique très minutieux : « gars de la campagne «, « chantre de village «, « poignets rouges de paysan «

-       Sa grande taille «  plus haut de taille « => différenciation

-       Son air sérieux : « air raisonnable «, « la tenue exemplaire «, « écoute de toutes ses oreilles « + chantre de village => garçon sérieux

-       Habits : trop petits, mal coupés, grossier.

Air déguisé : « habillé en bourgeois « ; souliers « forts, mal cirés «

Ensemble grossier, fantaisiste, tape à l’œil : pantalon jaunâtre

·         Portrait moral : caractère transparaît à travers ses attitudes

-       Position d’infériorité =>

.de nouveau seul face à la collectivité hostile -> Effort pour s’intégrer ?

. Adaptation plus difficile en cours d’année

. Enfant de 15 ans face à des élèves de 12 ans

-       Timidité : 3 expressions : Personnage qui existe à peine

o   « Fort embarrassé «

o   Difficulté de langage => mutisme

o   Jeu sur les sonorités « Charbovari « / bovin

-       Etranger :

§  Pendant les cours : il ne participe pas, reste immobile. Il est AMORPHE

§  Etranger aux coutumes scolaires : rite des casquettes, cloche

-       Maladroit : comique de répétition avec la casquette

-       Résigné et passif : c’est une victime, il subit le syndrome de la persécution

AXE 3 : Description de la casquette ≃ double du portrait de Chasles

La description de la casquette est une sorte de synecdoque de son propriétaire => longue description

C’est un objet symbolique et monstrueux :

ð  Description poussée jusqu’à l’absurde (proche du surréalisme avant l’heure) : Personnification

o   Subjective : « laideur muette «

o   Objective : Comparaison avec 5 types de coiffures → disproportion, matières, formes, richesse, couleurs

ð  Précieux : par la matière + rassurant pour son propriétaire

ð  Objet symbolique : grotesque autant la casquette que Charles

Il y ici un contraste entre la timidité de Charles et la casquette qui tape à l’œil. Charles aime ce qui est lourd, tape à l’œil => Flaubert le ridiculise, il règle ses comptes avec le goût bourgeois !

CONCLUSION :

-       Intérêt psychologique et dramatique : Il définit déjà ce que sera Charles Bovary c'est-à-dire un homme simple, passif, gentil, paisible : « un cœur simple «, pauvre garçon qui tout au long du roman suscitera moquerie et mépris.

Cependant, il est méritant et persévérant puisque malgré qu’il soit intellectuellement limité (médiocre), il devient tout de même officier de santé

De plus il est dépendant des femmes. Sa mère lui dicte sa vie : son choix de vie, son métier, sa femme. Il se plie à tous les désirs d’Emma, il favorise les infidélités.

-       Intérêt stylistique et littéraire : suite à l’utilisation massive de l’ironie => jeu de mots sur les points de vue.

Cet incipit est plutôt déroutant : Qui raconte ? Quel registre ? Qui est le héro ?