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La baisse du cout du travail permet elle de réduire le chômage ?

Publié le 25/02/2012

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travail

 

COÛT DU TRAVAIL ET CHÔMAGE

Introduction :

# Amorce = Le coût du travail, qui comprend le salaire net versé au salarié, les cotisations sociales versées aux

organismes de protection sociale et les coûts d’embauche et de licenciement, est considéré comme le déterminant

principal du volume de l’emploi et du chômage par les économistes libéraux. Ainsi, le taux de chômage élevé des

jeunes et des salariés peu qualifiés s’expliquerait par leur coût trop élevé au regard de leur apport à la production.

# Problématique = Peut-on expliquer la montée du chômage par des coûts salariaux réels excessifs, c’est-à-dire par

les dépenses directes et indirectes qu’occasionne l’emploi d’un salarié ? Quels sont les différents moyens pour

abaisser le coût salarial réel ? Par quels mécanismes, une baisse des coûts peut-elle créer des emplois et diminuer

le nombre de sans emploi qui en recherche un ? Ces mesures microéconomiques ont-elles un effet sur les

équilibres macroéconomiques ?

# Annonce du plan = Après avoir expliqué les arguments des économistes libéraux et vérifié leur validité, nous

montreront les limites de ce type d’analyse.

1 – LA REDUCTION DU COÛT DU TRAVAIL SEMBLE FAVORABLE A LA CREATION D’EMPLOIS

A – LES EFFETS POSITIFS D’UNE BAISSE DU COÛT DU TRAVAIL SELON LES LIBERAUX

Phrase introductive = Pour les économistes libéraux (Walras, Pareto, Pigou, Rueff…), le chômage a pour principale

raison la rigidité du marché du travail, et, en particulier, la rigidité des salaires réels. En effet, en concurrence pure et

parfaite, toute hausse du chômage devrait se traduire par une baisse du salaire réel puisque l’offre de travail devient

supérieure à la demande de travail. Cette baisse du coût du travail devrait avoir de nombreux effets positifs :

# Les entrepreneurs seront incités à embaucher davantage. En effet, le coût marginal du travail, celui du dernier

travailleur embauché, deviendra inférieur à sa productivité marginale. En d’autres termes, embaucher deviendra

profitable puisque le travailleur rapportera plus à l’entreprise que ce qu’il coûte. L’entreprise préférera donc employer

un salarié supplémentaire plutôt que de substituer le capital au travail (Doc 1).

# La baisse du coût salarial devrait rendre les entreprises plus compétitives. La baisse du coût du travail réduit les

coûts de production et, dans un marché concurrentiel, les prix de vente. Les entreprises vont donc augmenter leur

compétitivité-prix sur les marchés internes et externes. Elles vont augmenter leurs parts de marché et produire

davantage pour répondre à la hausse de la demande. A productivité constante, cette hausse de la production se

traduira par des embauches et une diminution du chômage (Doc 5).

# La baisse du coût du travail augmente le profit des entreprises. En effet, si le coût du travail diminue alors que la

productivité des travailleurs continue d’augmenter, le coût salarial unitaire diminue. Le partage de la valeur ajoutée

devient favorable aux profits. Or, selon le théorème du chancelier Helmut Schmidt, « les profits d’aujourd’hui sont les

investissements de demain et les emplois d’après-demain ».

# Enfin, la baisse du salaire réel devrait inciter un certain nombre de salarié de se retirer du marché du travail. Si le

revenu que rapporte le travail devient inférieur à la valeur que le salarié attribue à son temps libre, il devient inutile

de rechercher un emploi. Les chômeurs découragés contribuent à la diminution statistique du chômage.

Phrase de transition = Un coût du travail élevé joue donc contre l’emploi. Ainsi, la différence entre le volume

d’emploi dans les services aux Etats-Unis et celui existant en France, s’expliquerait en partie par des coûts salariaux

français trop élevé décourageant l’emploi dans ce secteur (Doc 1). En concurrence imparfaite, l’Etat doit intervenir pour

diminuer le coût du travail. Comment peut-il le faire ? Avec quels effets ?

B – INCITENT L’ETAT A MENER UNE POLITIQUE DE REDUCTION DU COÛT DU TRAVAIL

Phrase introductive = Dès les années 1980, les différents gouvernements français ont utilisé l’armé de la réduction

du coût du travail pour combattre le chômage (Doc 5). Comment ont-ils procédé ?

# En diminuant les cotisations sociales : il s’agit d’inciter les entrepreneurs à embaucher certains types de chômeurs

en leur proposant en contrepartie un allègement des charges. Les jeunes, les travailleurs peu qualifiés, les habitants

des zones sensibles…sont souvent les cibles de ce type de politique (Doc 1, 2 et 5).

# En proposant des contrats aidés : il s’agit d’emplois à court terme subventionnés par l’Etat qui doivent permettre aux

chômeurs d’acquérir une qualification ou une expérience professionnelle pour trouver ensuite un « vrai » emploi. Le

contrat de réinsertion, de qualification, de retour à l’emploi, les contrats jeunes…font partie de ce traitement social

du chômage.

# En proposant des stages rémunérés en dessous du salaire minimum : le salaire minimum étant trop élevé pour des

jeunes non qualifiés ou inexpérimentés, on va pouvoir leur proposer des contrats d’apprentissage ou des stages

avec une rémunération inférieure au salaire minimum afin de les insérer dans l’emploi.

# En désindexant les salaires des fonctionnaires : les salaires de ces derniers vont augmenter en fonction de l’inflation

prévue et non de l’inflation passée ce qui va entraîner une perte de leur pouvoir d’achat (le salaire réel). Cet

exemple dans la fonction publique devrait inciter les entreprises privées à pratiquer la même politique. La montée du

chômage devrait mettre les entreprises dans un rapport de force favorable pour imposer la désindexation des

salaires sur les gains de productivité et l’individualisation du salaire ce qui entraînera une baisse du coût unitaire.

# En déréglementant le marché du travail : il s’agit de diminuer les coûts d’embauche et de licenciement en diminuant

la réglementation (la rupture à l’amiable créée en 2008) et en augmentant les emplois précaires afin de limiter le

pouvoir de négociation des syndicats et les hausses de salaires.

Phrase de transition = Ces politiques de réduction des coûts du travail, menées dans la plupart des pays de l’Ocde,

ont-t-elles eu un impact positif sur l’emploi et le chômage ? 2 – MAIS ELLE A DES EFFETS LIMITES ET BUTE SUR DES EFFETS PERVERS

A – DES EFFETS LIMITES

Phrase introductive = L’exemple du Japon semble donner raison à la thèse libérale. Dans ce pays, le coût salarial

dans l’industrie a diminué de 20% entre 2000 et 2006 alors que la productivité a augmenté de 14% dans le même temps.

Cette baisse du coût unitaire de 30% a donné au Japon une forte compétitivité-prix qui lui a permis de diminuer son taux

de chômage de 4,7 à 4,1% (Doc 4). Observe-t-on les mêmes résultats dans les autres pays ?

# En France, la création nette d’emploi attribuable à la réduction du coût du travail est limitée. Entre 70 000 et 170 000

emplois créés ce qui réduit le chômage mais ce qui est peu au regard des deux millions de chômeurs au moins ou

des effets induits par la réduction du temps de travail (350 000 emplois créés par les 35 heures) (Doc 2). Le

chômage des personnes ciblées par ces réductions a même augmenté depuis 1990 (Doc 5).

# La création d’emplois a profité surtout aux emplois peu qualifiés dans les services. Entre 1984 et 2004, l’emploi peu

qualifié a progressé de 55% en France ce qui a certes réduit ce type de chômeurs mais ce qui ne favorise pas à

long terme la compétitivité du pays qui est, de plus en plus, une compétitivité hors-prix reposant sur des innovations

et du travail qualifié (Doc 2, 6). Il n’est pas bon de conserver des productions qui peuvent être réalisées moins

chères à l’étranger comme la montré les économistes classiques Adam Smith et David Ricard.

# Ces mesures de réduction des charges profitent davantage aux secteurs abrités qu’aux secteurs exposés. Ce sont

les grandes surfaces qui ont embauché ces travailleurs peu qualifiés et non les industries. Cela n’a donc pas pu

endiguer le phénomène des délocalisations (Doc 5).

# Enfin, il n’y a pas de corrélation évidente entre la faiblesse des coûts salariaux et le taux de chômage. Un salarié

tchèque coûte nominalement deux fois moins cher qu’un salarié britannique. Mais, son niveau de productivité étant

deux fois plus faible, il coûte réellement (coût unitaire) la même chose et le taux de chômage au Royaume-Uni est

inférieur à celui de la Tchéquie en 2006 (Doc 4).

Phrase de transition = La volonté de réduire les coûts du travail, outre qu’elle coûte cher au budget de l’Etat, ne

présente-t-elle pas des risques ?

B – DES EFFETS PERVERS

Phrase introductive = La politique de réduction du coût salarial et de ralentissement du pouvoir d’achat des salaires,

présente un certain nombre d’effets pervers :

# Le ralentissement du pouvoir d’achat va peser sur l’emploi et le chômage. En effet, les entrepreneurs ne vont pas

augmenter les bas salaires de peur de perdre leur allègement de charge. On tombe dans la trappe à bas salaire qui

pèse sur le pouvoir d’achat et ralentit la consommation. Les entreprises vont donc réduire leur niveau de production

et de l’emploi au niveau de la demande anticipée ce qui va favoriser le chômage conjoncturel (Doc 2 et 6).

# La baisse des cotisations va avoir plusieurs effets pervers. Un effet de substitution : les entreprises vont embaucher

les salariés qui bénéficient des réductions de charges au détriment des autres demandeurs d’emploi. L’ordre de la

file d’attente des chômeurs est modifié sans réduction du chômage. Un effet d’aubaine : les entreprises profitent des

réductions de charge alors qu’elles avaient, de toute façon, l’intention d’embaucher. Dans ce cas, la réduction du

coût du travail n’a créé aucun emploi supplémentaire (Doc 6).

# Le travail précaire et les contrats aidés favorisent un chômage répétitif et un chômage d’exclusion. Les salariés

précaires alternent les « petits boulots » ce qui va les disqualifier auprès des entrepreneurs parce qu’ils n’ont pas

réussi à décrocher un CDI. Il y a le risque d’un effet de confinement. A cela s’ajoute un effet d’appel : ces emplois

aidés font sortir de l’inactivité (étudiants, femme au foyer) des personnes qui vont postuler pour ces nouveaux

emplois et augmenter le nombre de chômeurs.

# Une baisse du salaire réel peut entraîner une démotivation des travailleurs. Les néo-keynésiens ont observé qu’une

forte hausse de salaire pouvait motiver les travailleurs à être plus efficace (« salaire d’efficience »), ce qui accroît

leur productivité et diminue les coûts du travail (Doc 2 et 6).

# Enfin, ces mesures présentent un coût élevé pour le budget de l’Etat. Le déficit budgétaire et l’endettement, qui en

résulte, peuvent peser sur la croissance future (effet d’éviction). Cet argent public aurait pu être mieux utilisé pour

des politiques actives d’emploi : formation, incitation à la reprise d’un emploi… (Doc 2 et 6)

Conclusion :

Rappel de la démonstration = la réduction du coût du travail, ciblée sur un certain nombre de chômeurs, peut avoir

quelques résultats positifs mais elle ne doit pas faire oublier ses effets pervers et le fait que la création d’emplois repose

principalement sur la croissance de la demande anticipée par les entrepreneurs.

Ouverture = N’est-il pas préférable d’augmenter la productivité (politique d’innovation, de formation) pour faire

diminuer les coûts unitaires plutôt que de peser, d’une façon ou d’une autre, sur les salaires réels ? La crise actuelle

montre que l’insuffisance de la demande peut conduire les entreprises à se séparer tour à tour d’une partie de leurs

salariés ce qui accroît le ralentissement de la demande et de la dépression. D’où la mise en place des plans de relance

massifs dans la plupart des pays du monde.

 

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