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La Nuit de décembre

Publié le 30/11/2013

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La Nuit de décembre Alfred de Musset 1835 Lecture analytique des 6 premières strophes (voix du Poète) et des 3 dernières strophes (voix de La Vision). Introduction Présenter brièvement l'auteur. L'oeuvre : Les Nuits (Nuit de Mai : printemps de la jeunesse ; Nuit de Décembre : hiver du désespoir ; Nuit d'Août : été des passions enflammées ; Nuit d'Octobre : automne de la maturité). Dans la seconde des quatre Nuits, le poète évoque la rencontre répétée avec un double de lui-même, expérience que Musset disait avoir faite à plusieurs reprises dans sa vie. Problématique : Nous chercherons à percevoir le lyrisme particulier du poème (sa musicalité mélancolique). Plan : 1. un poème fondé sur la répétition ; 2. Mélancolie et solitude Un poème fondé sur la répétition Répétitions et variations Les strophes relativement courtes (sizains) et le mètre assez court lui aussi (l'octosyllabe) allègent le poème dont le propos est assez grave. Les procédés de répétition contribuent à la musicalité mélancolique et lancinante du poème : les strophes 1, 3, 5 font toutes rimer « vint s'asseoir » avec « vêtu de noir », et s'achèvent par un vers identique qui revient comme un refrain : « Qui me ressemblait comme un frère », de façon à mettre en évidence la similitude et la fréquence de ces insolites rencontres qui se font écho les unes aux autres. Le caractère répétitif du texte souligne par contraste les variations d'une strophe à l'autre : «un pauvre enfant » (v.5) devient « un jeune homme » (v.17) et pour finir « un étranger » (v.29), évoluant au même rythme que le poète : « écolier » (v.1), « quinze ans » (v.13), « à l'âge où l'on croit à l'amour » (v.25) dont il apparaît comme un double. Ainsi ces répétitions et variations mettent-elles en valeur la progression chronologique et autobiographique du poème. Le double Ce double, qui possède les attributs du poète (« luth » et « bouquet d'églantine » (cette fleur symbolise la poésie) ) est toujours « vêtu de noir », ne prononce aucune parole et s'exprime seulement par gestes : « Il me fit un salut d'ami » (v.22), « me montra du doigt la colline » (v.24), « D'une main il montrait les cieux / Et de l'autre il tenait un glaive »(v.32-33) ou par des sons presque inaudibles : « il ne poussa qu'un soupir » (v.35). Il apparaît de manière soudaine et inattendue (passé simple « vint s'asseoir » (v.4, 16, 28) et disparaît tantôt après un long moment d'immobilité et de silence : « Et resta jusqu'au lendemain, / Pensif, avec un doux sourire » (v.11-12), tantôt aussi soudainement qu'il était venu (verbe métaphorique « s'évanouit » et comparaison « comme un rêve » (v.36)). Bien que ne suscitant ni la peur ni le doute chez le poète, ces apparitions sont mystérieuses et étranges. Mélancolie et solitude « Mélancolie » vient du grec « melas, melanos » : noir + « kholê » : bile. Chaque fois que le double apparaît, le poète se trouve dans une situation de solitude : « solitaire » (v.3), « seul » (v.26) ou de tristesse : « Pleurant ma première misère » (v.27). (Cf. la trahison de la première femme que Musset a aimée) Comme souvent dans la poésie romantique, à l'état d'esprit intérieur du poète répond l'atmosphère extérieure : la lumière (« lueur de mon flambeau » (v.8), « Au coin de mon feu » (v.28), le décor naturel « dans un bois, sur une bruyère » (v.15) ou au contraire l'exiguïté de la « chambre » (v.26) créent une atmosphère propice à l'épanchement mélancolique. Le double partage l'état d'esprit du poète : « Son visage était triste » (v.7), « morne et soucieux » (v.31), « De ma peine il semblait souffrir » (v.34) et semble lui apporter le réconfort et la sollicitude d'un ami ou d'un « frère ». Lorsqu'à la fin du poème, le double parle enfin, il ne décline pas clairement son identité, mais se désigne de manière négative : « Je ne suis ni l'ange gardien, / Ni le mauvais destin des hommes (v.200-201), « Je ne suis ni dieu ni démon » (v.205) : accumulation de négations et antithèses. Il se désigne aussi de façon mystérieuse : « Notre père est le tien » (v.199) : emploi confus des possessifs. Tout cela crée un effet d'attente et de surprise. Son identité n'est révélée qu'au dernier vers du poème : double du poète, allégorie de la « Solitude », cette apparition accompagne le poète à chacun des moments douloureux de sa vie, mais ne peut ni le protéger ni « toucher (s)a main ». Paradoxalement, par sa présence-absence, ce double ne fait que souligner la profonde et tragique solitude du poète dans les moments de mélancolie. Conclusion Bilan. Ouverture possible sur Lorenzaccio, sur les Nocturnes de Chopin ou sur la Nuit de Mai : « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux / Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots. ».

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