Le thème de la mort dans Amphitryon 38,de Giraudoux.
Publié le 23/01/2013
Extrait du document
Chaque personnage a une mort qui lui est propre, c’est-à-dire qui lui ressemble. Tante Lison meurt en toute discrétion dans sa chambre, à l’image de ce que furent sa vie et sa personnalité. La baronne succombe pendant qu’elle faisait « son exercice «, tandis que le baron rendra l’âme en réglant les dettes de Paul. Julien et Gilberte disparaissent après un acte d’une violence extrême, dans leur nid d’amour. Mais, naturelle ou provoquée, la mort est toujours inattendue et précipitée, seul le chien Massacre, à la hauteur de son nom, souffre d’une longue agonie. Tous ces morts qui encerclent la vie de Jeanne semblent réellement en contradiction avec le titre qu’a choisi Maupassant, ce qui soulève un paradoxe évident, les personnages qui désirent vivre sont anéantis tandis que Jeanne qui se refuse à vivre lorsqu’elle découvre l’adultère de Julien, est condamnée à rester sur terre et à subir son sort. Jeanne réagit différemment face aux interventions de la mort dans son univers. Même si elle est étroitement liée à tous les morts qui illustrent le roman, elle ne sera témoin que de celle de la chienne. De plus, chaque mort se définit en fonction du regard et des sentiments de Jeanne. Lorsque la baronne décède, la réaction des autres personnages est donnée de façon lapidaire. Le baron « pleura beaucoup «, Julien « demeura stupéfait «, trop surpris pour adopter « d’un seul coup le visage et la contenance qu’il fallait «, alors que la description du désarroi de Jeanne face au choc auquel elle est confrontée pour la première fois nécessite plusieurs pages. Ses agissements face à la mort de la baronne peuvent être définis selon trois mouvements : une prise de conscience du corps sans vie de sa mère, « Elle ne remuerait plus, ne rirait plus, ne dînerait plus jamais… «, puis des interrogations sur le sort de l’âme après la vie, « Où donc était maintenant l’âme de petite mère ? […] de ce corps immobile et glacé ? «, et enfin une découverte, celle des lettres de sa mère, qui aboutit à une violente réaction, « elle se mit à pleurer affreusement avec des cris involontaires qui lui déchiraient la gorge «. Les autres morts qui ponctuent le récit auront de moins en moins d’importance aux yeux de Jeanne. En effet, la venue de l’enfant mort-née est mentionnée de façon rapide malgré toute la volonté et tous les efforts qui ont animé son désir de procréer une seconde fois, « peu à peu elle se ranima «. La mort du baron et de tante Lison ne font l’objet d’aucune attention particulière comme si Jeanne était exténuée de cette succession de disparitions. Maupassant présente sa douleur comme une sorte d’« engourdissement «. L’espace vide qui se crée autour d’elle l’entraîne dans un désespoir sans limites, et lui retire toute envie de vivre afin de « ne plus souffrir, de ne plus penser «. Jeanne apparaît comme l’unique survivante de ce monde voué à l’échec, peuplé de fantômes du passé qui rendent son existence absurde.
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