La crise de 2007 (histoire)
Publié le 11/12/2011
Extrait du document
Ces dernières semaines, les grands dirigeants de l’Union Européenne, groupés autour du couple Franco-allemand Sarkozy-Merkel, se sont efforcés de trouver des solutions pour sauver la zone euro, aujourd’hui plongée dans la tourmente de la crise économique mondiale.
Cette crise planétaire, la plus grave depuis la grande dépression de 1929, part à l’origine d’une crise relativement restreinte et qui a pu paraître d’une portée assez limitée, mais qui par un effet de dominos, et par un mécanisme de causes à effet, a emmené le monde économique et financier dans la situation particulièrement préoccupante que nous connaissons aujourd’hui.
On va voir que la crise actuelle est partie de la crise des subprimes, concernant des crédits immobiliers à risques aux Etats Unis, et qu’elle s’est propagée au travers des titres relatifs à ces crédits qui ont été mis sur le marché. Nous verrons également quelles faiblesses ont été révélées par cette crise, et la façon dont les gouvernements essayent maintenant de les régler pour rétablir la situation.
La crise des subprimes est une crise qui touche le secteur des prêts hypothécaires à risque aux États-Unis à partir de juillet 2007. Les « subprimes » sont les crédits dits « à risques » car ils ont été accordés à des ménages modestes, ne remplissant pas toutes les normes nécessaires à l’accord d’un crédit à taux préférentiel, car ils présentent un risque de non remboursement relativement fort.
Cette crise commence avec une hausse modeste du taux des impayés (remboursement d’emprunt non effectués) de 6 à 9% en l’espace de quelques semaines. Cette légère hausse peut s’expliquer assez simplement : les emprunteurs modestes s’endettent à taux révisable pour acheter un bien immobilier, avec un délai de deux ans avant le début de remboursement, en prenant un crédit adossé à une hypothèque sur le bien immobilier en question. Deux ans plus tard, au début du remboursement, les taux d’intérêts ont monté, et le ménage emprunteur est au maximum de sa capacité de remboursement, c’est-à-dire que tout son revenu disponible passe dans le remboursement de l’emprunt, et les remboursements deviennent difficiles pour ces ménages modestes, car il y a d’autres dépenses courantes indispensables dans un ménage (frais alimentaires, de transports…). Le remboursement est d’autant plus difficile que les prix sur le marché immobilier ont augmenté, et que la valeur du bien que l’emprunteur tente d’acquérir est supérieure à sa valeur d’origine, celle qu’il avait quand l’acheteur avait décidé de l’acquérir. Cette situation pousse l’emprunteur à prendre un crédit supplémentaire pour pouvoir continuer à payer son bien, mais comme le revenu disponible n’a pas changé, il finit par ne plus pouvoir rembourser ses emprunts, et est pris dans le cercle vicieux de l’endettement
Ainsi, aux États-Unis, l'endettement des ménages modestes a été poussé au maximum et grand nombre de foyers ne pouvaient plus faire face aux remboursements.
Au final tous ces crédits « à risque » (notamment à risque de liquidité) représentent un nombre non négligeable de créances : c’est ainsi qu’apparaît une crise des subprimes.
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La propagation de la crise au monde financier entier
Le problème est que du côté des banques, ces créances ont été regroupées puis « titrisées », c’est-à-dire qu’on en a fait des titres échangeables sur les marchés. La plupart du temps, ces crédits se vendent mal car ils sont trop dangereux, ils sont alors vendus couplés à d’autres titres moins risqués, sans que l’acquéreur ne sache vraiment à quel point le titre qu’il acquiert est dangereux (titres du type CDO, dérivés de crédit). Ces titres à la nature incertaine ont ainsi été vendus un peu partout, diffusant dans le système financier mondial une masse considérable de titres toxiques. Ces crédits à risques peuvent aussi être segmentés, en 3 types de titres (selon leur « dangerosité »), qui peuvent être vendus séparément : plus le titre est risqué, plus le rendement est fort, c’est pourquoi certains organismes comme les fonds spéculatifs, qui sont souvent fortement endettés, acquièrent ces titres en espérant en tirer un rendement élevé. Ces fonds profitent de l’effet de levier en empruntant encore pour pouvoir acheter encore plus de titres, espérant encore une fois obtenir ainsi plus de rendements. Cependant, quand le remboursement du crédit à risque n’est pas effectué, la valeur de la créance chute brutalement, et le fond spéculatif est en difficulté et se retrouve lui aussi dans l’incapacité de rembourser l’emprunt contracté auprès de la banque. Celle-ci est alors amenée à déprécier sa créance et à refuser de nouveaux crédits au fond spéculatif, qui ne peut plus continuer son activité et se trouve obligé de mettre la clé sous la porte. La banque peut elle aussi se trouver dans une situation délicate, et être obligée de se tourner vers d’autres banques ; cependant, ses homologues sont très méfiantes car elles connaissent le problème des subprimes, et les crédits ne sont pas facilement accordés : la banque se retrouve elle aussi piégée dans un cercle vicieux, au centre d’une crise de confiance.
La crise financière prend de l’ampleur quand en septembre 2008, plusieurs organismes financiers américains entrent en cessation de paiement (comme par exemple la célèbre banque Lehman Brothers) et sont sauvés par le FED (banque centrale américaine), mis en liquidation, ou rachetés par des concurrents. A partir de ce moment, les États-Unis étant le point central des flux financiers mondiaux, en totale connexion avec le reste du monde, la crise se propage à toute la planète, en touchant particulièrement l’Union Européenne, où certaines institutions financières se retrouvent également en grande difficulté : on a une propagation mondiale de la crise financière et de liquidités (influant également sur le prix des matières premières) au niveau global, mondial.
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Problèmes soulevés et politiques engagées.
Ainsi, cette crise a notamment révélé plusieurs faiblesses du système financier, problèmes structurels qui ont largement concouru à l’éclatement de cette crise, suite à une hausse des remboursements d’emprunt non honorés, qui aurait pu être anodine.
On peut notamment désigner un point de rupture au niveau des fonds spéculatifs, très peu réglementés, qui ont tendance à prendre des risques inconsidérés au travers de l’achat de titres extrêmement toxiques, et installent le marché tout entier sur un socle particulièrement instable par leur comportement irresponsable. Il en va de même pour les établissements et les initiateurs non réglementés qui fonctionnaient avec des capitaux trop faibles, comptant sur le financement à court terme pour financer leur activité, et qui se retrouvent actuellement démunis car ils n’ont pas pu tirer profit de leurs crédit hypothécaires. De plus, l’opacité des titres « hybrides », échangés notamment sur le marché de gré à gré, a largement contribué à la propagation des titres toxiques et au déséquilibre du marché financier, et à l’instauration d’une véritable crise de confiance.
Ces innovations financières créent des aléas moraux (les agents se comportent de manière plus risquée que si ils étaient complètement exposés au risque) qu'il faut empêcher. Il s'agit donc ici de cibler les imperfections des problèmes d'agences, qui fabriquent des asymétries d'information : les objectifs et les informations des agents sont différents et inconnus de chacun. Il faut aussi remettre en cause le rôle des agences de notation qui ont noté les paquets titrisés sans en apprécier le risque réel. Elles mesurent le risque de non remboursement des dettes et apprécient le risque de solvabilité financière d’une entreprise, d’un État, d’une collectivité ou d’une opération financière. Elles ont un fort pouvoir puisque les accords de Bâle II déterminent le capital réglementaire des banques sur leur notations. Or, il existe des conflits d’intérêts car les agences sont payées par ceux qu'elles notent. De plus, elles n'ont pas nécessairement l'expertise du risque du crédit et des liquidés traditionnellement dévolue aux banques. Les réformes tendent vers une surveillance effective des agences par les autorités européennes, ou à la création d'une agence supranationale indépendante. Le but est aussi de donner moins d'importance à ce rôle de notation par les agences, en incitant les agents à faire leurs propres analyses.
Ces réformes entrent dans le cadre d'une transformation nécessaire du système de régulation international. Pour l'instant les États ne sont que tributaires et ne sont pas sanctionnés si ils ne suivent pas les règles énoncées. Les trois secteurs banques, assurances et titres financiers ne sont pas différenciés et il faut aussi réviser le rôle et fonctionnement des grandes institutions financières (FMI, OMC) car ils ne sont plus le reflet du monde économique, notamment au regard de l'émergence de nouvelles puissances comme la Chine. Tout cela ne reflète pas la réalité des marchés et participe au flou actuel, avec trop d'institutions sans hiérarchie concrète. Le rôle de l'arbitrage réglementation-fiscalité est aussi au cœur des préoccupations, autour de la question des hedge founds et des paradis fiscaux.
C'est le but des plans de sauvetage européen et américain. La régulation microprudencielle ne suffit plus avec un système financier globalisé. Les dirigeants européens ont mis en place le Conseil Européen du Risque Systémique (CERS) ayant pour mission de surveiller, d'alerter et de recommander les pays sur les risques financiers. Des questions subsistent sur son pouvoir de contrainte ou non. Un « système européen des superviseurs financiers » à partir de trois autorités de surveillance, chargées respectivement de la surveillance des banques, des assurances et des marchés financiers et un \"règlement uniforme\" applicable à tous les établissements sont aussi mis en place, avec des pouvoirs de décision contraignants tant que cela n'empiète pas sur les compétences budgétaires des États membres. Le plan américain reprend les mêmes objectifs de régulation nationale passant par une coopération et réfomation internationale. Cependant, si il est ambitieux, peu de moyens sont mis à disposition et les problématiques autour des réformes des agences de notations ou de la structure de la rémunération de la finance ne sont que très peu abordées.
Outre la régulation, aux États-Unis, l’État a joué dès 2007 un rôle de coordinateur. Il réparti les emprunteurs selon leur capacité à rembourser puis garanti le refinancement de certains emprunts et renégocie les prêts. Il évite ainsi aux préteurs le coût élevé des saisies (25% de la valeur d'un prêt) mais n'élimine pas pour autant le risque de défaut dans le futur. De plus la portée de l'action est limitée puisqu'elle ne touche qu'une partie des emprunteurs. Le plan européen met lui en place un fond qui joue le rôle de filet de sécurité pour permettre aux États d'emprunter même en cas de très grandes difficultés. La banque centrale rachète aussi les titres de dette publique et devient préteur en dernier ressort. Avec l'augmentation de la demande, les taux d’intérêts baissent, ce qui permet aux pays de se financer sur les marchés sans passer par ce fond d'aide. Un durcissement de la discipline budgétaire est aussi mis en œuvre. Mais cette austérité budgétaire à l'échelle européenne peut faire craindre la déflation. La solidarité européenne va ici devoir extrêmement jouer en faveur d'une politique coordonnée profitant à tous les États membres qui n'ont pas nécessairement le même contexte économique, le même niveau de finances publiques.
Cette crise qui est toujours d'actualité montre les effets pervers d'un monde financier globalisé et toujours plus intégré. Malgré les obstacles et les désaccords, elle montre que les États tentent ensemble d’insuffler une nouvelle dynamique, pour mieux anticiper et réguler les risques systémiques.
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