LE DÉNOUEMENT DU DOM JUAN de Molière

LA STATUE. — Arrêtez, Don Juan. Vous m'avez hier donné parole de venir manger avec moi. DON JUAN. — Oui. Où faut-il aller ? LA STATUE. — Donnez-moi la main. DON JUAN. — La voilà. LA STATUE. — Don Juan, l'endurcissement au péché traîne une mort funeste, et les grâces du Ciel que l'on renvoie ouvrent un chemin à sa foudre. DON JUAN. — 0 Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n'en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. Ah! (Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Don Juan ; la terre s'ouvre et l'abîme ; et il sort de grands feux de l'endroit où il est tombé.) SGANARELLE. — Ah! mes gages ! mes gages ! Voilà par sa mort un chacun satisfait : Ciel offensé, lois violées, filles séduites, familles déshonorées, parents outragés, femmes mises à mal, maris poussés à bout, tout le monde est content. Il n'y a que moi seul de malheureux. Mes gages, mes gages, mes gages ! (ACTE V, scène 6)

CARACTÉRISTIQUES DU TEXTE

• La forme Dans cette courte scène qui met en présence différents personnages, il convient de se poser trois questions : Qui parle ? avec qui ? comment ? • La fonction Il s'agit de la dernière scène de la pièce, du dénouement. • Le vocabulaire technique du théâtre 60 Exposition*, intrigue proprement dite, dénouement.

La scène finale de Dom Juan n'est pas conforme à la convention théâtrale de la comédie, puisqu'elle accepte la représentation de la mort. Le dénouement tragique de la pièce est conforme à la légende du personnage du Don Juan, mais surtout, il correspond bien aux intentions de Molière qui montre un noble dépravé aller jusqu'au bout de ses défis. La théâtralité de la scène, destinée à impressionner le spectateur, est évidente ; cette théâtralité relève d'une conception baroque du théâtre. L'intervention finale de Sganarelle est destinée à gommer en partie l'effet tragique.