Henri Focillon, Vie des Formes
Publié le 29/07/2010
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Henri Focillon nait à Dijon en 1881 et meurt dans le Connecticut aux Etats-Unis en 1943. Fils d’un graveur, il fut directeur du musée des Beaux Arts à Lyon et professeur d’Histoire de l’art d’abord à la Sorbonne et plus tard à l’université de Yale aux Etats-Unis, où il choisit de s’exiler jusqu’à la fin de sa vie. Parallèlement à ces activités, il est l’auteur de plusieurs ouvrages théoriques sur l’art : en effet son esprit curieux le porta à s’intéresser aussi bien à l’art de son temps, qu’à l’art médiéval ou encore à l’estampe japonaise. George Kubler, un ancien élève de Focillon, nous apprend que sa méthode en tant qu’enseignant d’histoire de l’art consistait à « s’associer à ses élèves comme collaborateurs plutôt que de les plier à la hiérarchie « (George Kubler, L’enseignement d’Henri Focillon dans Relire Focillon). En effet Focillon eut un rôle novateur dans l’enseignement : il institua à Paris comme à Lyon et plus tard aussi à Yale, des « groupes d’étudiants « ; ces groupes avaient pour but de préparer les élèves de l’université à s’associer aux professeurs dans des recherches avancées. L’originalité de Focillon se manifesta ainsi non seulement à travers son approche innovatrice de l’enseignement mais aussi dans une vision très personnelle de l’œuvre d’art, dont il expose les principales idées dans La vie des formes. La vie des formes parait en 1934, suite à deux conférences sur le même sujet que Focillon avait données en 1933. Il s’agit d’un petit traité théorique dans lequel il expose sa conception de l’œuvre d’art en tant que forme avant tout. Si Focillon a écrit cet ouvrage en un bref délai et que certains le considèrent en quelque sorte comme une ébauche, on y retrouve néanmoins les principaux vecteurs de sa pensée. Le titre contient déjà les deux mot-clé à l’appui desquels l’auteur élabore sa pensée: “vie” et “forme”. Ecrit sous une forme qui s’apparente à celle de méditations poétiques, ce livre n’est pas aussi inoffensif qu’il pourrait le sembler et l’auteur s’attaque de façon subtile à la pensée de plusieurs de ses prédécesseurs et de ses contemporains. Il se place notamment contre Taine, Panofsky, Male, Wölfflin et Riegl. A travers la phrase empruntée à Balzac « Tout est forme, même la vie est forme «, l’auteur nous présente l’intention derrière son ouvrage : dégager les logiques sous lesquelles apparait et se métamorphose la forme, et ses caractéristiques en tant qu’entité à la fois autonome et à la fois rattachée à un sens, ainsi que les liens qui unissent la forme et ses possibles interprétations. Une fois ces éléments identifiés, la question ultime que se pose Focillon est : dans la vie d’une forme et lors de ses transformations multiples, quelle est la part de nécessité et quelle est la part de liberté? Dans le premier chapitre intitulé Le monde des formes, l’auteur se pose le problème de la définition de l’œuvre d’art, problème qui, comme lui-même le souligne, avait déjà été posé précédemment dans l’histoire de l’art. A cet égard, Focillon précise que la réponse à cette question varie : selon que la personne soit l’artiste, le commanditaire ou un simple observateur, chacun aura des attentes et des besoins différents, donc une définition différente de ce qu’est l’œuvre d’art. Mais il ajoute ici à cette définition une notion-clé : bien qu’elle soit à la fois matière et esprit, l’œuvre d’art est avant tout une forme. Quelles sont les caractéristiques de cette forme pour Focillon? Elle est avant tout dynamique, elle est définie par l’espace qui l’entoure et en même temps elle définit l’espace autour d’elle, ainsi que d’autres espaces possibles : « Elle est stricte définition de l’espace mais elle est suggestion d’autres formes. Elle se continue, elle se propage dans l’imaginaire, ou plutôt nous la considérons comme une sorte de fissure, par laquelle nous pouvons faire entrer dans un règne incertain, qui n’est ni l’étendu, ni la pensée, une foule d’images qui aspirent à naitre. « Comme les formes qui sont générées dans la nature, la forme de l’œuvre d’art est vivante, et à son tour elle génère d’autres formes. C’est avec le même regard que le biologiste aurait pour un organisme vivant que Focillon scrute cette forme et son devenir. D’autre part, la forme est matière : par sa nature plastique elle est profondément ancrée dans le réel, car elle est « mesure de l’espace «. Or, dès que la forme apparaît, nous sommes tentés de lui attribuer un sens, de lui faire correspondre une image qu’elle représenterait. C’est ici que l’auteur introduit la notion d’autonomie de la forme. pour illustrer cela, il se sert d’un parallèle avec la linguistique : si la forme signifiait autre chose qu’elle-même, ce ne serait plus une forme, ce serait un signe. Car un signe est symbolique, il est rattaché à un sens. Et ce sens peut varier selon les contextes et les nécessités linguistiques, alors que la forme existe par elle-même et pour elle-même, elle ne signifie rien de plus que ce qu’elle est. D’où la frase célèbre : « Le signe signifie, alors que la forme se signifie «. La forme serait comme un « moule creux, où l’homme verse tour à tour des matières très différentes qui se soumettent à la courbe qui les presse, et acquièrent ainsi une signification inattendue. « Si le sens est susceptible de changer selon les époques et les contextes, la forme elle, reste immuable. Sa force est telle qu’elle peut amener à une superposition de lectures, et une fois ces lectures devenues obsolètes, elle peut conduire à l’élaboration de nouveaux sens sans rapport avec les précédents. Ces nouveaux sens s’ajouteront à elle et viendront épaissir ce réseau déjà dense de lectures possibles. Si à certains moments de son existence la forme est susceptible de n’être rattachée à aucun sens, cela ne fait que prouver une fois de plus son autonomie. Ainsi, par cette revendication de l’autonomie de la forme par rapport au sens, Focillon s’oppose à la fonction iconographique de l’œuvre d’art qui avait été soutenue jusque là en France, notamment par Emile Male. Le mouvement de la vie des formes, est selon Focillon, soumis à un ordre qui est régit par des principes. Ces principes sont celui de la métamorphose et celui du style. Selon le premier principe, la forme est en changement perpétuel. A travers les nombreuses expériences techniques auxquelles elle est soumise, elle se transforme au cours du temps. Ainsi, un thème bien connu comme celui du corps de l’homme et de la femme peut connaître des réalisations très différentes selon les gouts et les époques, et la forme sera toujours animée par la recherche d’autres nouvelles formes possibles. C’est ce dynamisme et ce renouvellement de la forme par elle-même que Focillon appelle « vie des formes «. Mais il est important de souligner que Focillon s’oppose ici à une conception linéaire du temps ainsi qu’à une théorie évolutionniste de la forme, trop facile et peu appropriée à son avis, comme celle qu’avait pu établir Taine dans sa vision déterministe. A la triade « race, milieu, moment « élaborée par Taine, il oppose trois autres notions au croisement desquelles il pense que se situe l’œuvre d’art: le style, la technique et l’homme. Les métamorphoses de la forme seraient donc plutôt coordonnées par des styles, deuxième grand principe introduit par Focillon, qui dit : « La forme peut devenir formule et canon, c’est-à-dire arrêt brusque, type exemplaire, mais elle est d’abord une vie mobile dans un monde changeant. Les métamorphoses, sans fin, recommencent. C’est le principe des styles qui tend à les coordonner et à les stabiliser. « Le terme « style «, peut avoir deux acceptions opposées. Si on parle du style, on entend par là quelque chose d’absolu et d’immobile, alors que si on parle d’un style, il s’agit d’une conception dynamique et individuelle. Ce style là se définit par ses mesures, c'est-à-dire par une série de rapports mathématiques. A la manière dont l’entendaient les grecs, le style est une question de variations et de recherches sur les mesures. Ainsi, la véritable différence entre l’architecture dorique et l’architecture ionique serait donnée non seulement par l’ajout de certains éléments formels tels que les volutes, mais surtout par un calcul du rapport des différentes parties entre elles. Pour comprendre le mouvement des styles, selon Focillon, il est nécessaire de prendre en compte deux points essentiels: « plusieurs styles peuvent vivre simultanément, même dans des régions très rapprochées, même dans une région unique ; les styles ne se développent pas de la même manière dans les divers domaines techniques où ils s’exercent. « Le style obéit à une logique interne qui lui est propre et ses métamorphoses correspondent à une recherche empirique indépendante et continue. Une fois de plus, cette conception dynamique et expérimentale du style, comme un système organique qui possède un ordre interne qui lui est propre, s’éloigne d’un certain déterminisme mécanique. De même, le style peut se manifester plus à travers une certaine technique qu’une autre, Focillon appelle ce principe « la loi du primat technique « qu’il dit avoir emprunté de Bréhier qui l’utilisait à propos des arts barbares. Mais cette domination d’une certaine technique sur un certain style n’est que apparente : en effet chaque moment de la vie des arts est une recherche continue, et si au début du Moyen Age la peinture semblait être la technique picturale dominante, elle n’a moins ouvert la voie vers d’autres techniques comme celles du vitrail, qui dès le gothique rayonnant devient à son tour technique dominante. Ainsi les formes ne sont pas continuellement subordonnées à la loi du primat technique, plutôt, elles s’y adaptent pour ensuite s’en détacher et en tirer de nouvelles expériences formelles. L’importance accordée par Focillon à la technique pourrait faire référence à Paul Valéry et aux idées défendues dans son traité intitulé Introduction à la méthode Léonard de Vinci ou encore à l’influence du critique d’art Gustave Geoffroy, ami de Focillon, qui lui aussi défendait la liberté de la forme en opposition au déterminisme de Taine. Focillon envisage quatre âges stylistiques : l’état expérimental, l’état classique, l’état du raffinement, l’état baroque. Il se dit débiteur vis-à-vis de l’archéologue Déonna pour ce qui est de ces distinctions, mais il introduit un état supplémentaire : celui du raffinement. L’idée derrière cette distinction, n’est pas de fonder une nouvelle schématisation mécanique, mais au contraire de souligner comment indépendamment des époques et des contextes historiques, chaque style traverse ces différents état et comment chacun de ces état est un moment de la vie des formes, car il existe indépendamment des autres états. L’ état expérimental ou archaïque est l’état où l’art cherche à se définir, il est caractérisé par une « unité massive « et « ne cherche ses variations que dans un ordre architectural «. C’est le style de l’archaïsme roman, de l’archaïsme grec et de des premières architectures gothiques. L’état classique représente le moment où l’on rejoint une stabilité après l’expérimentation, c’est une sorte de moment culminant où le rapport entre les différentes parties s’accordent par une proportion parfaite dont la valeur est universelle. Focillon souligne qu’il ne s’agit pas du résultat d’un conformisme car au contraire, c’est le résultat d’une ultérieure expérience, c’est un moment heureux de la vie des formes, et il insiste sur la notion de moment, comme quelque chose en devenir, qui n’est pas définitif. A’ ce moment correspondent l’art gréco-romain, l’épanouissement des cathédrales gothiques et la peinture de la Renaissance. L’état du raffinement prévoit une plus grande élégance, plus de flexibilité et souvent une sorte de froide pureté des formes : c’est le moment où la technique picturale s’affirme et prend le dessus sur la technique architecturale.. A cet âge correspondent l’hellénisme, le gothique rayonnant et l’art japonais du XIIIème siècle. Le quatrième état, celui du baroque, est celui où les formes perdent tout rapport de convenance qui leur état propre dans l’état du classicisme, elles s’en libèrent et se développent dans toutes les directions, « prolifèrent tel un monstre végétal «. La technique se fait plus ornementale et cet état se manifeste dans le gothique flamboyant, dans le baroque ainsi que dans le romantisme. S’en vient ensuite l’idée que les styles, outre qu’ être différents états de la vie des formes, sont aussi un « milieu formel homogène, cohérent, à l’intérieur duquel l’homme agit et respire «. L’artiste est donc un instrument par lequel la forme va se manifester, « traduisant dans l’espace certains mouvements de l’esprit «. Ces milieux formels peuvent être « stables « ou « nomades « : ils peuvent se retrouver tels quels dans différents pays, ou au contraire, n’apparaître que dans un seul pays. Dans les deux cas, les formes créent une sorte de profil psychologique du pays, que Focillon appelle des « sites psychologiques «. Ce sont eux qui forgent l’identité artistique d’un pays, avec plus de force que la géologie dont il se trouve doté ou que l’histoire qu’il traverse. Une fois énoncés les éléments qui structurent la vie complexe des formes, Focillon tient à souligner que cette vision ne veut ni faire entrer l’œuvre d’art dans un automatisme aveugle, ni la contraindre à une sorte de schématisation qui la définit à l’avance. Par le fait qu’elles sont vivantes, les formes sont imprévisibles et bien que la même forme conserve sa mesure, elle « change de qualité selon la matière, l’outil, la main «. Par ailleurs, la diversité des hommes entre aussi en jeu. Focillon introduit l’idée, à la fin de ce premier chapitre, d’une « ethnographie spirituelle «, c’est-à-dire d’une sensibilité commune qui réunirait les hommes de différentes époques et différents milieux et qui leur dicterait le choix d’un style donné plutôt qu’un autre : « peut-être chaque style et chaque état d’un style, peut-être chaque technique requièrent-il de préférence telle nature d’homme, telle nature spirituelle «. A’ travers La vie des formes, Focillon rompt avec la plus part des traditions de l’histoire de l’art soutenues à son époque par Male, Taine et Panofsky, il fut considéré comme la réponse française au formalisme allemand qui se développait alors en Allemagne. Pourtant il ne s’accorde pas entièrement non plus avec l’idée de Kunstwollen défendue par Riegl, ni avec les théories de Wölfflin. En effet pour Focillon la forme est avant tout dans l’action, et non dans le vœu de l’action. L’analogie avec la biologie pourrait bien être l’influence de la recherche scientifique de ces années 1920-1930 sur la structure de la matière et de l’être vivant ; en cette volonté de fonder une approche basée sur une observation scrupuleuse de la vie des formes l’on peut dire que Focillon s’inscrit parfaitement dans un certain esprit son temps. En écartant une conception évolutionniste des styles, Focillon veut mettre en avant un fait : l’œuvre d’art au moment où elle est créée est le fruit d’une multiplicité de facteurs qui vont bien au-delà d’un simple jeu d’influences inscrits dans une conception linéaire du temps. Focillon isole le moment de la création de l’œuvre d’art : ce moment est rupture, il n’est pas continuité. Comme il l’explique dans le chapitre V intitulé Les formes dans le temps, le temps est conçu comme un flux discontinu et imprévisible, non linéaire, avec des moments de stagnation et des moments d’accélération : en cela il se rapproche de la phénoménologie développée alors en Allemagne, qui rejetait à ce moment l’héritage de Hegel. Son héritage intellectuel fut surtout recueilli par ses élèves, qui développèrent ses théories en ouvrant d’autres voies : parmi ceux-ci l’on peut citer André Chastel, George Kubler, Jean Bony et Jurgis Baltrusaitis. Bien qu’il aie fondé une nouvelle méthode, la vision de Focillon de l’œuvre d’art est avant tout dynamique, la notion de vie de l’œuvre est pour lui fondamentale et au cœur de cette analyse. A cet effet on peut citer Faison, selon qui l’horreur de Focillon pour les “catégorisations artistiques, l’incitait à rechercher l’unicité de chaque œuvre, plutôt que de la traiter comme l’exemple d’un type”. Bibliographie : • Henri Focillon, Vie des Formes, éditions Quadrige/PUF, Paris 1943 • George Kubler, Walter Cahn, Willibal Sauerlander, Jaques Thuillier, Philippe Junod, Relire Focillon, collection « Conférences et colloques « du Louvre, éditions Musée du Louvre et ensb-a, Paris 1998 • Annamaria Ducci, « Vie des formes, Henri Focillon «, Encyclopedia Universalis 2007 • Germain Bazin, Histoire de l’histoire de l’art : de Vasari à nos jours, éditions Albin Michel, Paris 1986
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forme sera toujours animée par la recherche d'autres nouvelles formes possibles.
C'est ce dynamisme et cerenouvellement de la forme par elle-même que Focillon appelle « vie des formes ».Mais il est important de souligner que Focillon s'oppose ici à une conception linéaire du temps ainsi qu'à une théorieévolutionniste de la forme, trop facile et peu appropriée à son avis, comme celle qu'avait pu établir Taine dans savision déterministe.
A la triade « race, milieu, moment » élaborée par Taine, il oppose trois autres notions aucroisement desquelles il pense que se situe l'œuvre d'art: le style, la technique et l'homme.
Les métamorphoses de la forme seraient donc plutôt coordonnées par des styles, deuxième grand principe introduitpar Focillon, qui dit : « La forme peut devenir formule et canon, c'est-à-dire arrêt brusque, type exemplaire, maiselle est d'abord une vie mobile dans un monde changeant.
Les métamorphoses, sans fin, recommencent.
C'est leprincipe des styles qui tend à les coordonner et à les stabiliser.
»Le terme « style », peut avoir deux acceptions opposées.
Si on parle du style, on entend par là quelque chosed'absolu et d'immobile, alors que si on parle d'un style, il s'agit d'une conception dynamique et individuelle.
Ce stylelà se définit par ses mesures, c'est-à-dire par une série de rapports mathématiques.
A la manière dont l'entendaientles grecs, le style est une question de variations et de recherches sur les mesures.
Ainsi, la véritable différenceentre l'architecture dorique et l'architecture ionique serait donnée non seulement par l'ajout de certains élémentsformels tels que les volutes, mais surtout par un calcul du rapport des différentes parties entre elles.Pour comprendre le mouvement des styles, selon Focillon, il est nécessaire de prendre en compte deux pointsessentiels: « plusieurs styles peuvent vivre simultanément, même dans des régions très rapprochées, même dansune région unique ; les styles ne se développent pas de la même manière dans les divers domaines techniques où ilss'exercent.
»
Le style obéit à une logique interne qui lui est propre et ses métamorphoses correspondent à une rechercheempirique indépendante et continue.
Une fois de plus, cette conception dynamique et expérimentale du style,comme un système organique qui possède un ordre interne qui lui est propre, s'éloigne d'un certain déterminismemécanique.
De même, le style peut se manifester plus à travers une certaine technique qu'une autre, Focillonappelle ce principe « la loi du primat technique » qu'il dit avoir emprunté de Bréhier qui l'utilisait à propos des artsbarbares.
Mais cette domination d'une certaine technique sur un certain style n'est que apparente : en effet chaquemoment de la vie des arts est une recherche continue, et si au début du Moyen Age la peinture semblait être latechnique picturale dominante, elle n'a moins ouvert la voie vers d'autres techniques comme celles du vitrail, qui dèsle gothique rayonnant devient à son tour technique dominante.Ainsi les formes ne sont pas continuellement subordonnées à la loi du primat technique, plutôt, elles s'y adaptentpour ensuite s'en détacher et en tirer de nouvelles expériences formelles.
L'importance accordée par Focillon à latechnique pourrait faire référence à Paul Valéry et aux idées défendues dans son traité intitulé Introduction à laméthode Léonard de Vinci ou encore à l'influence du critique d'art Gustave Geoffroy, ami de Focillon, qui lui aussidéfendait la liberté de la forme en opposition au déterminisme de Taine.
Focillon envisage quatre âges stylistiques : l'état expérimental, l'état classique, l'état du raffinement, l'état baroque.Il se dit débiteur vis-à-vis de l'archéologue Déonna pour ce qui est de ces distinctions, mais il introduit un étatsupplémentaire : celui du raffinement.L'idée derrière cette distinction, n'est pas de fonder une nouvelle schématisation mécanique, mais au contraire desouligner comment indépendamment des époques et des contextes historiques, chaque style traverse ces différentsétat et comment chacun de ces état est un moment de la vie des formes, car il existe indépendamment des autresétats.L' état expérimental ou archaïque est l'état où l'art cherche à se définir, il est caractérisé par une « unité massive »et « ne cherche ses variations que dans un ordre architectural ».
C'est le style de l'archaïsme roman, de l'archaïsmegrec et de des premières architectures gothiques.
L'état classique représente le moment où l'on rejoint une stabilitéaprès l'expérimentation, c'est une sorte de moment culminant où le rapport entre les différentes parties s'accordentpar une proportion parfaite dont la valeur est universelle.
Focillon souligne qu'il ne s'agit pas du résultat d'unconformisme car au contraire, c'est le résultat d'une ultérieure expérience, c'est un moment heureux de la vie desformes, et il insiste sur la notion de moment, comme quelque chose en devenir, qui n'est pas définitif.
A' ce momentcorrespondent l'art gréco-romain, l'épanouissement des cathédrales gothiques et la peinture de la Renaissance.L'état du raffinement prévoit une plus grande élégance, plus de flexibilité et souvent une sorte de froide pureté desformes : c'est le moment où la technique picturale s'affirme et prend le dessus sur la technique architecturale..
Acet âge correspondent l'hellénisme, le gothique rayonnant et l'art japonais du XIIIème siècle.Le quatrième état, celui du baroque, est celui où les formes perdent tout rapport de convenance qui leur étatpropre dans l'état du classicisme, elles s'en libèrent et se développent dans toutes les directions, « prolifèrent tel unmonstre végétal ».
La technique se fait plus ornementale et cet état se manifeste dans le gothique flamboyant,dans le baroque ainsi que dans le romantisme.
S'en vient ensuite l'idée que les styles, outre qu' être différents états de la vie des formes, sont aussi un « milieuformel homogène, cohérent, à l'intérieur duquel l'homme agit et respire ».
L'artiste est donc un instrument par lequella forme va se manifester, « traduisant dans l'espace certains mouvements de l'esprit ».
Ces milieux formels peuventêtre « stables » ou « nomades » : ils peuvent se retrouver tels quels dans différents pays, ou au contraire,n'apparaître que dans un seul pays.
Dans les deux cas, les formes créent une sorte de profil psychologique du pays,que Focillon appelle des « sites psychologiques ».
Ce sont eux qui forgent l'identité artistique d'un pays, avec plusde force que la géologie dont il se trouve doté ou que l'histoire qu'il traverse.
Une fois énoncés les éléments qui structurent la vie complexe des formes, Focillon tient à souligner que cette vision.
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