La Musique De Baudelaire
Publié le 12/09/2006
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Entre le formalisme et le romantisme, Baudelaire invente une troisième voie, celle de la modernité qu'il nous fait découvrir dans son recueil Les Fleurs du mal publié pour la première fois en juin 1857. Poète symboliste du XIX° siècle, dans le poème « La musique «, extrait du recueil Les Fleurs du mal, l'auteur se compare à un bateau à travers un paysage naturel. Il nous décrit son ressentit dans un décor musical et marin, visuel mais aussi sensoriel. Que se soit la mer ou la musique, elles sont tantôt paisibles, tantôt tumultueuses donnant ainsi cour à notre voyage. Nous verrons dans un premier temps le lien entre la mer et la musique. Puis dans un second temps nous étudierons comment l'auteur nous transmet les sentiments du bateau. Tout d'abord, le lien entre la mer et la musique est prouvé par la comparaison de la phrase une avec le comparant ''comme'' du vers 1 : « La musique souvent me prend comme une mer « Ici l'auteur nous oblige à identifier la musique et la mer. Les deux mots principaux se trouvent aux extrémités de la phrase se qui les rassemblent. Ils sont reliés par l'élément comparatif ''comme'' au milieu du vers et cadrés par le point d'exclamation. Les deux mot sont au singulier: LA musique, ici l'unicité donne le genre alors qu' UNE mer c'est n'importe laquelle. La mer et la musique sont unies par leur première lettre: le ''m'' leur est commun. Cette lettre nous montre leur union car elle fait non seulement penser aux vagues de la mer mais aussi aux ondes musicales. Ayant le même initiale, elles ont la même forme. L'auteur construit son poème en alternant alexandrins et pentasyllabes créant ainsi le mouvement des vagues. Cette alternance métrique et les rimes croisées des trois premières strophes amplifient le mouvement décrit. Le rythme du vers 7 est irrégulier rappelant la force et accentuant l'amoncellement des vagues et donne un rythme musical accéléré : « J'escala/de le dos/ des flots/ amoncelés «/ 3 3 2 4 Mais la mer et la musique peuvent-être beaucoup plus paisible, c'est ce que Baudelaire nous montre avec le rythme régulier du vers 13 qui lui, donne un rythme musical doux : « Me bercent/. D'autres fois/, calme plat/, grand miroir «/ 3 3 3 3 Ces deux vers sont mis en parallèles, l'auteur fait un contraste avec leur opposition. Le vent dans la mer fait écho aux sons musicaux, d'ailleurs on retrouve le ''v'' du vent percutant les vagues à l'aide des fricatives [v] dans « souvent « (V.1), « avant « (V.5) et « vent « (V.11) et [f] dans « gonflés « (V.5). Ces fricatives vont au delà du décor visuel. Après la forme, les sons et le rythme traduisant la comparaison principale du poème, l'auteur utilise le vocabulaire. C'est ainsi qu'au vers 9, le verbe ''vibrer'' choisit par Baudelaire souligne le lien entre la mer et la musique. Ce verbe est d'ailleurs bien choisit car l'auteur l'utilise pour le décor marin alors que c'est un verbe musical. Au cour du poème, Baudelaire personnifie la musique. En effet avec « me prend « (V.1), la musique est humanisée. Dans ce premier vers elle est comparée à un élément naturel qui est la mer. Ici l'auteur joue avec le mot ''mer'' sous entendant son homonyme ''mère''. Au vers 7, le mot ''dos'' prouve la personnification de la mer. Il met aussi en relation mer et musique car ''dos'' se prononce de la même manière que la première lettre de musique ''do''. Mais l'auteur ne s'arrête pas là; en effet nous retrouvons d'autres notes de musique comme ''la'' ou encore ''mi'' dans « miroir « (V.13).De plus le verbe « bercer « au vers 13 joue un double rôle; faisant référence à la fois à une mélodie en musique mais aussi et surtout à une femme maternant. Effectivement « me bercer « au vers 13 nous renvoie l'image d'une mère berçant son enfant ce qui souligne ici la personnification de la mer mais aussi la comparaison entre le poète et le bateau . Tout au long du poème, Baudelaire se compare à un bateau souligné par l'expression du vers 4 « Je mets à la voile « qui ce dit d'un bateau qui part mais aussi par le vers 9 et 10 « Je sens vibrer (…) D'un vaisseau « ce qui montre que l'auteur ressent comme un bateau. Enfin, Charles Baudelaire sent « Le bon vent, la tempête et ses convulsions « (V.11) ce qui met un point d'honneur à cette personnification dû au ressentit de l'auteur à travers le bateau. Aux vers 4 et 7, « Je mets à la voile « et « J'escalade (…) les flots « , ''je'' c'est le bateau sauf qu'ici c'est de Baudelaire qu'il s'agit ce qui est mis en évidence par le pronom ''me'' et le mot ''vaisseau'' (V.10) . Pour finir la comparaison de l'auteur avec le bateau est finalement mis en valeur dans le vers 5 « la poitrine en avant « est assimilée à la proue du bateau et « les poumons gonflés « eux sont assimilés à la voile d'un bateau qui se gonfle au vent! Le bateau part en voyage. Dans le poème « La Musique « c'est le poète qui « mets à la voile « au vers 4 mais c'est un voyage intérieur qu'il nous propose. Effectivement il cherche à se définir, à définir sa propre vie qui sera reflétée par les mouvements de la mer décrite. Nous allons voir les deux sentiments emportant le poète. Avec en premier la souffrance et en second le désespoir de Baudelaire. Tout d'abord le poète nous transmet un sentiment appelé souffrance. En effet, nous savons qu'il s'identifie au « vaisseau « vers 10 et c'est dans ce même vers qu'il nous dit que le « vaisseau souffre «. Nous confiant ainsi son sentiment il l'accentue en faisant une allitération en [s] qu'il appuie du vers 9 au vers 12 avec « sens « et « passion « (V.9), « vaisseau « et « souffre « (V.10), « ses convulsions « (V.11) puis (V.12) « sur « et « immense « nous rappelant inévitablement l'initiale par lequel commence l'adjectif souffrance. Il va renforcer ce sentiment par la métaphore de la « tempête « vers 11 qui est une grande souffrance pour le bateau et donc pour le poète. Cette souffrance est incontournable à cause des conditions naturelles présentée par une gradation ascendante « le bon vent vent «, « la tempête « et « ses convulsions « (V.11) donnant ainsi un effet de mer déchainée. Dans ce vers, la souffrance est très présente, elle est accentuée grâce à la gradation mais aussi grâce à la diérèse que Baudelaire nous oblige à faire sur le mot ''convulsions'' qui donne une souffrance physique au bateau. Rappelant au passage les grands mouvements du corps du aux convulsions et soulignant l'identification du poète avec le bateau. D'ailleurs dans ce vers le nombre de syllabes augmente comme les convulsions. Au vers 7, Baudelaire utilise une allitération en [l] nous faisant penser à de l'eau et nous ramenant ainsi à l'élément principale du poème qui est la mer. Avec le verbe « J'escalade « au vers 7, Baudelaire réamorce une métaphore lui permettant ici de faire appelle à la montagne, que nous retrouvons aussi dans « amoncelés « (V.7). En faisant appelle à la montagne le poète cherche ici à montrer la difficulté qu'il rencontre devant l'effort qu'il doit accomplir pour surmonter cette mer déchainée, ces flots accumulés comme les montagnes. Il nous fait donc part de la difficulté qu'il rencontre pour survivre. Dans la forme de son poème, Baudelaire ne fait qu'une seule phrase du vers 2 au vers 13, cette phrase excessivement longue montre l'ampleur de sa souffrance. Le poète fait des rimes croisées se qui montre qu'il souffre énormément. En faisant un rejet avec « Me Bercent « (V.13) et passant de rimes croisées en rimes plates Baudelaire fait une cassure. Cette cassure le transporte d'un sentiment de souffrance à un sentiment de désespoir. Baudelaire ne s'arrête pas à cette cassure pour souligner son désespoir; en fait il choisit cet adjectif qualifiant son état mental et physique comme mot finissant son poème. Ainsi il donne de l'ampleur et mais un point d'honneur sur ce mot qui lui tient visiblement à cœur. Pour marquer son sentiment de désespoir, Baudelaire finit son poème par un point d'exclamation nous renvoyant ainsi à la première phrase du poème et au sujet sur lequel il repose. Il fait rimer « gouffre « (V.12) avec « souffre « (V.10) en utilisant ce paronyme il appuie son sentiment de désespoir sur sa souffrance précédente.
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