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LA CHANSON DE ROLAND

Publié le 16/12/2018

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LA CHANSON DE ROLAND
La Chanson de Roland est la plus ancienne et la plus belle des chansons de geste ; elle paraît remonter au début du XIIe siècle, mais n’est connue que depuis 1837 par la publication du manuscrit d’Oxford écrit vers 1170.
 
DE L'HISTOIRE A LA LÉGENDE L’ORIGINE DES CHANSONS DE GESTE
 
Le sujet de la Chanson de Roland remonte à un événement historique de faible importance paré de tous les embellissements de la légende. Comment s’est fait le passage de l’histoire à la légende ? Ce problème se pose pour la plupart des chansons de geste, et en particulier à propos de la Chanson de Roland.
 
L’histoire Au printemps 778 le jeune roi Charles (36 ans, le futur
 
Charlemagne), allié de chefs arabes en lutte contre d’autres musulmans, franchit les Pyrénées, soumet Pampelune, ville chrétienne, et assiège Saragosse. Le 15 août 778, alors qu’il rentre en France, son arrière-garde est surprise dans les défilés par des montagnards basques (chrétiens), qui massacrent les soldats, pillent les bagages et se dispersent. Parmi les victimes notables se trouve Roland, « comte de la marche de Bretagne ».
 
La légende Dans la Chanson de Roland, écrite trois siècles après
 
l’événement, Roland devient le neveu du vieil empereur Charlemagne « à la barbe fleurie », qui a deux cents ans. Il est accompagné d’un personnage inventé : son ami Olivier. L’expédition est une croisade qui dure depuis sept ans. L’embuscade des montagnards devient l’attaque de 400 000 cavaliers sarrasins. Leur triomphe est dû à la trahison de Ganelon, beau-père de Roland. Charlemagne venge son neveu en écrasant les Sarrasins et en punissant Ganelon.
 
Comment expliquer cette élaboration épique ?
 
On a supposé que les chansons de geste étaient le fruit de la juxtaposition de courts poèmes appelés « Cantilènes », rassemblés et ordonnés par le poète épique qui aurait fondu en une œuvre cohérente ces fragments nés spontanément. Mais cette théorie s’appuyant seulement sur des hypothèses (on n’a conservé aucune de ces cantilènes) a été abandonnée.
 
Une théorie bien plus séduisante a été proposée par Joseph Bédier vers 1910. Ayant remarqué le rapport étroit qui paraît exister entre divers lieux cités dans les chansons de geste et les étapes des grands pèlerinages où se pressaient les fidèles du XIe siècle : de Paris à Saint-Jacques-de-Compostelle, en Espagne, par exemple, pour la Chanson de Roland, il a pensé que les pèlerins avaient joué un rôle dans la naissance des chansons de geste.
 
D’après J. Bédier, les pèlerins trouvent, sur leur route, le souvenir des héros du VIIIe au XIe siècle : sarcophages, inscriptions, vies de saints. Les moines et les clercs enjolivent ces souvenirs qui piquent la curiosité de leurs hôtes ; ils leur montrent des reliques... parfois forgées à dessein pour attirer les visiteurs. Les pèlerins diffusent la légende sur la route. Ainsi se crée au XIe siècle la matière épique dont la fermentation, un jour exploitée par un poète, donne naissance à la chanson de geste. En résumé, pour J. Bédier, « au commencement était la route », avec ses sanctuaires, où naissent les légendes exploitées au XIe et au XIIe siècle par les poètes épiques.
 
Cette théorie est cependant discutée par certains savants modernes qui pensent au contraire que ce sont les légendes qui sont nées du poème (A. Pauphilet) ou que des traditions familiales locales existaient bien antérieurement au pèlerinage qui n’a joué qu’un rôle de diffusion. Le dernier mot est donc loin d’être dit sur la Chanson de Roland.
 
L’ART DANS LA CHANSON DE ROLAND
Le poète partait d’une donnée assez banale : la trahison et la punition du traître. Mais il a su enrichir ce mélodrame et en faire un drame, non de la fatalité, mais de la volonté. Roland et ses compagnons, loin de subir leur destinée, en sont les artisans volontaires.
La composition L’Exposition nous révèle les ressorts de l’action : la
 
lassitude des Français surtout de Ganelon et la fougue de Roland. S’il désigne Ganelon, c’est pour l’honorer, mais, égaré par quelque vieille haine familiale, ce dernier défie Roland et ses pairs, sans savoir encore où le mèneront ces menaces.
 
La Trahison nous est présentée avec une fine psychologie ; Ganelon veut se venger tout en restant fidèle à Charles, mais cédant à sa passion de vengeance, il livre le secret qui perdra Roland. En le désignant pour l’arrière-garde, il montre clairement qu’il veut l’exposer.
 
Roland, acceptant de commander l’arrière-garde, ne veut ni se dérober, ni demander du renfort ; sa noblesse d’âme fait de lui le prisonnier de Ganelon.
 
A Roncevaux, Roland refuse de sonner du cor pour appeler Charlemagne, parce que, moralement, il ne peut pas demander du secours : les Français doivent se montrer dignes de l’hommage que leur a rendu Ganelon en les désignant pour la mort. C’est seulement quand le devoir est accompli que Roland sonne du cor.
 
La Vengeance de Charlemagne symbolise le triomphe du monde chrétien sur le monde païen. Après sa victoire sur les Sarrasins, Ganelon est convaincu de trahison et meurt écartelé, « comme un misérable félon ».
Les caractères Certes le vieux poète ne nous peint pas des âmes
 
complexes, mais il a su donner à chacun de ses personnages sa physionomie, son individualité.
 
Charlemagne est plein de noblesse. C’est un sage ; c’est aussi un conquérant chrétien. A l’occasion, il a des défaillances : il craint pour les siens ; il pleure ses barons.
 
Roland est avant tout un preux. Sa force est prodigieuse. Il est orgueilleux. Son principal souci est celui de l’honneur. Dans sa rudesse, il est sensible aux douceurs d’une loyale amitié. C’est aussi un chrétien qui en mourant demande à Dieu le pardon de ses fautes.
 
Ganelon lui-même, le traître, a fière allure. Mais il est plus près de l’humanité moyenne. Las de guerroyer, il s’attendrit sur son fils.
Le poème moral La Chanson de Roland est un témoignage de l’idéal
 
chevaleresque caractérisé par le sens de l’honneur féodal (toutes les actions sont subordonnées au service du suzerain), par le sens de l’honneur familial (qui rend l’homme solidaire de son lignage), par le sens de l’honneur national (qui est une des premières manifestations du patriotisme). La piété des héros est aussi éclatante que leur bravoure : Charles a un rôle presque sacerdotal. Olivier et Roland se recommandent à Dieu, vénèrent les reliques de leurs épées. Ils luttent pour élargir la Chrétienté, et Dieu intervient d’ailleurs en faveur des siens.
 
Ce qui fait la supériorité de la Chanson de Roland sur les autres Gestes, c’est l’alliance de la psychologie et de la grandeur épique. Les mœurs y sont moins barbares, l’esprit chevaleresque plus pur. C’est comme si la dégradation même de la féodalité, contre laquelle réagira l’esprit courtois, se reflétait dans les épopées postérieures.
 
PREMIÈRE PARTIE :
LA TRAHISON DE GANELON (v. 1-813)
« Le roi Charles, notre empereur, le Grand, sept ans tous pleins est resté en Espagne». Seule Saragosse lui résiste, sur sa montagne, tenue par le roi Marsile « qui n’aime pas Dieu ». Grand conseil chez Marsile : comment obtenir le départ de Vempereur? « Par la ruse », répond le subtil Blancandrin : que Marsile promette de se convertir, qu'on envoie présents et otages, et Charles repassera les monts. Et voilà Blancandrin en route avec son escorte de « barons » sarrasins. Il s'acquitte fort habilement de sa mission, offrant en otage son propre fils, pour décider Charlemagne à retourner en France.
 
L'empereur est perplexe et les avis sont partagés. Déjà se heurtent deux hommes aux tempéraments opposés : Roland et Ganelon, son beau-père. Roland se dresse et parle un fier langage : les païens félons n'ont-ils pas déjà décapité deux messagers de Charles, Basant et Basile? « Menez votre armée à Saragosse : mettez-y le siège, toute votre vie s'il le faut, et vengez ceux que le félon a fait occire. »
 
Mais Ganelon penche pour la conciliation et parle un langage assez injurieux pour son beau-fils : « Conseil d'orgueil ne doit pas l'emporter. Laissons les fous et tenons-nous aux sages ! »
 
ROLAND DÉSIGNE GANELON
Scène essentielle où se noue le drame. A l’origine, un malentendu : Ganelon, depuis longtemps en désaccord avec Roland, et irrité par la discussion, se méprend sur ses intentions. Ces deux caractères opposés se heurtent vivement et, insensiblement, Ganelon se trouve obligé d’accepter la mission dont il redoute les dangers. Le poète a su, avec un art déjà classique, engager l’action par le seul jeu des caractères.
 
« Seigneurs barons, qui pourrons-nous envoyer au Sarrasin qui tient Saragosse ? » Roland répond : « Je peux très bien y aller !» — « Vous ne le ferez certes pas, dit le comte Olivier ; votre cœur est terrible et orgueilleux : je craindrais que vous n’en veniez aux mains. Si le roi le veut, je peux bien y aller.» Le roi répond: «Taisez-vous tous les deux! ni vous ni lui n’y porterez les pieds. Par cette barbe que vous voyez blanchie, malheur à qui désignera les douze pairs ! » Les Français se taisent : les voilà immobiles.
 
XIX. Turpin de Reims s’est levé de son rang, et dit au roi : « Laissez 10 en paix vos Francs ! En ce pays vous êtes resté sept ans : ils ont eu beaucoup de peines et d’ahan L Donnez-moi, sire, le bâton et le gant2 ; j’irai, moi, vers le Sarrasin d’Espagne et je vais voir à quoi il ressemble. »

« L'ART DANS LA CHANSON DE ROLAND Le poète partait d'une donnée assez banale : la trahison et la punition du traître.

Mais il a su enrichir ce mélodrame et en faire un drame, non de la fatalité, mais de la volonté.

Roland et ses compagnons, loin de subir leur destinée , en sont les artisans volontaires.

La com position L'Exposition nous révèle les ressorts de l'action : la lassitude des Français surtout de Ganelon et la fougue de Roland.

S'il désigne Ganelon, c'est pour l'honorer, mais, égaré par quelque vieille haine familiale, ce dernier défie Roland et ses pairs, sans savoir encore où le mèneront ces menaces.

La Trahison nous est présentée avec une fine psychologie ; Ganelon veut se venger tout en restant fidèle à Charles, mais cédant à sa passion de vengeance, il livre le secret qui perdra Roland.

En le désignant pour l'arrière-garde, il montre clairement qu'il veut l'exposer.

Roland, acceptant de commander l'arrière-garde, ne veut ni se dérober, ni demander du renfort ; sa noblesse d'âme fait de lui le prisonnier de Ganelon.

A Roncevaux, Roland refuse de sonner du cor pour appeler Charlemagne, parce que, moralement, il ne peut pas demander du secours : les Français doivent se montrer dignes de l'hommage que leur a rendu Ganelon en les désignant pour la mort.

C'est seulement quand le devoir est accompli que Roland sonne du cor.

La V engeance de Charlemagne symbolise le triomphe du monde chrétien sur le monde païen.

Après sa victoire sur les Sarrasins, Ganelon est convaincu de trahison et meurt écartelé, « comme un misérable félon "· Les caractères Certes le v1eux poète ne nous peint pas des âmes complexes, mais il a su donner à chacun de ses person­ nages sa physionomie, son individualité.

Charlemagne est plein de noblesse.

C'est un sage ; c'est aussi un conquérant chrétien.

A l'occasion , il a des défaillances : il craint pour les siens ; il pleure ses barons.

Roland est avant tout un preux.

Sa force est prodigieuse.

Il est orgueilleux.

Son principal souci est celui de l'honneur.

Dans sa rudesse, il est sensible aux douceurs d'une loyale amitié.

C'est aussi un chrétien qui en mourant demande à Dieu le pardon de ses fautes.

Ganelon lui-même, le traître, a fière allure.

Mais il est plus près de l'humanité moyenne.

Las de guerroyer, il s'attendrit sur son fils.

Le poème moral La Chanson de Roland est un témoignage de l'idéal chevaleresque caractérisé par le sens de l'honneur féodal (toutes les actions sont subordonnées au service du suzerain), par le sens de l'honneur familial (qui rend l'homme solidaire de son lignage), par le sens de l'honneur national (qui est une des premières manifestations du patriotisme).

La piété des héros est aussi éclatante que leur bravoure : Charles a un rôle presque sacerdotal.

Olivier et Roland se recommandent à Dieu, vénèrent les reliques de leurs épées.

Ils luttent pour élargir la Chrétienté, et Dieu intervient d'ailleurs en faveur des siens.

Ce qui fait la supériorité de la Chanson de Roland sur les autres Gestes, c'est l'alliance de la psychologie et de la grandeur épique.

Les mœurs y sont moins barbares, l'esprit chevaleresque plus pur.

C'est comme si la dégradation même de la féodalité, contre laquelle réagira l'esprit courtois, se reflétait dans les épopées postérieures.. »

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