Jacques RUFFIE (1921-) Sexualité et diversité génétique
Publié le 19/10/2016
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Jacques RUFFIE (1921-)
Sexualité et diversité génétique
Une meilleure connaissance du mécanisme de la sexualité au niveau chromosomique a mis fin à la vision typologique du monde qui a longtemps prévalu, et lui a substitué une conception populationnelle. Jusque-là, on croyait que tout être vivant entrait dans une catégorie unique et ressemblait à tous ceux qui faisaient partie de la même catégorie (les moutons d'un troupeau par exemple, ou les moutons de plusieurs troupeaux appartenant à la même race). Cette notion, sur laquelle est fondée la classification traditionnelle (établie de façon précise pour la première fois par Linné au XVIIIe siècle), aboutit à créer un certain nombre de niveaux taxinomiques (embranchements, classes, familles, ordres, genres, espèces, races) au sein desquels tous les individus portent la série de traits caractéristiques du taxon considéré, ce qui permet précisément leur affectation classificatoire. Cette méthode retient uniquement ce qui uniformise ; elle ignore ce qui différencie. Or seuls les traits qui différencient jouent, on l'a vu, un rôle dans le processus évolutif, un seul niveau correspond à une réalité, biologique : celui de l'espèce, formée d'individus qui dans les conditions naturelles sont interféconds. Tous les autres sont des constructions plus ou moins arbitraires du classificateur. Mais aucune espèce n'est formée d'individus identiques ; bien au contraire, chaque espèce sauvage (non triée en laboratoire) rassemble des sujets génétiquement très variés.
De plus, à de rares exceptions près, la plupart des espèces s'étendent sur de vastes aires. Aussi, sont-elles formées de groupes qui présentent, en leur sein, une reproduction préférentielle. Ces groupes constituent des populations. En d'autres termes, deux individus qui appartiennent à la même population (qui vivent à la même époque et dans un même lieu) auront plus de chances de se croiser entre eux que de se croiser avec d'autres. La population est donc une unité de reproduction. Elle correspond à un « pool de gènes intercommunicants », dont les individus constituent - pour un moment - l'émergence visible. L'effectif de la population représente en quelque sorte la banque de son patrimoine. C'est sur la population, expression matérielle de ce patrimoine, que vient « mordre » la sélection naturelle. Et sa nature (c'est-à-dire la répartition des gènes dans l'effectif populationnel) variera au fil des générations suivant le sens des forces de sélection.
Pourquoi chaque population est-elle hétérogène ? Les environnementalistes répondent par des arguments solides. Aucune niche écologique n'offre des conditions absolument constantes ; elles varient dans le temps (au cours de la journée, des saisons, des siècles) et dans l'espace (selon l'altitude, l'exposition, la latitude, etc.). Si une population était constituée d'individus portant un patrimoine identique, chaque sujet s'activerait au même moment, chercherait la même nourriture, voudrait s'installer dans le même site, désirerait le même partenaire sexuel. Une compétition sévère régnerait au sein d'une niche écologique restreinte, aux ressources limitées. Au contraire, la population formée d'individus génétiquement variés présente un comportement très différent. [...]
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