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Fénelon, les Aventures de Télémaque (extrait).

Publié le 07/05/2013

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Fénelon, les Aventures de Télémaque (extrait). Plus qu'une visite actualisée de l'Odyssée d'Homère, les Aventures de Télémaque (1699) de Fénelon cherchent certes à capter l'attention du jeune et dissipé duc de Bourgogne -- dont l'auteur est le précepteur --, mais sont essentiellement conçues comme un cours de morale politique, pédagogique et « distrayant «. En faisant donner par Mentor (le compagnon et précepteur du fils d'Ulysse) de bons conseils de gouvernement au jeune Télémaque pour le préparer à son glorieux avenir (comme le jeune élève de Fénelon), il dénonce les dangers de l'ambition et prône sa conception mesurée de l'autorité royale. Les Aventures de Télémaque de Fénelon [...] Quand mon rang fut venu, je n'eus pas de peine à répondre, parce que je n'avois pas oublié ce que Mentor m'avoit dit souvent. -- Le plus libre de tous les hommes -- répondis-je -- est celui qui peut être libre dans l'esclavage même. En quelque pays et en quelque condition qu'on soit, on est très libre, pourvu qu'on craigne les dieux et qu'on ne craigne qu'eux. En un mot, l'homme véritablement libre est celui qui, dégagé de toute crainte et de tout désir, n'est soumis qu'aux dieux et à sa raison. Les vieillards s'entre-regardèrent en souriant et furent surpris de voir que ma réponse fût précisément celle de Minos. Ensuite on proposa la seconde question en ces termes : « Quel est le plus malheureux de tous les hommes ? « Chacun disoit ce qui lui venoit dans l'esprit. L'un disoit : « C'est un homme qui n'a ni biens, ni santé, ni honneur. « Un autre disoit : « C'est un homme qui n'a aucun ami. « D'autres soutenoient que c'est un homme qui a des enfants ingrats et indignes de lui. Il vint un sage de l'île de Lesbos, qui dit : « Le plus malheureux de tous les hommes est celui qui croit l'être ; car le malheur dépend moins des choses qu'on souffre que de l'impatience avec laquelle on augmente son malheur ! « À ces mots, toute l'assemblée se récria ; on applaudit, et chacun crut que ce sage Lesbien remporteroit le prix sur cette question. Mais on me demanda ma pensée, et je répondis, suivant les maximes de Mentor : -- Le plus malheureux de tous les hommes est un roi qui croit être heureux en rendant les autres hommes misérables. Il est doublement malheureux par son aveuglement ; ne connoissant pas son malheur, il ne peut s'en guérir ; il craint même de le connoître. La vérité ne peut percer la foule des flatteurs pour aller jusqu'à lui. Il est tyrannisé par ses passions ; il ne connoît point ses devoirs ; il n'a jamais goûté le plaisir de faire le bien, ni senti les charmes de la pure vertu, il est malheureux et digne de l'être : son malheur augmente tous les jours ; il court à sa perte, et les dieux se préparent à le confondre par une punition éternelle. Toute l'assemblée avoua que j'avois vaincu le sage Lesbien, et les vieillards déclarèrent que j'avois rencontré le vrai sens de Minos. [...] Source : Fénelon (François), les Aventures de Télémaque, Paris, Garnier-Flammarion, coll. « Classiques «, 1994. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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