« Et l'ordre des choses veut que, dès qu'un étranger puissant entre dans un pays, tous ceux qui y sont les moins puissants se rallient à lui, mus par l'envie qu'ils portent à qui les a dominés par sa puissance ».
Publié le 17/01/2011
Extrait du document
Cette phrase est extraite de l’œuvre majeure de Machiavel, Le Prince. Par ces quelques mots, l’auteur tente de nous montrer l’impact fondamental de la puissance. Il semblerait que les hommes les plus faibles se rattachent naturellement (« l’ordre des choses «) au puissant ; fasciné, attirés… On peut dès lors imaginer à quel fin peut-être utilisé cela. Les personnes les plus faibles vont se rallier à cet étranger puissant, non pas en faisant appel à leur raison, mais seulement pour le fait qu’il puisse les dominer par sa puissance. Mais qu’est ce qui pousse les individus à s’allier à une personne totalement étrangère pour sa seule puissance ? Quelles sont les caractéristiques de cette puissance pour obtenir ainsi une adhésion immédiate des plus faibles au plus puissant ? Qui plus est, on l’observe encore aujourd’hui, les plus faibles et les plus puissants (à nuancer cependant grandement dans nos sociétés démocratiques actuelles) sont souvent loin d’appartenir aux même origines sociales et ne partages ainsi pas les mêmes valeurs. Nous pouvons répondre à toutes ces questions en en posant qu’une d’ordre plus général : Qu’engendre l’arrivée d’un étranger puissant dans un pays ?
Dans une première partie, nous étudierons cette fascination des plus faibles pour l’étranger puissant. Dans une deuxième partie, nous étudierons plus précisément comment cette « alchimie « entre puissant et faibles se réalise.
Il semble primordial de se pencher avant tout sur la spécificité de l’étranger puisque c’est avant tout lui qui fascine les plus faibles, quoique largement aidé par sa forte puissance. Un étranger est avant tout une personne qui au moment où elle est nommée ainsi n’est pas dans son pays d’origine. En effet, on la nomme ainsi car étrangère au pays où elle présente. Elle ne partage pas la langue, les coutumes… qui sont les variables faisant tenir ensemble les individus du pays où elle se trouve. Cet étranger n’aurait donc de points communs avec les individus du pays où il se trouve et c’est peut-être d’ailleurs en cela qu’il fascine, il est facilement visible puisqu’il n’est pas intégrer au sens strict du terme dans la société dans laquelle il se trouve. Il pourrait même être mal vu par la population car en effet la différence est souvent synonyme de discrimination, encore aujourd’hui. On voit donc bien que l’étranger ne fascine pas.
Lorsque l’étranger puissant fait son apparition au sein d’un pays, il est au centre des conversations, tout le monde parle de lui, non pas en le montrant du doigt comme un étranger mais comme une personne puissante, voire influente. Les individus l’envie en parlant de lui et le fait qu’il soir étranger ne fait pourtant pas naître en eux une jalousie entrainant une forme de haine. Les individus l’admirent et sont fascinés par sa puissance. Cette fascination peut être encore plus poussée lorsque le charisme est une des caractéristiques du puissant étranger. Fascinés par cette puissance dans un premier temps, les individus admirent ensuite celle-ci. Ce que nous dégageons ici s’inscrit dans la pensée de Machiavel. En effet, cette fascination qui devient admiration pousse les individus au respect de l’étranger puissant et lui donne ainsi un caractère légitime lui permettant de prendre des directives qu’il n’aurait pas eu l’occasion de prendre s’il n’était pas assez puissant et respecté par le peuple. On observe ici le caractère pervers de ce processus. Fascinant et admiré, l’étranger va ensuite faire l’objet d’une autre réaction du peuple. En effet, le peuple va tenter de l’approcher, de faire partie de son cercle restreint de connaissances. Pour des raisons de privilèges et de sécurité il vaut mieux être près des puissants plutôt que des faibles. Comme nous l’avons dit précédemment, seuls les plus faibles que lui tenteront de se rapprocher. Les plus puissants que lui, ou autant n’y verront soit aucun intérêts, ou seront trop « digne « pour le faire. Si les individus se rapprochent des personnes les plus puissantes, s’est que ces personnes sont les plus à même de les protéger d’une quelconque attaque extérieure. Ce rapprochement peut aussi se faire lorsque la puissance de l’étranger s’exprime avec un caractère autoritaire que le peuple craint. Il serait en effet plus raisonnable de se lier au plus puissant plutôt que de se liguer contre lui lorsque l’on est le plus faible, car nous serions dans l’incapacité d’y faire face. Cette envie de se rapprocher du plus puissant semble être plus raisonnée, à l’inverse de la fascination et de l’admiration. Cependant, il reste difficile d’entrer dans le cercle restreint de connaissance de l’étranger puissant et cela peut parfois prendre du temps.
Dans le cadre de l’œuvre de Machiavel, de cette adhésion des plus faibles envers le puissant découle quelque chose de plutôt pervers. Les moins puissants vont se rattacher à l’étranger en adoptant la même vision et les mêmes idées que lui sans faire réellement appel à leur raison. Afin de se rapprocher de cette personne puissante comme nous l’avons vu avant, il convient de lui montrer notre accord, notre compréhension envers ses choix et ses idées. Le désaccord de notre personne envers lui ne produira l’effet contraire, la personne nous rejettera. Ainsi, même si nos idées sont en contradiction, voire en totale opposition, avec celles de l'étranger, il nous faudra alors surmonter et surpasser cet obstacle en reniant, en quelque sorte, ce que nous pensons pour que nos idées se mettent en conformité avec celles de l'étranger. Cette vision complètement pervertie que l’étranger peut utiliser par le biais de sa puissance les individus comme bon lui semble en s’accaparant leur raison est totalement en accord avec la politique de Machiavel. Par sa puissance, l’étranger est capable de nous faire agir et de nous faire dire des choses contraire à se que nous pensons réellement. Sa puissance, qui peut servir à nous protéger, à nous octroyer des privilèges pécuniaires, à être en sécurité… ne doit pas être remise en cause sous peine de perdre ses privilèges. L’individu est toujours maître de ses pensées, mais ses actes et paroles appartiennent à l’étranger puissant. Il semblerait qu’avant d’agir, on doive se reporter à l’étranger. C’est en se reportant à lui qu’on sait ce qu’on doit dire ou faire. On a affaire ici à une certaine forme de sadisme de la part du peuple puisque c’est lui qui veut cela. On se pense libre de le faire mais pourtant on confit nos dire et faits au « tout-puissant «. L’individu se prive lui-même de sa propre liberté, du moins, il l’a réduit considérablement. Mais pourquoi un tel choix ?
L’étranger puissant, s’il na pas d’effort à fournir pour obtenir l’adhésion des individus ne devra pas les décevoir ou rompre la confiance qui s’est instaurée entre eux, au risque de perdre une grande part de sa puissance et d’être remplacé par un autre étranger puissant ou simple personne puissante.
Par l’analyse de cet extrait tiré de l’œuvre majeur de Machiavel, on a pu étudierle processus qu’engendre l’arrivé d’un étranger puissant dans un pays. Si l’adhésion est un processus qui semble naturel du point de vue des moins puissant et sans effort du point de vue de l’étranger puissant, son acquisition nécessite d’être entretenue. Il ne faut pas tenir pour acquise sa puissance et être suffisamment « Machiavélien « pour l’entretenir et ne pas dérivé vers un régime autoritaire trop instable pour l’étranger puissant qui aurait prit le pouvoir.
Liens utiles
- « Et l'ordre des choses veut que, dès qu'un étranger puissant entre dans un pays, tous ceux qui y sont les moins puissants se rallient à lui, mus par l'envie qu'ils portent à qui les a dominés par sa puissance ».
- Sujet : « Et l’ordre des choses veut que, dès qu’un étranger puissant entre dans un pays, tous ceux qui y sont les moins puissants se rallient à lui, mus par l’envie qu’ils portent à qui les a dominés par sa puissance ».
- Le désordre est le meilleur serviteur de l'ordre établi. ... Toute destruction brouillonne, affaiblit les faibles, enrichit les riches, accroît la puissance des puissants. Le Diable et le Bon Dieu (1951) Sartre, Jean-Paul. Commentez cette citation.
- En quoi le sport qui permet à différents acteurs d’affirmer leur puissance est un enjeu stratégique international mais qui laisse des pays en marge ?
- La technique trouble-t-elle l'ordre des choses ?