JEAN DE LA FONTAINE - SON OEUVRE: LE LOUP ET L'AGNEAU et LA CIGALE ET LA FOURMI
Publié le 19/09/2010
Extrait du document
Né à Château-Thierry, dans la campagne picarde, le 8 juillet 1621, Jean de La Fontaine grandit en se passionnant pour la lecture d’œuvres antiques.
Après le collège, il passe 18 mois comme novice ( religieux au couvent ) à l'Oratoire à partir de 1641. Cependant, ne se passionnant pas pour les études religieuses, il préfère aller étudier le droit à Paris et obtiendra son diplôme d’avocat en 1649. Parallèlement à ses études, il fréquente un salon de jeunes passionnés de littérature, les "chevaliers de la table ronde" et compose ses premiers vers.
En 1653, sa femme Marie Héricart, qu’il avait épousée en 1647, lui donne un fils, Charles.
En 1654, La Fontaine publie sa première comédie : l’Eunuque, adaptée du poète Térence.
La mort de son père, en 1658, le laisse dans une situation financière inconfortable qui le conduit à chercher un protecteur. Il le trouve alors : Nicolas Fouquet, Ministre des Finances de Louis XIV, pour qui il compose plusieurs œuvres dont le poème héroïque Adonis en 1658. Le poète fréquente alors les sociétés précieuses et rencontre d’autres grands artistes dont Charles Perrault et Molière.
Lorsque Fouquet tombe en disgrâce en 1661, La Fontaine lui reste fidèle et prend sa défense dans l’Elégie aux nymphes de Vaux en 1662 et l’Ode au roi l’année suivante. Suite à ces publications, le poète préfère s’exiler quelques temps à Limoges.
A son retour à Château-Thierry quelques mois plus tard, La Fontaine courtise la duchesse de Bouillon et la persuade de devenir sa nouvelle protectrice. Elle lui permet en 1664 d’obtenir à Paris, le poste de gentilhomme servant chez sa nouvelle bienfaitrice, la duchesse d’Orléans. Il connaît alors le succès dans les salons et publie de nombreuses œuvres, dont les trois recueils de Contes et Nouvelles en Vers publiés en 1665, 1666 et 1671.
En 1668, La Fontaine publie son premier recueil de Fables qui connaît un immense succès. Il rassemble 124 fables dédiées au dauphin. Le poète y met en scène des animaux pour critiquer les hommes et dénoncer les grands problèmes de son époque.
Après la mort de la duchesse en 1772, La Fontaine se place sous la protection de Madame de La Sablière. Il publie alors des œuvres variées, notamment un recueil de contes licencieux qui sera interdit (les Nouveaux Contes, 1674) et des poèmes religieux (Daphné, 1674).
A la fin de sa vie, La Fontaine est contraint par son confesseur à renier ses écrits licencieux. Le poète décède le 13 avril 1695, dans la maison des Hervart, une famille de banquier qui l’avait pris sous sa protection en 1693, à la mort de Madame de la Sablière.
Les peintres :
Gustave Doré est un illustrateur et peintre français, né à Strasbourg le 6 janvier 1832, et mort le 23 janvier 1883 à Paris. Il fut reconnu internationalement de son vivant.
Jean-Baptiste Oudry, né à Paris le 17 mars 1686 et mort à Beauvais le 30 avril 1755, etait un peintre et graveur français. Il a laissé un grand nombre de dessins. Les plus connus sont les Fables, gravées par Charles Nicolas Cochin.
Christian Richet, né en 1959, a reproduit beaucoup de Fables de la Fontaine. Ce dessinateur est peu connu.
Jean Ignace Isidore Gérard ( 13 septembre 1803 – 17 mars 1847), est un caricaturiste français, plus connu sous le pseudonyme de JJ Grandville. Il a illustré beaucoup d'ouvrage poétique dont les Fables.
JEAN DE LA FONTAINE.
GENERALITES.
Ses Fables constituent la principale œuvre poétique du classicisme, et l'un des plus grands chefs d'œuvre de la littérature française. Le tour de force de La Fontaine est de donner par son travail une haute valeur à un genre qui jusque là n'avait aucune dignité littéraire et était réservé aux exercices scolaires de rhétorique et de latin.
Les Fables ont été écrites entre 1668 et 1694. Il s'agit comme son nom l'indique d'un recueil de fables écrites en vers, la plupart mettant en scène des animaux anthropomorphes et contenant une morale au début ou à la fin. Ces fables furent écrites dans un but éducatif et étaient adressées au Dauphin.
Certaines fois les vers ou morales de l'auteur sont devenus cultes et transformés en proverbes.
La Fontaine reprend les fables et les écrits de fabulistes antiques, comme c'est le cas avec Ésope et Phèdre. Il se soucie bien peu d'inventer de nouveaux discours. Sainte-Beuve dira que «son originalité est dans la manière, non dans la matière«. La Bruyère ira même plus loin en disant du poète qu'il «a été au-delà de ses modèles« et qu'il devient ainsi «modèle lui-même difficile à imiter«. La fable de La Fontaine intéresse non pas seulement par ce qu'elle présente, mais aussi par la façon dont elle le présente. Ses fables ne sont d'ailleurs empreintes d'aucun style particulier: il laisse parler chacun des personnages selon son caractère et sa condition. D'ailleurs, La Fontaine représente une pléthore de classes sociales et de conditions dans ses fables, tant par les animaux (le lion, le renard, etc.), en leur donnant des titres (roi, courtisan, etc.), que par des hommes (le paysan, le meunier, le savetier, etc.). S'il sait passer, au plan social, du berger au prince, il sait aussi passer des Amériques aux Indes dans le plan spatial. Au plan temporel même, il sait se promener, passant de scènes antiques à des scènes modernes. Le fait de puiser dans le fond mythique et antique permettait à La Fontaine d'éviter la censure qui sévissait à l'époque.Au contraire d'Ésope, par exemple, dont les fables n'étaient composées que pour la morale et que le récit était relégué au second plan en importance, La Fontaine ne prétend pas éduquer ses lecteurs. Il ne dogmatise pas la fable. Il ne prétend pas non plus se soustraire à la forme habituelle de celle-ci. Il faut plutôt entrevoir la fable, chez lui, comme la représentation du corps (le récit) et de l'âme (la morale). Bien souvent, La Fontaine laisse ses fables ouvertes. C'est-à-dire qu'il ne tire pas de morale du récit, bien que celle-ci soit implicite au texte. C'est le cas, entre autres, de «La cigale et la fourmi«. De cette manière, La Fontaine explore et transforme la fable antique, signe de son appropriation du genre. Il déséquilibre la dichotomie classique de la fable et de son époque (plaire/instruire): il éduque, certes, mais divertit aussi. Ce divertissement semble, la plupart du temps, plus important que tout le reste.
LA CIGALE ET LA FOURMI.
INTERPRÉTATION.
L'interprétation de cette fable nous informe que la fourmi triomphe sur la cigale. C'est la chute de la cigale, sa perte. Or, La Fontaine n'en a pas tiré la leçon pour le lecteur contrairement à ses autres fables.
D'un côté, nous pouvons voir deux mondes s'affrontant: le monde réaliste de la fourmi et le monde lyrique, artistique de la cigale.
La première vit dans la rigidité, dans le sérieux de la vie, dans la prévision et dans l'espoir d'un futur meilleur.
La seconde vit dans le monde de la célébration, du lyrisme, de l'art. [ Il faut se souvenir qu'à l'époque classique, chanter était synonyme d'oisiveté. ]
L'opposition entre la fourmi et la cigale révèle alors bien les mœurs et pensées de l'époque de La Fontaine. C'est donc une allégorie du travail et de la paresse.
Pour la cigale, l'art et la vie sont la même chose, mais cette vision du monde, cette osmose n'est possible que si l'été dure toute l'année. Or, il n'en est pas ainsi. Il y a une réalité dans cette fable à laquelle on ne peut échapper: celle du temps. La cigale n'entrevoit pas le futur comme le fait la fourmi. Elle n'accorde aucune importance au temps, elle ne fait que célébrer le moment. Lorsqu'elle se confesse à la fourmi d'avoir chanté tout l'été, elle est nostalgique de ce moment révolu et, ironiquement, la fourmi la renvoie à ce passé mythique, à cette illusion qu'est l'éternité de l'été, ce paradis perdu. L'envoyer danser est une façon polie de lui signaler qu'elle n'avait qu'à veiller à son affaire.
La fourmi, vivant dans le présent en vue d'un futur vit donc dans l'austérité, la préparation et la privation du plaisir que la cigale se permet continuellement. Sa réponse est cruelle, certes, mais elle est aussi triomphante, méprisante, vaniteuse, voire même jalouse et pleine de vengeance parce qu'elle ne peut profiter du plaisir.
S'il y a absence de moralité, c'est parce qu'il faut y voir un lien avec l'auteur. La Fontaine ne peut condamner la cigale pour avoir méprisé le temps afin de se consacrer au lyrisme et à l'art, puisqu'il est lui-même artiste. Condamner la cigale aurait été se condamner lui-même.
LE LOUP ET L'AGNEAU.
INTERPRÉTATION.
En moins de trente vers et sans un détail inutile, La Fontaine fait, dans le Loup et l'Agneau le récit d'une rencontre - dont l'issue ne laisse aucun doute - entre un loup affamé et un agneau naïf. Mais ce récit prend une portée universelle, exemplaire : au delà de la violence des rapports de force dans le monde , La Fontaine décrit ici le comportement odieux de celui qui, non content d'exercer sa violence sur plus faible que lui, prétend la justifier par des arguments spécieux, inverse les rôles et se prétend victime pour pouvoir être bourreau.Chaque personnage développe ici à sa façon son argumentation : avec mauvaise foi pour le Loup et avec une vraie candeur pour l'Agneau. En confiant à des animaux la mission de représenter la violence odieuse, La Fontaine donne à sa fable toute sa portée et nous permet de transposer sa leçon dans le monde humain.
En plaçant la morale de la fable en tête de son récit, La Fontaine supprime tout suspense quant à l'issue de l'affrontement entre le Loup et l'Agneau. Tout est joué d'avance dans ce "procès" truqué.On ne comprend pas pourquoi le Loup cherche tout au long de son argumentation à justifier l'exécution de sa proie, en déguisant son véritable motif, à savoir "la faim", et en se posant en victime qui exige réparation de son offenseur. Il y a ici un renversement de situation assez stupéfiant et pour lequel le Loup déploie des trésors de rhétorique et de mauvaise foi, brutalement, sans la moindre mise en garde.
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