essence (philosophie) - philosophie. 1 PRÉSENTATION essence (philosophie), en philosophie, terme qui désigne le caractère propre ou la nature même d'un objet, d'un être ou d'une idée, par opposition à ses propriétés contingentes. Ainsi, si l'on admet que l'essence de Socrate est d'appartenir au genre humain, dire qu'il est un être humain est alors une vérité nécessaire. 2 QU'EST-CE QUI CONSTITUE L'ESSENCE ? 2.1 Les propriétés La thèse selon laquelle les objets ont des essences peut être fondée comme suit. On est en droit de supposer qu'un objet pourrait ne pas avoir certaines des propriétés qu'il a de fait. Par exemple, Socrate pourrait ne pas avoir été exécuté par les Athéniens en 399 av. J.-C. et mourir paisiblement dans son sommeil quelques années plus tard. Néanmoins, pour pouvoir encore parler de Socrate, on ne peut pas à loisir multiplier les propriétés qui pourraient lui avoir fait défaut. Supposons que quelqu'un suggère que Socrate aurait pu être une girafe et non un être humain. Personne ne contestera que nous aurions alors tout simplement cessé de parler d'une possibilité réelle concernant le Socrate historique. Le Socrate historique -- cet individu en particulier -- ne saurait avoir été autre chose qu'un être humain. C'est pourquoi le fait d'avoir été un être humain appartient à l'essence de Socrate, contrairement au fait d'avoir été exécuté en 399 av. J.-C. 2.2 L'identité et la singularité Certains philosophes considèrent que l'essence d'un objet est ce qui constitue son identité, autrement dit ce qui fait que l'objet est ce qu'il est. Son essence peut consister dans son appartenance à une espèce naturelle, comme dans l'affirmation selon laquelle Socrate est humain par essence. D'autres penseurs affirment que chaque objet a une essence individuelle unique. Un cas d'essence individuelle spéciale, mais controversée, appelé « singularité «, est la propriété qu'a un objet d'être précisément cet objet. Manifestement, s'il existe des singularités, c'est qu'il y a des propriétés qui ne pourraient faire défaut à un objet. 3 L'ESSENCE DANS L'HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE 3.1 Aristote Pour Aristote, la définition d'une chose énonce son essence. On ne parvient à la compréhension scientifique d'une chose que si l'on saisit son essence. Aristote identifie l'essence de l'objet à sa forme substantielle : elle est ce qui fait que l'objet est ce qu'il est. L'essence d'un objet est l'espèce de chose qu'il est : ainsi, l'essence de Socrate est d'être un être humain et l'essence d'une maison est d'être un abri pour les hommes et les biens. 3.2 Locke Ce lien étroit, manifeste dans la pensée d'Aristote, entre l'essence, la définition et les critères qui permettent d'identifier l'appartenance d'une chose à une espèce est remis en question par John Locke. Celui-ci introduit une distinction entre l'« essence réelle « d'un objet, qu'il définit comme la constitution interne de ses parties sous-jacentes, et son « essence nominale «. L'essence nominale de l'objet est l'idée qui correspond au nom de l'objet dans notre esprit. Cette idée est une liste, plus ou moins exhaustive, des qualités sensibles connues de l'objet. Étant donné que l'essence réelle d'un objet nous demeure inconnue, selon Locke, les critères qui nous permettent d'identifier un objet sont distincts de sa nature sous-jacente. 3.3 Quine Le débat sur l'essence dans la philosophie contemporaine est centré sur la question de savoir quel type de nécessité est impliqué dans l'affirmation selon laquelle une propriété essentielle est une propriété qu'un objet doit avoir. Wilard Quine prend position contre les essences en soutenant que ce qui fait la nécessité d'une chose n'est pas une particularité de l'objet en question, mais plutôt une particularité de la façon dont on le décrit. Par exemple, on peut faire référence au nombre « neuf « par le chiffre « 9 « ou, étant donné qu'il y a neuf planètes dans le Système solaire, par l'expression « le nombre de planètes «. Néanmoins, si la phrase « 9 est nécessairement plus grand que sept « est vraie, la phrase « le nombre de planètes est nécessairement plus grand que sept « est fausse, puisqu'il a pu exister un nombre de planètes inférieur à sept. La nécessité, affirme Quine, est fonction de la façon dont on décrit l'objet concerné. 3.4 Kripke Le philosophe américain Saul Kripke fait valoir à l'encontre de Quine que l'exemple est lié à une particularité de la description (« le nombre de planètes «). Kripke appelle ce type de description « désignateur faible « : il ne désigne pas le même objet dans tous les mondes possibles, c'est-à-dire dans toutes les conditions possibles du monde réel. À l'opposé, les termes désignant une espèce naturelle et les noms propres sont des « désignateurs rigides «. Par exemple, le terme « eau « désigne une substance qui est H2O dans tous les mondes possibles. L'eau est donc nécessairement H2O, et cela indépendamment de la façon dont nous décrivons l'eau. Aussi, pour Kripke, les espèces naturelles comme l'eau ont des essences que l'on peut découvrir empiriquement. Kripke prend également position en faveur des essences individuelles qu'il lie à la nécessité des origines d'une chose, par exemple, d'un individu qui est issu d'un ovule fertilisé particulier et de sperme fait d'une série d'atomes particulière. La discussion philosophique moderne de l'essence est enchâssée dans un réseau de problèmes afférents portant sur la modalité, les théories de l'appellation et de la référence, les espèces naturelles et les lois de la nature. Voir aussi métaphysique ; nominalisme ; phénoménologie. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.