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Le discours de Carthage de Mendès France

Publié le 22/02/2012

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31 juillet 1954 - Le président du conseil, au cours d'un voyage surprise en Tunisie, prononce un important discours, dont voici les extraits significatifs : -Monseigneur, C'est un ami qui vient vous voir, ami de Votre Altesse et ami de votre pays. C'est aussi le chef du gouvernement de la France, de la France qui a tant fait pour la Tunisie. -Je sais, Altesse, vos soucis et votre tristesse devant la situation actuelle de votre royaume. Ces soucis, cette tristesse, sont également les miens. -J'ai donc tenu à venir vous exposer moi-même aujourd'hui, avec M. le ministre Christian Fouchet et M. le maréchal Juin, les propositions du gouvernement français à l'égard des problèmes que posent les relations entre nos pays et nos peuples. -Ces problèmes ont été compliqués beaucoup plus par la violence des attentats et par l'opposition de thèses purement doctrinales que par un antagonisme réel et profond des intérêts en présence. C'est pourquoi il nous appartient de faire un effort non seulement de conciliation, mais aussi de réalisme et de clarté. Le gouvernement français unanime y est décidé, pour sa part, tout comme le général Boyer de La Tour, qui vient d'être chargé des fonctions de résident général, et qui a toute notre confiance, comme il aura certainement la vôtre. Nous faisons donc cordialement appel à tous ceux qui entendent s'engager avec lui dans la voie du progrès et des réformes nécessaires en ce siècle. -Notre politique est une politique libérale conforme aux traditions de notre histoire aussi bien qu'aux aspirations profondes du peuple tunisien et aux promesses qui lui ont été faites. -L'autonomie interne de l'Etat tunisien est reconnue et proclamée sans arrière-pensée par le gouvernement français, qui entend tout à la fois l'affirmer dans son principe et lui permettre dans l'action la consécration du succès. Le degré d'évolution auquel est parvenu le peuple tunisien-dont nous avons lieu de nous réjouir d'autant plus que nous y avons largement contribué,-la valeur remarquable de ses élites, justifient que ce peuple soit appelé à gérer lui-même ses propres affaires. -C'est pourquoi nous sommes prêts à transférer à des personnes et à des institutions tunisiennes l'exercice interne de la souveraineté (...). Le Monde du 1er-2 août 195
discours

« Tighanimine, est assiégée.

Dix gendarmes, quatre femmes et cinq enfants vivent des heures angoissantes avant d'être délivrés.

Enplein coeur du massif, la petite ville d'Arris, cernée par des bandes rebelles, est coupée du monde. Tel est le bilan que dressent les responsables, et au premier chef le gouverneur général, Roger Léonard, aux premières heuresde la matinée, au moment où, toujours dans les Aurès, se noue un nouveau drame.

Il est 7 heures du matin lorsque, à 18kilomètres d'Arris, sur la route venant de Biskra, des hommes de Ben Boulaïd placés en embuscade arrêtent un car.

A l'intérieurdu véhicule se trouvent, mêlés aux paysans, un notable musulman, Hadj Sadok, caïd de M'Chounèche, un village voisin, et deuxinstituteurs, Guy Monnerot et sa femme, récemment arrivés de métropole et qui ont été nommés dans un douar perdu, à Tiffelfel.Soudain, une rafale de pistolet-mitrailleur : le caïd est tué, le jeune instituteur succombera à ses blessures, sa femme sera secourueau bout de plusieurs heures. Ce qui frappe immédiatement tous les esprits dans cette rébellion, c'est sa coordination et son extension à tout le territoire.

Lejour même, la radio du Caire annonce les attentats, en donne la liste précise.

La plupart des responsables, à Alger et même àParis, sont convaincus que le coup a été fomenté par l'Egypte.

Ils garderont cette conviction durant presque toute la durée de laguerre. Depuis quelques jours, les autorités s'attendaient en fait à des troubles.

Dès le 17 octobre, le commandement avait mobilisé lesquelques unités disponibles contre les bandes de " fellaghas " qui venaient de se manifester aux confins algéro-tunisiens, à l'est deSouk-Ahras.

Le 27 octobre, le gouverneur général avait remis au général Cherrière le commandement interarmées en Algériepour le maintien de l'ordre.

Dans une lettre à Jacques Chevalier, maire d'Alger et secrétaire d'Etat à la guerre, il avait confié sesinquiétudes, et demandé des renforts.

La 25 e division aéroportée avait été mise en état d'alerte, et pouvait intervenir rapidement. Pour le gouvernement de Mendès France, investi le 18 juin 1954, l'Algérie ne constitue pas une priorité.

Dien-Bien-Phu esttombé le 8 mai, et il faut sortir du guêpier indochinois.

En Tunisie, les fellaghas tiennent certaines zones, et le terrorisme sévit dansles villes.

Au Maroc, la déposition de Mohammed V l'année précédente par le gouvernement Laniel n'a pas produit-loin de là-lesrésultats escomptés.

Dans ces conditions, on comprend que l'Algérie ne vienne qu'au second plan des préoccupations officielles.Mais elle n'est pas totalement oubliée.

C'est ainsi que le ministre de l'intérieur, M.

François Mitterrand, y a effectué, du 16 au 23octobre, une longue visite.

Il a affirmé des intentions généreuses, annonçant un certain nombre de mesures sociales etadministratives destinées à faire progresser les musulmans dans la voie de l'égalité avec les Européens. Il est indéniable que l'investiture de Mendès France a suscité des espoirs au sein de la communauté arabe.

" La politique dugouvernement alors au pouvoir a-t-elle facilité ou gêné votre action ? ", a-t-on demandé par la suite à M.

Mohamed Boudiaf, l'undes " chefs historiques " de la rébellion.

" Incontestablement, elle nous a gênés, a-t-il répondu.

Beaucoup de militants nous ont faitvaloir qu'une solution pacifique était désormais possible.

Pour notre part, cela nous semblait une profonde illusion.

Mais cesentiment n'en existait pas moins.

" Pour les hommes qui ont décidé de prendre les armes, cet obstacle n'était pas, cependant, l'undes plus importants.

Ils en avaient eu bien d'autres à surmonter avant de pouvoir passer à l'action et réaliser cette " Toussaintrouge ". C'est au mois de mars 1954 que quelques militants chevronnés, anciens membres d'une organisation clandestine mise en placeen 1946 et démantelée par la police en 1950, ont décidé de se regrouper.

L'OS (Organisation secrète), où ils s'étaient connus,avait été crée sous le couvert d'un parti politique, le Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), fondé parMessali Hadj, prophète du nationalisme.

Elle avait compté jusqu'à quatre mille cinq cents membres.

Mais elle n'était jamaisvraiment passée à l'action, et son dernier président, Ahmed Ben Bella, s'était réfugié au Caire. Au début de 1954, seul le MTLD subsiste.

Mais il est divisé en deux clans, les messalistes et les centralistes, qui s'affrontentsans merci.

Les centralistes, ainsi nommés parce que majoritaires au comité central du parti, dénoncent le culte de la personnalitéqui entoure Messali, le vieux chef. C'est pour tenter de venir à bout de ces querelles, pour ressouder le parti et le lancer dans l'action, que quelques anciens del'OS ont créé le CRUA, Comité révolutionnaire d'unité et d'action.

Ces anciens sont, au départ, au nombre de cinq.

Il s'agit deMohamed Boudiaf, Mostefa Ben Boulaïd, Larbi Ben M'hidi, Rabah Bitat et Mourad Didouche. Très vite, ils rallient à leur projet la représentation du MTLD au Caire, composé d'Ahmed Ben Bella, Hocine Aït Ahmed etMohamed Khider.

Puis Krim Belkacem, qui tient le maquis en Kabylie depuis 1947, les rejoint à son tour.

Ce sont ces neufhommes qui vont prendre l'initiative de l'insurrection.

Ils échouent, en effet, dans leur tentative de réconcilier les deux clans quis'opposent au sein du MTLD.

En juillet, les messalistes tiennent un congrès à Hornu, en Belgique.

En août, les centralistesorganisent le leur à Alger.

La scission est consommée.. »

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