la representation du monde exterieur dans fin de partie
Publié le 27/01/2011
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LA REPRÉSENTATION DU MONDE EXTÉRIEUR DANS FDP
cf aussi mon cours sur l’espace dans /de la pièce. À trois reprises CLOV regarde par la fenêtre. -didascalie d’ouverture. -après le «tour du monde «raccourci», avec la lunette (à partir de 42); -à la demande encore de Hamm et avec bien des problèmes de lunette et de fenêtres, Clov regarde encore vers le dehors (de 93 à 104). À partir de son regard et de ses rapports à Hamm, que savons-nous de l’extérieur? 1/UNE REPRÉSENTATION DÉLICATE: a)un espace insituable géographiquement:nous sommes tout de même au nord - mais de quoi, de quelle région?(50) -les quelques noms de lieux évoqués ne permettent pas d’identifier un quelconque lieu où se situerait le refuge. •tantôt ils appartiennent au passé (Sedan, lac de Côme) et ne surgissent que dans le souvenir lointain des parents et se limitent à des noms de lieux: aucune description, aucun détail pittoresque. Ham quant à lui évoque dans son roman «Kov, de l’autre côté du détroit»(70). •tantôt ils appartiennent à une histoire, comme l’Anglais de l’histoire du tailleur, histoire qui ne se veut pas authentique. -paradoxalement, en apparence, c’est le refuge, le home de Hamm, le cabanon qui est présenté comme le seul point de repère possible. Comme un centre de nulle part avec comme centre ..Hamm. -c’est vers lui que s’est tourné le mendiant de l’histoire de Hamm au terme de trois jours de «marche»: c’est vers lui que Hamm imagine que l’enfant de la fin a tourné le regard «avec des yeux de Moïse mourant»comme si la maison (ou l’arche) était la terre promise. -plus étrange encore: Hamm nous donne l’impression que ce cabanon se situe moins dans le monde qu’en dehors du monde: "regarde la terre" ordonne-t-il à Clov (41/93) comme s’il se situait sur une autre planète. Il fait aussi l’hypothèse d’un retour sur terre d’une intelligence. Partie, revenue d’où? b)les caractéristiques de cet espace ne permettent pas non plus de se le représenter: -soit que le lieu se caractérise par sa densité: -par la fenêtre droite on voit la terre; par celle de gauche, on voit l’océan, la mer (les deux ensemble, fait assez rare) et le canal. Que d’eaux en si peu d’espace ! -plus tard, Hamm suggérera que derrière la montagne, il existe peut-être d’autres formes de vie, une forme de paradis, un pays de Cocagne: «Mais derrière la montagne? Hein? Si c’était encore vert? Hein? Flore!Pomone! Céres!»(54). Mais c’est une ruse pour pousser à bout Clov. -soit que le lieu se caractérise par une privation de plus en plus marquée: -des plantes : les graines ne germent jamais(25); quand Clov s’exclame en regardant par la fenêtre, Hamm suggère qu’il a pu voir "une feuille, une fleur»"comme si c’étaient des éléments extraordinaires. Disparition -des animaux: il n’y a plus de cheval, de mouettes, seulement une puce et un rat ..;un chien... mais en peluche. Ailleurs, loin sans doute, des squales. -des cycles naturels : plus de marée, pas de soleil (46/84), pas de pluie, pas de lumière (86), plus de repères horaires. À un moment donné on apprend qu’il n’y a de lumière que d’un côté...(85) -des objets:autre cours. -des êtres : aucun coup de téléphone (!), aucune voile au loin, aucun navigateur, aucune fumée (45): le médecin et Pegg sont morts (...). Hamm dans son récit dit bien au mendiant que dehors il n’est pas question de revoir la renaissance au printemps, de pêcher des poissons (71). Bref la manne de l’Exode des hébreux ne sera pas au rendez-vous. -il y a enfin de moins en moins de chaleur (nous sommes loin d'une partie du récit de Hamm): tout le monde a froid. Paradoxalement c’est dans le souvenir du fou raconté par Hamm qu’il est question de façon précise du monde extérieur: Hamm présente comme un souvenir authentique cette visite à un fou dans un asile à qui il montrait par la fenêtre le monde :"Tout ce blé qui lève!Les voiles des sardiniers!"(61). Mais le fou, dans sa folie, sa prescience ou sa lucidité ne voit que des cendres. =>l’anecdote du fou renvoie à un monde organisé, où l’on mettait les fous à l’asile, où la vie se caractérisait par son abondance, sa beauté. «La belle époque» dit Clov..(62) - c’était avant sa naissance. 2/LES RÉACTIONS DES PERSONNAGES COMPLIQUENT ENCORE LA REPRÉSENTATION DE L’ESPACE POUR LE LECTEUR ET LE SPECTATEUR: a)les réactions sont contradictoires: •tantôt le dehors est présenté -par Hamm comme un danger mortel : «hors d’ici, c’est la mort»; Au-delà c’est l’autre enfer (39); loin de moi c’est la mort (91) -par Clov comme une ordure(96), une dégoûtation(100) -dans l’histoire de Nagg c’est un ratage fabuleux! ◊ en outre toute manifestation de vie suscite -un désir de meurtre : Clov "noie" la puce sous la poudre, le rat a été assommé et la première réaction à la découverte du «môme» a été de l’exterminer. -une réaction de rejet : quand Hamm demande à Clov de préparer un radeau avec l’espoir de rencontrer d’autres mammifères (ce qui n’est guère cohérent dans "la logique de la pièce", Clov s’exclame « Parle pas de malheur». •tantôt le dehors nourrit un désir d’ailleurs : on parle sans cesse de partir : -on vient de voir Hamm voulant dériver en fauteuil roulant sur un ..radeau...Il rêve de nature, de bois (31) -Clov avec son «je te quitte» menace sans cesse de partir sans qu’on sache si c’est pour aller dans la cuisine où il a «à faire» ou à contempler le mur ou pour sortir du cabanon; -la découverte du môme semble le déclic chez Clov qui, après toutes les palinodies de la pièce, est prêt à partir «avec panama, veston de tweed....»(108) b)deux énigmes demeurent et nous interdisent toute certitude: -Clov quitte-t-il le refuge? À vous avec plusieurs cours. Peut-il sortir ? -comment être vraiment sûr de ce qu’on nous raconte ? Le dehors n’est transmis que par l’intermédiaire de Hamm pour le passé et de Clov pour le présent: •avec la grandiloquence et la mégalomanie risible de Hamm on peut tout redouter; •avec Clov on sait qu’il est capable de mentir :39; la couleur du chien ; sa déclaration «il n’y a plus de plaid»(87) : nous savons qu'il en reste un...Clov n’est-il pas un double du peintre fou : au lieu de voir des cendres partout il invente un dehors pour Hamm. Pourquoi? Pour le rassurer, lui faire croire que tout va bien, qu’il est bien l’avant dernier homme. CL : difficile de se représenter le monde seulement accessible par les fenêtres du cabanon et par les très rares sorties de Clov (pour le jardin? Pour le sable des litières?). Difficile d’imaginer un univers dont l’évocation repose sur la foi de deux personnages aussi dissimulateurs ou sournois que Clov et Hamm. On a souvent la sensation que le monde est inaccessible, que le cabanon est sans dehors réel et que nous sommes dans la représentation d’un crâne aussi dérangé que celui du fou qui ne voyait que cendres partout... Pour nous lecteur-spectateur il y a aussi peu à voir, à deviner que sur le tableau qui est ....retourné.
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