« Le théâtre, c'est être réel dans l'irréel » Que pensez-vous de cette citation de Victor Hugo ?
Publié le 23/12/2010
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Comparés aux autres arts, matérialisés que ce soit par un livre, une peinture ou une sculpture, le théâtre prend vie grâce à des acteurs, présents comme des spectateur le temps de la représentation. Il peut, de ce fait, sembler plus proche de la réalité que les autres arts. Cependant, on peut se demander si ce qui est joué sur une scène de théâtre relève du réel, ou si ce n’est qu’une simple illusion. Victor Hugo écrivait « Le théâtre, c’est être réel dans l’irréel « ; il semble difficile de démêler le réel de l’irréel. Pour ce faire, il convient d’abord de mettre en valeur les éléments qui inscrivent le théâtre dans la réalité. Nous étudierons ensuite son ancrage dans l’irréel.
Le théâtre peut être considéré comme une retranscription du réel. Tout d’abord, nous analyserons le principe suivant lequel le théâtre recrée la réalité, avant de revenir sur les règles couramment utilisées au théâtre, pour enfin aborder le caractère éphémère de cette réalité.
Dans l’Espace vide, Peter Brook écrit ceci « Au théâtre, comme si est une expérience. Dans la vie quotidienne, comme si est une évasion ; au théâtre, comme si est la vérité. « Il explique ainsi que le théâtre permet de créer l’illusion de la réalité, puis de donner naissance dans cette réalité imaginaire à n’importe quel événement, d’une manière quasiment expérimentale. Dans l’Illusion comique, Corneille met parfaitement en scène cette particularité du théâtre. En effet, le spectateur (que ce soit Primadant ou, par le jeu de la double énonciation, le spectateur de la pièce) ne se rend compte qu’à la fin de la représentation que ce qui vient de se dérouler sous ses yeux, n’était pas réel. Corneille nous montre ainsi que le théâtre rend réel ce qui ne l’est pas dans notre vie courante.
Dans le théâtre classique, cette représentation de la réalité est définie par des règles très strictes de vraisemblance, de bienséance et d’unités. Selon celles-ci, il ne doit être montré aucune scène violente, les personnages doivent être crédibles, et la pièce ne doit compter qu’une action, définie dans un lieu unique et une durée de vingt-quatre heures. Durant cette période, des auteurs, comme par exemple Racine avec Phèdre, décrivent les affres des passions humaines. D’autres, comme Molière au XVIIème siècle, utilisent la comédie pour « castigat ridendo mores « (corriger les mœurs par le rire). Mais au XIXème siècle, certains auteurs se révoltent contre ces règles qui nuisent selon eux à la création et à la vraisemblance des pièces. Victor Hugo notamment s’y oppose. Selon lui, « Toute action a sa durée propre et son lieu particulier «. Il crée en 1930 Hernani, où ces règles sont abolies.
Le théâtre permet donc une composition de la réalité, même si elle suit des règles différentes selon les époques. Mais, pour que cette réalité soit effective, il faut que la pièce soit jouée. Comme l’écrit Louis Jouvet, « Le théâtre n’existe que dans l’acte du théâtre « : c’est lors de la représentation que ce qui est joué devient réalité. Cette réalité est fragile et éphémère, elle disparaît à la fin de chaque représentation, en attendant que de nouveau des acteurs lui donnent vie. Le théâtre peut se définir ainsi, comme un mort qui renaît sans cesse, à l’image du Phénix. Il n’a pas de consistance propre, il ne devient réel que si des acteurs décident de jouer la pièce. C’est uniquement à ce moment que la réalité peut naître sur scène, l’espace d’une représentation.
Pour toutes ces raisons, nous pouvons admettre que le théâtre donne aux spectateurs l’illusion du réel. Cependant, l’étude d’un grand nombre d’œuvres théâtrales nous présente des situations éloignées de la réalité quotidienne.
Le théâtre s’inscrit malgré tout dans « l’irréel «. En premier lieu, il est en décalage avec la vie de tous les jours. En outre, les textes proposent des situations de plus en irréelles ; enfin, un des buts du théâtre est de représenter ce qui ne peut être vécu dans la vie réelle.
Ce qui se passe au théâtre peut être perçu comme « irréel «, dans le sens où les événements qui ont lieu sur scène n’ont d’implications matérielles que sur cette scène même, et non dans la vie des spectateurs. Même si « l’acte du théâtre « crée une réalité, celle-ci n’est pas faite pour durer et n’a pas de prise sur notre vie. Une pièce de théâtre est avant tout une œuvre d’art, au même titre qu’une peinture ou un film, et ne peut être considéré comme une réalité en soi. A l’échelle d’une vie, la représentation théâtrale devient donc « irréelle «.
Au XXème siècle, l’abandon définitif des règles classiques permet la naissance de pièces totalement décalées avec notre réalité. Giraudoux crée ainsi Ondine, où se côtoient créatures fantastiques et humaines dans une sorte de conte tragique ; il utilise le même procédé que Corneille avec Alcandre dans l’Illusion comique et provoque à l’aide d’un prestidigitateur un effet de théâtre dans le théâtre. Jean Cocteau réécrit pour sa part le mythe d’Œdipe dans La machine infernale, une pièce totalement irréaliste. Auteur contemporain, Eric-Emmanuel Schmitt met quant à lui le diable en scène dans L’Ecole du Diable, ou Dieu, dans Le Visiteur. Ces pièces ne s’attachent absolument pas à une imitation du réel. « L’art est la vérité choisie «, disait le dramaturge Alfred de Vigny ; les auteurs du XXème siècle et désormais du XXIème siècle ont ainsi fait le choix de prendre leur distance avec la réalité pour pouvoir l’interpréter.
Le théâtre représente donc ce qui nous est impossible, pour une multitude de raisons, dans la vie réelle. Nous pouvons en effet considérer que nous évoluons dans le « theatrum mondi « (le théâtre du monde), au sein duquel nous sommes tous acteurs et spectateurs, et en perpétuelle représentation. Ainsi, il n’y a plus de « réalité « établie, puisque nous créons la notre en jouant, et en fonction de celle que nous impose les autres. Mais dans le cadre de la vie réelle, les principes du théâtre se heurtent aux de nos actes sur notre vie et celles des autres. En aucun cas « comme si « ne peut être une expérience, cet il n’y a pas de retour en arrière possible. Le théâtre, où ces expériences perdrent leur caractère irrémédiable, nous offre de vivre par procuration ce que nous ne pourrions nous permettre de vivre réellement. Il détient une fonction de catharsis (purification), comme l’explique Aristote dans La Poétique.
Il est donc évident que le théâtre s’exprime dans l’irréel.
Le théâtre, par sa nature même, crée une illusion de la réalité qui répond aux règles que définit chaque époque ; cette réalité ne dure que le temps de la représentation. D’autre part, le théâtre se trouve en décalage avec la réalité, dont il est en fait une recomposition. De plus en plus d’auteurs choisissent de laisser libre cours à leur imagination. Enfin, de la catharsis naît forcement l’irréel. Le théâtre, c’est effectivement « être réel dans l’irréel «, comme le définissait Victor Hugo. Si on ne se place plus du point de vue du spectateur, mais de celui de l’acteur, les relations entre réel et irréel sont encore plus complexes. L’acteur se réfère en permanence au monde réel, à soi et au personnage ; comme le dit Jouvet « On ne joue plus le rôle, on se joue dans le rôle «.
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Le théâtre s'inscrit malgré tout dans « l'irréel ».
En premier lieu, il est en décalage avec la vie de tous les jours.
En outre, les textes proposent des situations de plus en irréelles ; enfin, un des buts du théâtre est dereprésenter ce qui ne peut être vécu dans la vie réelle.
Ce qui se passe au théâtre peut être perçu comme « irréel », dans le sens où les événements qui ont lieu sur scène n'ont d'implications matérielles que sur cette scène même, et non dans la vie des spectateurs.
Même si« l'acte du théâtre » crée une réalité, celle-ci n'est pas faite pour durer et n'a pas de prise sur notre vie.
Une piècede théâtre est avant tout une œuvre d'art, au même titre qu'une peinture ou un film, et ne peut être considérécomme une réalité en soi.
A l'échelle d'une vie, la représentation théâtrale devient donc « irréelle ».
Au XXème siècle, l'abandon définitif des règles classiques permet la naissance de pièces totalement décalées avec notre réalité.
Giraudoux crée ainsi Ondine , où se côtoient créatures fantastiques et humaines dans une sorte de conte tragique ; il utilise le même procédé que Corneille avec Alcandre dans l' Illusion comique et provoque à l'aide d'un prestidigitateur un effet de théâtre dans le théâtre.
Jean Cocteau réécrit pour sa part le mythe d'Œdipe dansLa machine infernale , une pièce totalement irréaliste.
Auteur contemporain, Eric-Emmanuel Schmitt met quant à lui le diable en scène dans L'Ecole du Diable , ou Dieu, dans Le Visiteur .
Ces pièces ne s'attachent absolument pas à une imitation du réel.
« L'art est la vérité choisie », disait le dramaturge Alfred de Vigny ; les auteurs du XXèmesiècle et désormais du XXIème siècle ont ainsi fait le choix de prendre leur distance avec la réalité pour pouvoirl'interpréter.
Le théâtre représente donc ce qui nous est impossible, pour une multitude de raisons, dans la vie réelle.
Nous pouvons en effet considérer que nous évoluons dans le « theatrum mondi » (le théâtre du monde), au sein duquelnous sommes tous acteurs et spectateurs, et en perpétuelle représentation.
Ainsi, il n'y a plus de « réalité » établie,puisque nous créons la notre en jouant, et en fonction de celle que nous impose les autres.
Mais dans le cadre de lavie réelle, les principes du théâtre se heurtent aux de nos actes sur notre vie et celles des autres.
En aucun cas« comme si » ne peut être une expérience, cet il n'y a pas de retour en arrière possible.
Le théâtre, où cesexpériences perdrent leur caractère irrémédiable, nous offre de vivre par procuration ce que nous ne pourrions nouspermettre de vivre réellement.
Il détient une fonction de catharsis (purification), comme l'explique Aristote dans La Poétique .
Il est donc évident que le théâtre s'exprime dans l'irréel.
Le théâtre, par sa nature même, crée une illusion de la réalité qui répond aux règles que définit chaque époque ; cette réalité ne dure que le temps de la représentation.
D'autre part, le théâtre se trouve en décalageavec la réalité, dont il est en fait une recomposition.
De plus en plus d'auteurs choisissent de laisser libre cours àleur imagination.
Enfin, de la catharsis naît forcement l'irréel.
Le théâtre, c'est effectivement « être réel dansl'irréel », comme le définissait Victor Hugo.
Si on ne se place plus du point de vue du spectateur, mais de celui del'acteur, les relations entre réel et irréel sont encore plus complexes.
L'acteur se réfère en permanence au monderéel, à soi et au personnage ; comme le dit Jouvet « On ne joue plus le rôle, on se joue dans le rôle »..
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