journal - littérature.
Publié le 28/04/2013
Extrait du document
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En Europe, un des journaux intimes les plus célèbres est celui de Samuel Pepys (1660-1669), dans lequel l’écrivain non seulement s’observe et se dépeint lui-même avec une lucidité dépourvue de complaisance et de retenue notant ses pensées et ses
activités quotidiennes, évoquant son goût pour la musique et le théâtre, son bonheur familial et ses amours passagères, mais aussi décrit les événements dont il est le témoin, en particulier la peste de 1665 et le grand incendie de Londres de 1666, ce
qui fait de son journal un témoignage précieux aussi pour des historiens.
Son journal, écrit dans un langage chiffré, n’a été décrypté que deux siècles plus tard (1970-1983).
John Evelyn, contemporain de Samuel Pepys, tient pour sa part, presque
toute sa vie durant, un Kalendarium, publié pour la première fois en 1818.
En France, Montaigne écrit son Journal de voyage en Italie (1774) , rédigé en 1580-1581, mais c’est surtout les romantiques qui, au siècle suivant, exploitent les potentialités littéraires du journal, notamment Alfred de Vigny ( Journal d'un poète , 1867)
et Benjamin Constant ( Journaux intimes, qui ne seront publiés intégralement qu’en 1952).
Stendhal commence quant à lui à rédiger son Journal (posthume, 1888-1935) dès 1801, alors qu’il n’est encore que le jeune Henri Beyle, et le poursuit
jusqu’en 1819.
Le Journal des frères Goncourt appartient au type des journaux littéraires, comme l’indique son sous-titre, « Mémoires de la vie littéraire ». Il présente la particularité d’avoir été écrit par les deux frères depuis 1851 jusqu’à la mort du
dernier d’entre eux, Edmond, en 1896.
3. 2 Développement et démocratisation
Au XIXe siècle, la pratique de l’écriture du journal se développe et se démocratise.
Le journal intime est commandé par l’institution, l’école, les institutrices ou les mères, indique Philippe Lejeune, spécialiste de l’écriture autobiographique et du journal
intime, qui a publié un certain nombre d’essais et d’anthologies sur le sujet, dont Un journal à soi (1997) et le Journal intime : histoire et anthologie (2006), en collaboration avec Catherine Bogaert, les Brouillons de soi (1998) et « Cher écran… » :
journal personnel, ordinateur, Internet (2000).
Il a notamment enquêté sur les journaux de jeunes filles françaises du XIXe siècle et publié le Moi des demoiselles (1993).
Placées en état d’infériorité sociale, elles y exprimaient leur rébellion comme les
adolescents d’aujourd’hui qui à travers journaux, carnets ou blogs expriment leur révolte, leurs passions, etc.
Chez André Gide, l’écriture de son Journal (publié de 1943 à 1953) est inséparable de sa création littéraire, comme en témoigne le roman les Faux-monnayeurs (1926) et le Journal des Faux-monnayeurs écrits simultanément .
Dans les Faux-
monnayeurs , des fragments du journal d’Édouard, un des personnages, alternent par ailleurs avec la narration romanesque.
De nombreux autres écrivains, notamment Paul Léautaud, qui publie un Journal littéraire (22 volumes, à partir de 1956),
Léon Bloy, Julien Green, Colette, Henry de Montherlant, Franz Kafka, Witold Gombrowicz et Léon Tolstoï, tiennent également des journaux intimes.
Parfois certaines périodes sont particulièrement propices à ce genre d’écriture, comme les Première et
Seconde Guerres mondiales, pendant lesquelles écrivains (Romain Rolland ou Jacques Rivière), soldats, prisonniers ou anonymes (Anne Frank) tiennent des journaux.
Parmi les journaux publiés dans la deuxième moitié du XXe siècle on peut citer l’Herbe bleue (1971), journal intime d’une jeune droguée, restée anonyme ; l’œuvre s’est révélée ensuite une fiction, attribuée à l’éditrice Béatrice Sparks, Cytomégalovirus
(1992) d’Hervé Guibert , journal d’hospitalisation paru après sa mort qui témoigne du fléau du sida ou les journaux d’Henry Bauchau écrits en même temps que ses romans : Œdipe sur la route (1990) et Jour après jour : journal d’Œdipe sur la route
1983-1989 (1992), Antigone (1997) et le Journal d'Antigone 1989-1997 (1999).
3. 3 Le blog : un journal intime sur Internet
Depuis la fin des années 1990, le journal intime a trouvé un nouveau support avec Internet.
Si l’on considère les textes qu’ils contiennent et si l’on se limite aux blogs dans lesquels l’auteur se prend lui-même comme sujet d’étude, on note de
nombreux points communs entre blogs et journaux intimes : écriture au jour le jour, caractère fragmentaire, inscription de la date, etc.
Mais il existe aussi des différences qui tiennent au support, numérique et en ligne pour le blog, ainsi qu’à la notion
de publication.
Le blog est « publié » au rythme de l’écriture.
Il ressort souvent davantage d’une chronique personnelle que du journal intime.
Une autre particularité a trait à l’interactivité : chaque page du blog est susceptible d’être commentée et les
commentaires sont immédiatement « publiés ».
Le lecteur devient « auteur » à son tour et intervient dans le récit, qui peut prendre parfois la voie d’une correspondance.
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