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Kipling, le Livre de la jungle (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Kipling, le Livre de la jungle (extrait). L'adoption du jeune Mowgli par le Clan des Loups, dit le Peuple Libre, doit se dérouler selon les canons de la Loi de la jungle. Ceux-ci se révèlent en fait très conformes à certaines valeurs morales de l'Empire britannique, dont Kipling se trouve être l'un des représentants : protection et respect de l'enfance, juridiction dûment établie, observance des formes, ordre de préséance pour la prise de parole. L'ironie cependant affleure, et la critique -- délibérée ou non -- du colonialisme repose sur un simple renversement de la situation première : ici, en effet, le bon sauvage à adopter, à éduquer, c'est l'homme. Et l'on hésite un peu. Il faut peser. L'on pèse. Les dialogues et leur ordonnancement adressent au lecteur un miroir. Le Livre de la jungle de Rudyard Kipling (chapitre « les Frères de Mowgli «) La Loi de la Jungle établit très clairement que chaque loup peut, lorsqu'il se marie, se retirer du Clan auquel il appartient ; mais, aussitôt ses petits assez âgés pour se tenir sur leurs pattes, il doit les amener au Conseil du Clan, qui se réunit généralement une fois par mois à la pleine lune, afin que les autres loups puissent reconnaître leur identité. Après cet examen, les petits sont libres de courir où il leur plaît, et, jusqu'à ce qu'ils aient tué leur premier daim, il n'est pas d'excuse valable pour le loup adulte et du même Clan qui tuerait l'un d'eux. Comme châtiment, c'est la mort pour le meurtrier où qu'on le trouve, et, si vous réfléchissez une minute, vous verrez qu'il en doit être ainsi. Père Loup attendit jusqu'à ce que ses petits pussent un peu courir, et alors, la nuit de l'assemblée, il les emmena avec Mowgli et Mère Louve au Rocher du Conseil -- un sommet de colline couvert de pierres et de galets, où pouvaient s'isoler une centaine de loups. Akela, le grand loup gris solitaire, que sa vigueur et sa finesse avaient mis à la tête du Clan, était étendu de toute sa longueur sur sa pierre ; un peu plus bas que lui se tenaient assis plus de quarante loups de toutes tailles et de toutes robes, depuis les vétérans, couleur de blaireau, qui pouvaient, à eux seuls, se tirer d'affaire avec un daim, jusqu'aux jeunes loups noirs de trois ans, qui s'en croyaient capables. Le Solitaire était à leur tête depuis un an maintenant. Au temps de sa jeunesse, il était tombé deux fois dans un piège à loups, et une autre fois on l'avait assommé et laissé pour mort ; aussi connaissait-il les us et coutumes des hommes. On causait fort peu sur la roche. Les petits se culbutaient l'un l'autre au centre du cercle où siégeaient leurs mères et leurs pères, et, de temps en temps, un loup plus âgé se dirigeait tranquillement vers un petit, le regardait avec attention, et regagnait sa place à pas silencieux. Parfois une mère poussait son petit en plein clair de lune pour être sûre qu'il n'avait point passé inaperçu. Akela, de son côté, criait : -- Vous connaissez la Loi, vous connaissez la Loi. Regardez bien, ô loups ! Et les mères reprenaient le cri : -- Regardez, regardez bien, ô loups ! À la fin (et Mère Louve sentit se hérisser les poils de son cou lorsque arriva ce moment), Père Loup poussa « Mowgli la Grenouille «, comme ils l'appelaient, au milieu du cercle, où il resta par terre à rire et à jouer avec les cailloux qui scintillaient dans le clair de lune. Akela ne leva pas sa tête d'entre ses pattes mais continua le cri monotone : -- Regardez bien !... Un rugissement sourd partit de derrière les rochers -- c'était la voix de Shere Khan : -- Le petit est mien. Donnez-le-moi. Le Peuple Libre, qu'a-t-il à faire d'un petit d'homme ? Akela ne remua même pas les oreilles ; il dit simplement : -- Regardez bien, ô loups ! Le Peuple Libre, qu'a-t-il à faire des ordres de quiconque, hormis de ceux du Peuple Libre ?... Regardez bien ! Il y eut un choeur de sourds grognements, et un jeune loup de quatre ans, tourné vers Akela, répéta la question de Shere Khan : -- Le Peuple Libre, qu'a-t-il à faire d'un petit d'homme ? Or, la Loi de la Jungle, en cas de dispute sur les droits d'un petit à l'acceptation du Clan, exige que deux membres au moins du Clan, qui ne soient ni son père ni sa mère, prennent la parole en sa faveur. -- Qui parle pour celui-ci ? dit Akela. Du Peuple Libre, qui parle ? Il n'y eut pas de réponse, et Mère Louve s'apprêtait pour ce qui serait son dernier combat, elle le savait bien, s'il fallait en venir à combattre. Alors, le seul étranger qui soit admis au Conseil du Clan -- Baloo, l'ours brun endormi, qui enseigne aux petits la Loi de la Jungle, le vieux Baloo, qui peut aller et venir partout où il lui plaît, parce qu'il mange uniquement des noix, des racines et du miel -- se leva sur son séant et grogna. -- Le Petit d'Homme... le Petit d'Homme ?... dit-il. C'est moi qui parle pour le Petit d'Homme. Il n'y a pas de mal dans un petit d'homme. Je n'ai pas le don de la parole, mais je dis la vérité. Laissez-le courir avec le Clan, et qu'on l'enrôle parmi les autres. C'est moi-même qui lui donnerai des leçons. Source : Kipling (Rudyard), le Livre de la jungle, trad. par Louis Fabulet et Robert d'Humières, Paris, Gallimard, Folio, 1972. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.
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« Source : Kipling (Rudyard), le Livre de la jungle, trad.

par Louis Fabulet et Robert d’Humières, Paris, Gallimard, Folio, 1972. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation.

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