Le mot "infini" dans l'oeuvre de René DESCARTES
Publié le 10/08/2010
Extrait du document
Règles pour la direction de l’esprit, Règle deuxième.
Et quoique les savants se persuadent peut-être que les connaissances de cette espèce sont en bien petit nombre, parce que sans doute, par un vice naturel à l’esprit humain, ils ont négligé de porter leur attention sur ces objets, comme trop faciles et à la portée de tous, je ne crains pas cependant de leur déclarer qu’elles sont plus nombreuses qu’ils ne pensent, et qu’elles suffisent pour démontrer avec évidence un nombre infini de propositions, sur lesquelles ils n’ont pu émettre jusqu’ici que des opinions probables, opinions que bientôt, pensant qu’il était indigne d’un savant d’avouer qu’il ignore quelque chose, ils se sont habitués à parer de fausses raisons, de telle sorte qu’ils ont fini par se les persuader à eux-mêmes, et les ont débitées comme choses avérées.
Règles pour la direction de l’esprit, Règle quatorzième.
Il résulte de là que dans un même objet il peut y avoir des dimensions diverses à l’infini, qu’elles n’ajoutent absolument rien aux choses qui les possèdent, mais qu’on doit les entendre de la même façon, soit qu’elles aient un fondement réel dans les objets eux-mêmes, soit qu’elles aient été inventées arbitrairement par notre esprit.
ABREGE DE LA MUSIQUE, Des degrés ou tons de musique.
A quoi je réponds qu’il y aurait par ce moyen un progrès à l’infini, mais que dans cette main on n’a dû exprimer simplement que les muances d’une chanson.
DISCOURS DE LA METHODE, Quatrième partie.
Car si j’eusse été seul et indépendant de tout autre, en sorte que j’eusse eu, de moi-même, tout ce peu que je participais de l’être parfait, j’eusse pu avoir de moi, par même raison, tout le surplus que je connaissais me manquer, et ainsi être moi-même infini, éternel, immuable, tout connaissant, tout-puissant, et enfin avoir toutes les perfections que je pouvais remarquer être en Dieu.
Mais si nous ne savions point que tout ce qui est en nous de réel et de vrai vient d’un être parfait et infini, pour claires et distinctes que fussent nos idées, nous n’aurions aucune raison qui nous assurât qu’elles eussent la perfection d’être vraies.
LA DIOPTRIQUE, DISCOURS SIXIEME, DE LA VISION.
mais aussi qu’elle puisse transférer de là son attention à tous les lieux contenus dans les lignes droites qu’on peut imaginer être tirées de l’extrémité de chacune de ces parties, et prolongées à l’infini.
LA DIOPTRIQUE, DISCOURS HUITIÈME, DES FIGURES QUE DOIVENT AVOIR LES CORPS TRANSPARENTS POUR DÉTOURNER LES RAYONS PAR RÉFRACTION EN TOUTES LES FACONS QUI SERVENT A LA VUE.
Car cette ligne est de telle nature, que bien qu’elle se courbe toujours de plus en plus vers un même côté, elle se peut toutefois étendre à l’infini, sans que jamais ses extrémités se recontrent.
il est certain que cette ligne brûlante à l’infini que quelques-uns ont imaginée n’est qu’une rêverie.
LES METEORES, DISCOURS TROISIEME, Du sel.
On pourrait ainsi rendre raison de toutes les autres propriétés de cette eau, mais la chose irait à l’infini, et il sera mieux que retournant à la considération des vapeurs, nous commencions à examiner comment elles se meuvent dans l’air, et comment elles y causent les vents.
LES METEORES, DISCOURS SIXIEME, DE LA NEIGE, DE LA PLUIE, ET DE LA GRELE.
Le matin suivant, il tomba des flocons de neige qui semblaient être composés d’un nombre infini de fort petites étoiles jointes ensemble :
LE MONDE OU TRAITÉ DE LA LUMIERE, Chapitre III, De la dureté et la liquidité.
Je ne veux point déterminer si leur nombre est infini ou non ;
LE MONDE OU TRAITÉ DE LA LUMIERE, CHAPITRE VI, Description d’un nouveau monde ; et des qualités de la matière dont il est composé.
Les philosophes nous disent que ces espaces sont infinis et ils doivent bien en être crus puisque ce sont eux-mêmes qui les ont faits.
Ainsi, encore que notre imagination semble se pouvoir étendre à infini et que cette nouvelle matière ne soit pas supposée être infinie, nous pouvons bien toutefois supposer qu’elle remplit des espaces beaucoup plus grands que tous ceux que nous aurons imaginés.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Première Méditation.
Et pour cela il ne sera pas aussi besoin que je les examine chacune en particulier, ce qui serait d’un travail infini ;
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Méditation Troisième.
De plus, celle par laquelle je conçois un Dieu souverain, éternel, infini, immuable, tout connaissant, tout-puissant, et créateur universel de toutes les choses qui sont hors de lui ;
Et encore qu’il puisse arriver qu’une idée donne naissance à une autre idée, cela ne peut pas toutefois être à l’infini, mais il faut à la fin parvenir à une première idée, dont la cause soit comme un patron ou un original, dans lequel toute la réalité ou perfection soit contenue formellement et, en effet, qui se rencontre seulement objectivement ou par représentation dans ces idées.
Cette idée, dis-je, d’un être souverainement parfait et infini est très vraie ;
Et ceci ne laisse pas d’être vrai, encore que je ne comprenne pas l’infini, et qu’il se rencontre en Dieu une infinité de choses que je ne puis comprendre, ni peut-être aussi atteindre aucunement par la pensée :
car il est de la nature de l’infini, que moi qui suis fini et borné ne le puisse comprendre ;
En effet j’expérimente déjà que ma connaissance s’augmente et se perfectionne peu à peu, et je ne vois rien qui puisse empêcher qu’elle ne s’augmente ainsi de plus en plus jusques à l’infini ;
Mais je conçois Dieu actuellement infini en un si haut degré, qu’il ne se peut rien ajouter à la souveraine perfection qu’il possède.
Et il est très manifeste qu’en cela il ne peut y avoir de progrès à l’infini, vu qu’il ne s’agit pas tant ici de la cause qui m’a produit autrefois, comme de celle qui me conserve présentement.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX PREMIERES OBJECTIONS.
mais bien il suit seulement que mon entendement, qui est fini, ne peut comprendre l’infini.
et si, voyant qu’en recherchant ainsi les pères de mes pères je ne pourrais pas continuer ce progrès à l’infini, pour mettre fin à cette recherche, je concluais qu’il y a une première cause.
Il est aussi loisible à un chacun de s’interroger soi-même, savoir si en ce même sens il est par soi, et lorsqu’il ne trouve en soi aucune puissance capable de le conserver seulement un moment, il conclut avec raison qu’il est par un autre, et même par un autre qui est par soi, parce qu’étant ici question du temps présent, et non point du passé ou du futur, le progrès ne peut pas être continué à l’infini.
Et il demande ici, avec beaucoup de raison, si je connais clairement et distinctement l’infini ;
C’est pourquoi je dirai ici premièrement que l’infini, en tant qu’infini, n’est point à la vérité compris, mais que néanmoins il est entendu ;
Et je mets ici de la distinction entre l’indéfini et l’infini.
Et il n’y a rien que je nomme proprement infini, sinon ce en quoi de toutes parts je ne rencontre point de limites, auquel sens Dieu seul est infini.
De plus je mets distinction entre la raison formelle de l’infini, ou l’infinité, et la chose qui est infinie.
En l’un desquels il était question de savoir si quelque chose de réel était contenu dans l’idée que nous formons de Dieu, ou bien s’il n’y avait qu’une négation de chose (ainsi qu’on peut douter si, dans l’idée du froid, il n’y a rien qu’une négation de chaleur), ce qui peut aisément être connu, encore qu’on ne comprenne pas l’infini.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX SECONDES OBJECTIONS.
Car je veux bien ici avouer franchement que l’idée que nous avons, par exemple, de l’entendement divin ne me semble point différer de celle que nous avons de notre propre entendement, sinon seulement comme l’idée d’un nombre infini diffère de l’idée du nombre binaire ou du ternaire ;
par exemple, de cela seul que j’aperçois que je ne puis jamais, en nombrant, arriver au plus grand de tous les nombres, et que de là je connais qu’il y a quelque chose en matière de nombrer qui surpasse mes forces, je puis conclure nécessairement, non pas à la vérité qu’un nombre infini existe, ni aussi que son existence implique contradiction, comme vous dites ;
Mais, pour entendre quel est cet être plus parfait que je ne suis, et si ce n’est point ce même nombre dont je ne puis trouver la fin, qui est réellement existant et infini, ou bien si c’est quelque autre chose, il faut considérer toutes les autres perfections, lesquelles, outre la puissance de me donner cette idée, peuvent être en la même chose en qui est cette puissance ;
Ce qui à la vérité ne sera pas difficile, si pour toutes raisons il apporte seulement celles que vous alléguez ici, c’est à savoir, que l’infini en tout genre de perfection exclue toute autre sorte d’être, etc.
Car, premièrement, si on lui demande d’où il a pris que cette exclusion de tous les autres êtres appartient à la nature de l’infini, il n’aura rien qu’il puisse répondre pertinemment ;
d’autant que, par le nom d’infini, on n’a pas coutume d’entendre ce qui exclut l’existence des choses finies, et qu’il ne peut rien savoir de la nature d’une chose qu’il pense n’être rien du tout, et par conséquent n’avoir point de nature, sinon ce qui est contenu dans la seule et ordinaire signification du nom de cette chose.
mais encore que nous pensions que celle-là s’augmente à l’infini, nous ne craindrons pas pour cela que la nôtre devienne moindre.
et partant il peut être conçu tout à fait infini sans aucune exclusion des choses créées.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, Objection IX.
et derechef celle par laquelle je conçois un Dieu souverain, éternel, infini, tout connaissant, tout-puissant, et créateur universel de toutes les choses qui sont hors de lui, a sans doute en soi plus de réalité objective que celles par qui les substances finies me sont représentées.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION Xe.
d’où il suit que le nom d’infini ne nous fournit pas l’idée de l’infinité divine, mais bien celle de mes propres termes et limites :
tout ainsi que, dire que Dieu est infini, c’est de même que si nous disions qu’il est du nombre des choses dont nous ne concevons point les limites.
C’est pourquoi, encore qu’on eût démontré qu’un être infini, indépendant, tout-puissant, etc.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION Xe, REPONSE.
car qui est celui qui conçoit quelque chose, qui ne s’en aperçoive, et partant, qui n’ait cette forme ou cette idée de l’intellection, laquelle venant à étendre à l’infini, il forme l’idée de l’intellection divine ?
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX QUATRIEMES OBJECTIONS, REPONSE A L’AUTRE PARTIE, DE DIEU.
or est-il qu’il n’est pas moins de l’essence d’un être infini d’exister, qu’il est de l’essence d’un triangle d’avoir ses trois angles égaux à deux droits ;
et derechef, à celui qui demande pourquoi il n’en a pas besoin, il faut répondre, parce qu’il est un être infini duquel l’existence est son essence ;
si je pensais que la sphère ne pût être prise pour une figure rectiligne, ou quasi rectiligne, dont les côtés sont infinis, je n’attribuerais aucune force à cette démonstration, parce qu’elle n’est pas véritable, si vous considérez la sphère comme une figure curviligne, ainsi qu’elle est en effet, mais bien si vous la considérez comme une figure rectiligne dont le nombre des côtés est infini).
si je pensais que ce qui se conclut ici, se dût entendre d’une figure rectiligne dont les côtés sont infinis, je ne croirais point du tout cela de la sphère, parce que j’ai une connaissance certaine que la sphère n’est point une figure rectiligne.
MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA TROISIEME MÉDITATION.
et il n’est pas vrai que nous concevions l’infini par la négation du fini, vu qu’au contraire toute limitation contient en soi la négation de l’infini.
car nous concevons qu’il est infini, et il n’y a rien de plus grand que l’infini.
Je vous avertirai seulement ici, touchant l’idée de l’infini (laquelle vous dites ne pouvoir être vraie si je ne comprends l’infini, et que ce que j’en connais n’est tout au plus qu’une partie de l’infini, et même une fort petite partie, qui ne représente pas mieux l’infini que le portrait d’un simple cheveu représente un homme tout entier), je vous avertirai, dis-je, qu’il répugne que je comprenne quelque chose, et que ce que je comprends soit infini ;
car pour avoir une idée vraie de l’infini il ne doit en aucune façon être compris, d’autant que l’incompréhensibilité même est contenue dans la raison formelle de l’infini ;
et néanmoins c’est une chose manifeste que l’idée que nous avons de l’infini ne représente pas seulement une de ses parties, mais l’infini tout entier, selon qu’il doit être représenté par une idée humaine ;
Car, comme il suffit de concevoir une figure composée de trois lignes pour avoir l’idée de tout le triangle, de même il suffit de concevoir une chose qui n’est renfermée d’aucunes limites pour avoir une vraie et entière idée de tout l’infini.
Ce que vous dites après cela touchant le progrès à l’infini, à savoir, qu’il n’y a “ point de répugnance qu’il y ait un tel progrès “ , vous le désavouez incontinent après ;
elle se forme tout entière et tout à la fois de ce que nous concevons par notre esprit l’être infini, incapable de toute sorte d’augmentation.
LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, PREMIERE PARTIE, Art. 19.
car encore que nous ne les comprenions pas, parce que la nature de l’infini est telle que des pensées finies ne le sauraient comprendre, nous les concevons néanmoins plus clairement et plus distinctement que les choses matérielles, à cause qu’étant plus simples et n’étant point limitées, ce que nous en concevons est beaucoup moins confus.
LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, PREMIERE PARTIE, Art. 24.
Mais, afin que nous puissions l’entreprendre avec plus de sûreté, toutes les fois que nous voudrons examiner la nature de quelque chose, nous nous souviendrons que Dieu, qui en est l’auteur, est infini, et que nous sommes entièrement finis.
LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, PREMIERE PARTIE, Art. 26.
Ainsi nous ne nous embarrasserons jamais dans les disputes de l’infini ;
LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, SECONDE PARTIE, Art. 34.
à savoir, une division de quelques parties de la matière jusques à l’infini, ou bien une division indéfinie, et qui se fait en tant de parties, que nous n’en saurions déterminer de la pensée aucune si petite, que nous ne concevions qu’elle est divisée en effet en d’autres plus petites.
LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, TROISIEME PARTIE, Art. 100.
Mais encore qu’il reçoive sans cesse de nouvelles parties de la matière des taches qui se défont, il ne peut pas pour cela croître à l’infini, parce que l’agitation du second élément, qui passe tout autour et tout au travers de son corps, dissipe autant de ses parties qu’il lui en vient de nouvelles, et les divisant en plusieurs pièces leur fait reprendre la forme du premier élément.
LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, QUATRIEME PARTIE, Art. 201.
Pour le moins, entre les philosophes, ceux qui avouent que les parties de la quantité sont divisibles à l’infini, doivent avouer qu’en se divisant elles peuvent devenir si petites qu’elles ne seront aucunement sensibles.
LES PASSIONS DE L’AME, LETTRE Ire A MONSIEUR DESCARTES.
Et vous l’avez déjà très clairement prouvé dans vos Principes, lorsqu’en y expliquant toutes les qualités sensibles, sans rien considérer que les grandeurs, les figures et les mouvements, vous avez montré que ce monde visible, qui est tout l’objet de la physique, ne contient qu’une petite partie des corps infinis, dont on peut imaginer que toutes les propriétés ou qualités ne consistent qu’en ces mêmes choses, au lieu que l’objet de la mathématique les contient tous.
toutefois, considérant que le nombre des corps particuliers qui vous restent encore à examiner est presque infini ;
Correspondance, année 1629, A R. P. MERSENNE, 8 octobre 1629.
mais le temps auquel le cheval doit attraper la tortue peut être fort aisément déterminé, car puisqu’il va dix fois aussi vite qu’elle, et qu’en joignant à la dixième partie d’une lieue la dixième de cette dixième, et derechef la dixième de la dixième, et ainsi à l’infini, toutes ces dixièmes jointes ensemble font justement une neuvième ;
Correspondance, année 1629, Au R. P. MERSENNE, 20 novembre 1629.
et comme on peut apprendre en un jour à nommer tous les nombres jusques à l’infini, et à les écrire en une langue inconnue, qui sont toutefois une infinité de mots différents qu’on pût faire le même de tous les autres mots nécessaires pour exprimer toutes les autres choses qui tombent en l’esprit des hommes.
Correspondance, année 1630, AU R. P. MERSENNE , 20 mai 1630. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 6 mai 1630.).
Mais ce qui fait qu’il est aisé en ceci de se méprendre, c’est que la plupart des hommes ne considèrent pas Dieu comme un être infini et incompréhensible, et qui est le seul auteur duquel toutes choses dépendent ;
Correspondance, année 1638, AU R. P. MERSENNE, 27 mai 1638. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 17 mai 1638).
Et tout de même prenant les points IKLM pour ceux où le cercle touche la courbe, lorsqu’il touche sa base aux points NOPQ, il est évident que les quatre triangles AIE, EKD, DLF et FMC sont ensemble égaux aux quatre triangles isocèles inscrit dans le cercle SYT, TZV, VIX, X2S, et que les huit autres triangles inscrits dans la courbe sur les côtés de ces quatre seront égaux aux huit inscrits dans le cercle, et ainsi à l’infini.
2° Pour la question, savoir s’il y aurait un espace réel, ainsi que maintenant, en cas que Dieu n’eût rien créé, encore qu’elle semble surpasser les bornes de l’esprit humain, et qu’il ne soit point raisonnable d’en disputer, non plus que de l’infini ;
Correspondance, année 1638, RÉPONSE DE Monsieur DESCARTES A Monsieur MORIN, 13 juillet 1638.
dont le nombre est presque infini, avec cela seul, que tous les corps sont composés de quelques parties, qui est une chose qu’on voit à l’oeil en plusieurs, et qu’on peut prouver par une infinité de raisons dans les autres (car pour ce que je mets de plus, à savoir que les parties de tel ou tel corps sont de telle figure, plutôt que d’une autre, il est aisé de le démontrer à ceux qui avouent qu’ils sont composés de parties) ;
Puis, à ce que vous dites, que donnant à cette matière le mouvement rectiligne de l’air de plus haut, et ainsi à l’infini, ou bien concéder qu’elle sort des corps lumineux, je répond que son action ne doit point venir de plus haut à l’infini, et qu’elle commence aux corps lumineux, desquels toutefois cette matière ne sort non plus que le bâton d’un aveugle sort des objet dont il lui fait avoir le sentiment.
Correspondance, année 1638, Au R. P. MERSENNE, 8 octobre 1638. (Les éditions contemporaines retiennent comme date le 11 octobre 1638).
Il manque en tout ce qu’il dit de l’infini, en ce que, nonobstant qu’il confesse que l’esprit humain étant fini, n’est pas capable de le comprendre, il ne laisse pas d’en discourir tout de même que s’il le comprenait .
car en le cherchant par les biais ordinaires, on s’embarrasse en des calculs qui sont infinis ;
Correspondance, année 1639, Au R. P. MERSENNE, 9 janvier 1639.
et qu’il n’y a que ceux qui tendent à s’assembler en quelque point mathématique, qui peuvent être rendus parallèles à l’infini.
Correspondance, année 1640, A Monsieur REGIUS, 22 mai 1640. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 24 mai.).
mais toute la force de ma preuve consiste en ce que je prétends que ma nature ne pourrait être telle que je pusse augmenter à l’infini par un effort de ma pensée ces perfections qui sont très petites en moi, si nous ne tirions origine de cet être en qui ces perfections se trouvent actuellement infinies.
Correspondance, année 1640, Au R. P. MERSENNE, 11 novembre 1640.
, ne prouve rien, sinon que notre âme, étant finie, ne peut comprendre I’infini.
Correspondance, année 1641, Au R. P. MERSENNE, 28 février 1641. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 28 janvier 1641.).
J’ai parcouru le livret de Monsieur Morin, dont le principal défaut est qu’il traite partout de l’infini, comme si son esprit était au dessus, et qu’il en pût comprendre les propriétés, qui est une faute commune quasi à tous ;
laquelle j’ai tâché d’éviter avec soin, car je n’ai jamais traité de l’infini que pour me soumettre à lui, et non point pour déterminer ce qu’il est, ou qu’il n’est pas.
Et il suppose aussi qu’il ne peut y avoir de nombre infini, etc.
Correspondance, année 1641, Au R. P. MERSENNE, 1er juillet 1641.
autrement, comment aurait-il pu dire que Dieu est infini et incompréhensible, et qu’il ne peut pas être représenté par notre imagination ;
Correspondance, année 1644, Au P. MESLAND, 15 mai 1644. (Les éditions contemporaines retiennent comme date le 2 mai 1644).
Car mon âme étant finie, je ne puis connaître que l’ordre des causes n’est pas infini, sinon en tant que j’ai en moi cette idée de la première cause ;
Correspondance, année 1647, A Monsieur CHANUT, 1er février 1647.
Même, à cause que notre connaissance semble se pouvoir accroître par degrés jusques à l’infini, et que, celle de Dieu étant infinie, elle est au but où vise la nôtre, si nous ne considérons rien davantage, nous pouvons venir à l’extravagance de souhaiter d’être dieux, et ainsi, par une très grande erreur, aimer seulement la divinité au lieu d’aimer Dieu.
Correspondance, année 1647, A Monsieur CHANUT, 6 juin 1647.
En premier lieu, je me souviens que le cardinal de Cusa et plusieurs autres docteurs ont supposé le monde infini, sans qu’ils aient jamais été repris de l’Église pour ce sujet ;
parce que je ne dis pas que le monde soit infini, mais indéfini seulement.
c’est pourquoi je ne dis pas absolument qu’il est infini.
Correspondance, année 1649, REPONSE DE Monsieur DESCARTES A Monsieur MORUS, 5 février 1649.
Je sais que mon intelligence est finie et que le pouvoir de Dieu est infini, ainsi je n’y pré tends pas mettre de bornes ;
Car il n’y a que Dieu seul que je conçoive positivement infini.
Correspondance, année 1649, A Monsieur CLERSELIER, 15 avril 1649. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 23 avril 1649.).
Je réponds à la seconde, qu’il me semble voir très clairement qu’il ne peut y avoir de progrès à l’infini au regard des idées qui sont en moi, à cause que je me sens fini, et qu’au lieu où j’ai écrit cela, je n’admets en moi rien de plus que ce que je connais y être ;
mais quand je n’ose par après nier le progrès à l’infini, c’est au regard des oeuvres de Dieu, lequel je sais être infini, et par conséquent que ce n’est pas à moi à prescrire aucune fin à ses ouvrages.
Et il faut remarquer que je ne me sers jamais du mot d’infini pour signifier seulement n’avoir point de fin, ce qui est négatif et à quoi j’ai appliqué le mot d’indéfini, mais pour signifier une chose réelle, qui est incomparablement plus grande que toutes celles qui ont quelque fin.
Or je dis que la notion que j’ai de l’lnfini est en moi avant celle du fini, parce que, de cela seul que je conçois l’être ou ce qui est, sans penser s’il est fini ou infini, c’est l’être infini que je conçois ;
La Vérite consiste en l’être, et la fausseté au non-être seulement, en sorte que l’idée de l’inhni, comprenant tout l’être, comprend tout ce qu’il y a de vrai dans les choses, et ne peut avoir en soi rien de faux, encore que d ailleurs on veuille supposer qu’il n’est pas vrai que cet être infini existe.« LE MONDE OU TRAITÉ DE LA LUMIERE, Chapitre III, De la dureté et la liquidité. Je ne veux point déterminer si leur nombre est infini ou non ; LE MONDE OU TRAITÉ DE LA LUMIERE, CHAPITRE VI, Description d'un nouveau monde ; et des qualités de la matière dont il est composé. Les philosophes nous disent que ces espaces sont infinis et ils doivent bien en être crus puisque ce sont eux-mêmes qui les ontfaits. Ainsi, encore que notre imagination semble se pouvoir étendre à infini et que cette nouvelle matière ne soit pas supposée êtreinfinie, nous pouvons bien toutefois supposer qu'elle remplit des espaces beaucoup plus grands que tous ceux que nous auronsimaginés. MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Première Méditation. Et pour cela il ne sera pas aussi besoin que je les examine chacune en particulier, ce qui serait d'un travail infini ; MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Méditation Troisième. De plus, celle par laquelle je conçois un Dieu souverain, éternel, infini, immuable, tout connaissant, tout-puissant, et créateuruniversel de toutes les choses qui sont hors de lui ; Et encore qu'il puisse arriver qu'une idée donne naissance à une autre idée, cela ne peut pas toutefois être à l'infini, mais il faut à lafin parvenir à une première idée, dont la cause soit comme un patron ou un original, dans lequel toute la réalité ou perfection soitcontenue formellement et, en effet, qui se rencontre seulement objectivement ou par représentation dans ces idées. Cette idée, dis-je, d'un être souverainement parfait et infini est très vraie ; Et ceci ne laisse pas d'être vrai, encore que je ne comprenne pas l'infini, et qu'il se rencontre en Dieu une infinité de choses que jene puis comprendre, ni peut-être aussi atteindre aucunement par la pensée : car il est de la nature de l'infini, que moi qui suis fini et borné ne le puisse comprendre ; En effet j'expérimente déjà que ma connaissance s'augmente et se perfectionne peu à peu, et je ne vois rien qui puisse empêcherqu'elle ne s'augmente ainsi de plus en plus jusques à l'infini ; Mais je conçois Dieu actuellement infini en un si haut degré, qu'il ne se peut rien ajouter à la souveraine perfection qu'il possède. Et il est très manifeste qu'en cela il ne peut y avoir de progrès à l'infini, vu qu'il ne s'agit pas tant ici de la cause qui m'a produitautrefois, comme de celle qui me conserve présentement. MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L'AUTEUR AUX PREMIERES OBJECTIONS. mais bien il suit seulement que mon entendement, qui est fini, ne peut comprendre l'infini. et si, voyant qu'en recherchant ainsi les pères de mes pères je ne pourrais pas continuer ce progrès à l'infini, pour mettre fin àcette recherche, je concluais qu'il y a une première cause. Il est aussi loisible à un chacun de s'interroger soi-même, savoir si en ce même sens il est par soi, et lorsqu'il ne trouve en soiaucune puissance capable de le conserver seulement un moment, il conclut avec raison qu'il est par un autre, et même par unautre qui est par soi, parce qu'étant ici question du temps présent, et non point du passé ou du futur, le progrès ne peut pas êtrecontinué à l'infini. Et il demande ici, avec beaucoup de raison, si je connais clairement et distinctement l'infini ; C'est pourquoi je dirai ici premièrement que l'infini, en tant qu'infini, n'est point à la vérité compris, mais que néanmoins il est. »
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