fable - littérature.
Publié le 28/04/2013
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3. 2 Un bestiaire riche et souvent conventionnel
Dans la fable occidentale, le bestiaire, assez varié, se compose essentiellement d’animaux stéréotypés, et le lien entre ces animaux et les caractères humains reste assez conventionnel.
Ainsi, l’animal représentant le plus souvent le pouvoir et la
grandeur est le Lion ; pour figurer la cruauté, la férocité et par là l’autoritarisme, le Loup est reconnu comme la figure idéale.
Le Renard est pour sa part rusé et intelligent, le Chien fidèle, l’Âne stupide, l’Agneau doux, la Fourmi besogneuse, etc.
4 HISTOIRE DE LA FABLE
4. 1 De la tradition orale au Panchatantra
Issue de la tradition orale, la fable est présente dans les littératures les plus anciennes du monde entier.
Le premier recueil de fables connu, composé au début de notre ère, est le Panchatantra , qui rassemble contes et fables du sud de l’Inde, du Népal
et du Cachemire, transmis et augmentés par d’innombrables versions, dont celle en arabe attribuée à Bidpay, un brahmane hindou.
Ces fables auraient, à l’origine, été rassemblées par un sage, réel ou mythique, Vishnu Sharma, qui voulait enseigner
le Niti (« la sage conduite de la vie ») aux trois fils de son roi.
Le recueil compte quatre-vingt-quatre fables, et beaucoup plus de récits enchâssés, afin de soutenir l’attention des lecteurs et auditeurs.
Ces fables, mettant en scène et faisant parler tous
les animaux de la faune indienne, du puceron au chacal, sont en apparence souvent dénuées de morale ou même immorales — la loi du plus fort l’emportant le plus souvent.
Cependant les fables du Panchatantra laissent transparaître, par la verve
ironique, voire cynique du récit, une certaine moralité et donnent ainsi des leçons de vie.
4. 2 D’Ésope à Phèdre
En Occident, on attribue à Ésope, esclave phrygien qui aurait vécu en Grèce au VIe siècle av.
J.-C.
— mais dont l’existence n’est pas attestée —, quelques centaines fables en prose, qu’il aurait lui-même compilées à partir de récits oraux très anciens.
Écrites dans une langue simple et accessible, elles auraient été transmises oralement de génération en génération et recueillies par Démétrios de Phalère vers 300 av.
J.C.
Ayant pour acteurs des animaux — tantôt communs, tantôt exotiques
(crocodile ou chameau) — et des divinités, ou bien traitant de concepts comme le bien et le mal ou l’origine des choses, ces fables brèves à caractères didactique, moraliste, symbolique, voire étiologique, donnent des leçons aux hommes.
La fable est
un genre qui existait cependant avant Ésope dans l’Antiquité — peut-être originaire d’Asie Mineure, de Phrygie, de Syrie, ou même d’Inde —, et notamment en Grèce antique : on connaît notamment une fable d’Hésiode (« le Rossignol et l’Épervier »),
une fable d’Archiloque (« le Cheval et le Cerf »), ainsi qu’une fable de Stésichore, poète sicilien du VIe siècle av.
J.-C.
(« l’Aigle et le Renard »).
Platon, quant à lui, raconte dans le Phédon que Socrate aurait écrit des fables en prison (peut-être celles
attribuées à Ésope, selon certains exégètes ; d’autres d’ailleurs ont attribué les fables que l’on connaît d’Ésope à Planude, un moine qui a écrit sa vie au XIVe siècle).
De nombreux poètes latins se sont essayés au genre, au goût du jour dans la Rome antique, notamment Ennius, Caius Lucilius, Plaute, Térence et Horace Mais c’est Phèdre, poète latin originaire de Thrace du Ier siècle, qui rédige le plus important
recueil en vers, réunissant et adaptant les fables d’Ésope.
Il explique dans le prologue à son ouvrage : « Ésope, créateur de la fable, en a trouvé la matière ; moi, je l’ai polie et mise en vers sénaires [six pieds].
Ce petit livre offre un double
avantage : il fait rire et donne de sages conseils pour la conduite de la vie.
Peut-être voudra-t-on me chercher chicane sous prétexte que j’y fais parler les arbres, sans m’en tenir aux animaux.
Mais je rappellerai que ce sont là des badinages et des
récits tout imaginés.
» Son recueil compte 132 fables qu’il a écrites ou réécrites — il affirme que ses fables sont davantage le produit de sa création que le fruit d’une adaptation.
Selon l’écrivain Antoine Houdar de La Motte (1672-1731), alors qu’Ésope
n’était qu’un « philosophe », « Phèdre est un auteur ».
Sont héritées également des Fables d’Ésope les 123 fables retrouvées (il en aurait écrit près de 200) du poète gréco-latin Babrius (ou Babrias), composées au IIe ou IIIe siècle (mais découvertes au XIXe siècle), et les 42 fables du poète romain Avienus
(ou Avienas) composées au Ve siècle, ainsi qu’une fable peut-être écrite par Tibère (« le Renard et le Hérisson »).
On attribue également quelques fables à Plutarque, à Lucien de Samosate et surtout à Nicostrate qui aurait composé une dizaine de
recueils de fables, aujourd’hui perdus.
4. 3 De Marie de France à Jean de La Fontaine
En France, au Moyen Âge, on se souvient davantage de l’œuvre d’Ésope que de celle de Phèdre, qui pourtant a traversé les siècles grâce à une version simplifiée datant du Ve siècle, le Romulus. Les fables « ésopiques », tout comme celles des
différentes versions du Romulus, inspirent les poètes du Moyen Âge français, déjà friands de contes animaliers tel le Roman de Renart. En l’honneur d’Ésope, certains poètes, notamment Marie de France, nomment « ysopet » (Isopets ou Ésope) leurs
recueils de fables (les Isopets de Chartres, de Paris ou de Lyon sont restés célèbres).
Il existe par ailleurs de nombreuses traductions et adaptations en vers du Romulus , notamment l’Ésope d’Adémar de Chabannes ( XIe siècle) regroupant 67 fables,
l’Ésope de Wissembourg (63 fables, XIIe siècle), les Fabulae d’Odon de Chériton (81 fables, XIIIe siècle) et le Romulus de Vincent de Beauvais (29 fables, XIIIe siècle).
Les fables d’Avianus sont aussi largement adaptées, sous l’appellation d’« Avionnet ».
De nombreuses fables du monde entier — indiennes (celles de Bidpay) ou arabes (celles de Lokman, XIVe siècle) — sont également traduites pendant cette période.
À la Renaissance, Gilles Corrozet est le premier à produire une traduction libre en vers
des Fables d’Ésope ( les Fables du très ancien Ésope, mises en rithme françoise, 1542).
Par la suite, d’importants recueils de fables sont publiés, notamment les Hecatomythium (1495) et Hecatomythium secundum (1499) du poète italien Laurentius
Abstemius (Lorentio Astentio en italien) et le recueil de Fables de Gabriel Faërne (ou Gabriele Faerno), publié au XVIe siècle.
Au XVII e siècle, le Suisse Issac Nicholas Nevelet traduit les Fables d’Ésope en latin (reprises par Jean Beaudoin dans les Fables d’Ésope phrygien, 1631) tandis qu’un avocat, François Pithou, exhume et fait publier en 1596 par son frère Pierre les Fables
de Phèdre, oubliées depuis des siècles.
Jean de La Fontaine, ayant à dessein de transformer le genre — considéré jusqu’alors comme dépourvu de dignité littéraire — et d’ajouter à son seul rôle didactique une réelle vocation littéraire, choisit la fable,
grâce à laquelle il entrevoit la possibilité de pratiquer une poésie naturelle, spontanée, pleine d’élégante simplicité, propre à plaire au public des salons.
Dès la publication du premier livre des Fables, une véritable mode est lancée : « Il n’y a pas
d’instruction qui soit plus naturelle et qui touche plus vivement que celle-ci », écrit l’académicien Antoine Furetière en 1671.
Le nom de Jean de La Fontaine s’inscrit ainsi au terme d’une longue histoire du genre et ses Fables sont largement inspirées
des fables d’Ésope, de Phèdre et de tous leurs héritiers ainsi que de celles de Bidpay.
Cependant, en le renouvelant de façon magistrale, le fabuliste a permis au genre d’atteindre son apogée.
4. 4 Après les Fables de La Fontaine
Les imitateurs de Jean de La Fontaine ont été légion, mais peu d’entre eux ont atteint sa renommée : ni les Fables (1727-1738) de John Gay, ni celles de Gotthold Ephraïm Lessing (1759), ni les Fabulas literarias (1782) de Tomás de Iriarte.
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