Grands et grands personnages dans les Pensées de Pascal.
Publié le 16/10/2010
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Les Pensées sont un recueil de fragments laissés à sa mort par Pascal Blaise, ancien mathématicien et physicien habitué aux milieux mondains qui voua ses dernières années à l'austérité et à la religion. Son expérience des milieux mondains et de sa proximité avec de grands personnages lui permit d'en faire mention dans son oeuvre inachevée, comme nous allons le voir dans une étude des Pensée en trois temps: Nous analyserons dans un premier temps les critiques que fait Pascal à l'encontre des Grands, avant les exemples qu'il utilise pour illustrer ses critiques. Et enfin, dans une troisième partie, nous nous demanderons si tout compte fait, selon Pascal, il faut honorer ou pas les grands.
Nous allons donc voir quelle critique Pascal fait des grands personnages. Il est bon de noter tout d'abord que Pascal considère les grands emplois comme de simples divertissements, et il nous dresse une énumération de ces grands emplois: Roi, surintendant, chancelier, président. Au même titre que « la discussion des femmes «, l'homme « se divertit « en travaillant, car cela lui permet d'oublier sa « condition faible et mortelle «. Ces grands emplois ne sont donc que de simples divertissements, « les grands « sont des hommes comme tout le monde: Le roi cour après une balle ou un lièvre pour se divertir, au même titre que n'importe qui. De plus c'est le pur hasard de la naissance qui fait le roi, il n'est donc ni plus ni moins qu'un autre homme. Après avoir rabaissé ces grands personnages à la hauteur de n'importe quel homme, Pascal fini par critiquer la vanité de leurs fonctions, car l'homme se trompe. Il se trompe sur le respect et la terreur dus aux roi, l'on croit que la force vient d'eux mêmes, or elle vient de la coutume, qui n'est pas fondée sur la raison. C'est donc quelque chose de tout à fait irrationnel que de respecter un Roi, selon Pascal, avant de préciser que le Roi possède la force, l'armée, qui force le peuple au respect. Mais la puissance du Roi est vaine, vide, car elle repose sur la folie du peuple, et non sur le roi lui même, là où la justice, qui ne peut s'affirmer sans la force, repose sur la fantaisie: les juges, magistrats, et même médecins, frappent l'imagination de leurs broderies de soie, de leurs habits riches qui le rendent importants. Or ce n'est qu'illusion, car la justice est vaine: « vérité au deçà des Pyrénées, erreur au delà. « Le Roi n'a que faire de tout cela, car il a la force, et c'est sur la force que la justice repose: « ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste. «, il faut donc respecter les lois pour que le système fonctionne. Pour illustrer ses propos Pascal utilise de nombreux exemples qu'il serait intéressant d'analyser.
Très ingénieusement Pascal utilise l'exemple du Roi à fortiori: Si le roi s'ennuie, alors tout homme s'ennuie. Or il propose de faire l'expérience de laisser un roi seul, sans personne pour le distraire, en supposant d'abord que le titre de roi devrait suffire à pourvoir à son bonheur. Force est de constater que ce n'est pas le cas: « Un roi sans divertissement est un homme plein de misère. « Il en est donc de même pour tout homme. Le roi n'est bien de plus qu'un homme qui a besoin de divertissement. Ensuite pour marquer la bassesse des grands il précise ses exemple: les magistrats sont comparés à des chant-fourrés du fait de leurs atours outrecuidants qui frappent l'imagination et nous mettent en bonne posture pour les écouter, alors que ce magistrat à la vieillesse vénérable et reconnu, s'il venait à entrer avec une voix enrouée, un tour de visage bizarre, mal rasé et barbouillé, l'on peut parier la perte de sa gravité. Cet exemple commence par des éloges à l'encontre du magistrat, pour mieux le rabaisser à force de précisions millimétrées, procédé renforçant la vanité de la magistrature, et donc de tout grand se parant d'atours pour en imposer. Ce qui, comme nous l'avons vu plus haut, n'est pas le cas du roi, qui détient, lui, la force, mais qui, malgrè tout, et comme tout un chacun, a besoin de piètre « agitation « pour ne pas penser à sa « faible condition d'homme mortel. « Tout homme est misérable, et plus encore l'est celui qui n'en a pas conscience, or le magistrat qui s'habille en grand en a t il conscience, lui? Peut être que les grands sont encore plus misérables que les autres hommes qui ont conscience de leur misère. Une question s'impose alors d'elle même: faut il honorer les grandes gens, aussi misérables soient elles?
Pour répondre à cette question Pascal nous offre dans la liasse « raison des effets « une hiérarchie structurée en trois ordres composés de différentes catégories de pensée, et non de catégories sociales: Celui de la chair, composé essentiellement du peuple, celui de l'esprit, qui regroupe les habiles et les demi habiles, et enfin celui de la charité, qui regroupe cette fois les dévots et les chrétiens parfaits, dont Pascal fait parti. Entre toutes ces catégories de pensée donc, lesquelles doivent honorer les grands? Nous allons pour répondre à cette question suivre la structure de Pascal, en commençant par l'ordre de la chair, donc le peuple: le peuple est la catégorie de personnes qui se laissent influencer par les apparences que nous avons vues plus haut avec les juges et autres magistrats. De plus elles pensent que la naissance est un « avantage effectif «, donc que les Grands sont des hommes d'une nature supérieure. Ils honorent donc tout naturellement les grands. Ensuite sont les demi habiles, qui possèdent un semblant de connaissance, mais seulement assez pour soutenir que la naissance n'est pas un avantage de la personne, ils méprisent donc les grands, à l'inverse des habiles qui eux ont la « pensée de derrière «, c'est à ire qu'il ont compris, eux, que le « souverain bien « est la paix et donc qu'il faut honorer les grands pour limiter les troubles. Ils les honorent donc, mais par simple nécessité. Enfin viennent les dévots, qui ont eux un semblant de « lumière «, et croient que la seule grandeur qui soit est divine et non pas humaine, et que tous les hommes sont égaux. Il méprisent donc les Grands, mais une fois encore par faut d'assez de science, car les chrétiens parfaits, eux, disposent d'une « lumière supérieure «, et ont donc conscience que dieu a puni l'homme, qu'il est imparfait et ils ont compris que peine était perdue que de faire la guerre aux grands. Ils ne les honorent donc pas pour la valeur qu'ils n'ont pas, mais par amour de dieu. Faut il donc, finalement, honorer les grands? Selon Pascal, oui, pour l'amour de dieu et de la paix.
En conclusion force est de constater que l'homme n'est que misère et les grands de même, à fortiori, mais qu'il faut, au nom du « souverain bien «, les honorer, telle est le message de Pascal, qu'il nous livre à force d'exemples fort bien construits et explicites.
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