Dissertation Portant Sur La Socièté Sous L'ancien Régime, Extrait D'une Citation De Michel Suriano
Publié le 17/01/2011
Extrait du document
« La nation est partagée en trois ordres, le premier est le clergé, le second est la noblesse «, citation de Michel Suriano ambassadeur de Venise lors de son voyage à Paris en 1561. Au cours de l’année qu’il passa en France, il se pencha sur les relations que possédaient les trois ordres entre eux mais aussi sur les rapports que ceux-ci entretenaient avec l'État. Durant cette période, la Reine mère Catherine de Médicis assuma la régence lors de la mort de son fils François II pour Charles IX, alors âgé de 10 ans. Immédiatement, elle occupa une place prépondérante dans les affaires politiques françaises. Dès 1562, quand éclatèrent les guerres de religion entre catholiques et protestants, elle n’eut de cesse de trouver des accords entre les opposants afin de pacifier le territoire Français. Elle fut à l'origine de la signature de nombreux traités de paix, néanmoins elle fut aussi paradoxalement, l’instigatrice du massacre de la Saint-Barthélemy.
Un grand nombre d’évènements ponctuèrent cette époque et parmi eux on peut trouver, la réunion des États généraux en janvier 1561 à Orléans auxquels assistèrent les trois ordres et qui fut organisée en partie, à cause des mêmes conflits que combattait la Reine. Au cours de cette année, on assista de nouveau à une réunion des États Généraux à Pontoise lors de laquelle le roi demanda l’autorisation d’imposer au peuple des impôts supplémentaires, en raison du coût onéreux des guerres menées par le royaume. Suite à un refus de leur part, le roi profita de l’assemblée générale du clergé qui eut lieu en Octobre à Poissy, pour lui imposer une participation financière pour remédier aux dettes de l'État.
La phrase de Michel Suriano est explicite, dans la mesure où elle met en relief le fait que « la nation « n’accordait que très peu de considération au Tiers État. En effet, on peut constater qu’il n’est pas problématique pour lui de désigner le premier ainsi que le second ordre, celui du clergé et de la noblesse. Cependant, en ce qui concerne le troisième ordre composé d’une multitude de « conditions différentes «, il ne semble pas lui attribuer un statut particulier ou bien une appellation spéciale et le désigne « sous le nom général de peuple «. Ainsi, on peut s’interroger sur l’organisation des trois ordres au sein de la nation sous l’Ancien Régime. On peut constater qu’avec l’Ancien Régime qui s’étend de la fin de la Renaissance (XVI) à la Révolution française (XVIII), deux ordres profitent exclusivement des privilèges que lui accorde cette société : le clergé (A) ainsi que la noblesse (B) tandis qu’un troisième ordre, le « commun état « (II) est déconsidéré malgré son rôle essentiel au sein de la nation (A). C’est ce sentiment d’injustice, qui le mènera jusqu'à la révolution (B).
I. LES ORDRES PRIVILEGIES SOUS L’ANCIEN REGIME
Le royaume était divisé en trois ordres de la société qui établissaient une cohérence réelle et fonctionnelle, chacun ayant une place qui lui était assignée. Ainsi, un premier ordre le clergé, était voué à la prière (A) aux cotés d’un second ordre la noblesse, prédestinée à combattre (B).
A. Le clergé, le premier ordre de la nation
Au XVI ème siècle, le clergé était constitué de différentes origines sociales allant de la noblesse au tiers état. Avec l’apparition du Gallicanisme défini par Pierre Pithou en 1594, le Roi était considéré comme le chef extérieur de l’église. En effet, cette notion instaura des règles réservant à l'église de France une autonomie administrative temporelle et conféra au roi, un droit de regard sur les affaires de l'église. Ce sont ces relations étroites entre l’état et l’église, qui contribuèrent à la création d’un ordre public ecclésiastique dans lequel le pouvoir royal n’intervenait pas pour tout ce qui concernait la croyance, la pratique, le service religieux mais qui régissait en contre partie tout ce qui relevait de la vie de l'église dans ces manifestations extérieures qu'elles soient matérielles, financières, l’ordre public était soumis aux pouvoirs publics et donc à la royauté.
La fonction première du clergé était celle de prier pour soutenir ceux qui combattaient, afin qu'ils soient victorieux et qu'ils fassent régner la paix dans le royaume. Ils priaient également pour ceux qui travaillaient soit les paysans, les artisans ruraux etc... . Les clercs possédaient donc une fonction symbolique essentielle, puisqu’ils incarnaient les protecteurs nés du royaume. L'église dès l'époque médiévale, bénéficiait de dons pour l'entretien du culte et pour pratiquer la charité. Par conséquent, l'église était propriétaire de nombreux biens tels que des monastères ou encore des terres. Le clergé bénéficiait d’avantages tels que l’immunité fiscale qui était fondée sur l'imminent service que ce dernier rendait à l'Etat. Le clergé était exempté d'impôt direct. De plus, il percevait des revenus issus d’un impôt : la dîme. Perçue sur les revenus d'origine agricole mais aussi sur une portion de l’élevage, le montant de la dîme pouvait connaître des variations à travers le royaume. Afin d’ accomplir leur mission de prêtre, de s'occuper des objets de cultes de l'église ainsi que pour limiter les inégalités, les curés de campagne comme de ville, percevaient la portion congrue dont le montant fut revalorisé en 1686 et fixé a 300£.
On reconnaît également au second ordre incarné par la noblesse, une supériorité que n'ont pas forcément ceux qui travaillent ainsi que des privilèges.
B. La noblesse, le second ordre de la nation
La noblesse sous l’ancien régime, ne représentait qu’une toute petite fraction d'habitants au sein du royaume. Elle était un ordre qui possédait comme le premier, des origines variées (militaire, aristocratique, riches marchands..). Celle-ci ne comportait donc pas d’homogénéité économique et regroupait à la fois un ensemble de familles immensément riches ainsi qu’à son extrémité, des familles immensément pauvres. Perçue comme l’ordre guerrier de la nation, la noblesse avait pour fonction d’assurer la protection du roi, sa tache considérée comme digne, lui procurait tous les honneurs. La noblesse pouvait s’acquérir que de deux façons bien définies : l’hérédité, (l'enfant devait être né d'un père noble et d’un mariage légitime) et l’anoblissement, (soit par lettres patentes par lesquelles le roi reconnaissait à un sujet, sa qualité de noble, soit par charge, un sujet pouvait être anobli grâce à l'exercice de certaines charges civiles ou militaires mais aussi par le biais d’autres moyens…).
Les nobles avaient tout comme les clercs, des privilèges qui s’étendaient sur divers domaines. Les privilèges de fonctions, réservaient à la noblesse un certain nombre de fonctions civiles, militaires, ou ecclésiastiques, qu’eux seuls pouvaient exercer. Le second ordre, bénéficiait également d’avantages judiciaires qui lui donnaient la possibilité de porter une cause devant des juges non de première instance, mais directement devant des juges de plus haute importance. En cas de condamnation à mort, un châtiment « plus doux « pour l’époque leur était aussi réservé, la décapitation. Enfin, la noblesse disposait de droits féodaux qui lui permettaient d’exiger de la paysannerie un paiement de redevance en nature ou en argent mais aussi, d'une autonomie fiscale, exemptée d'impôts directs.
A la veille de la révolution, la noblesse fut vivement critiquée, car on considérait que son immunité fiscale n'avait plus de fondements puisqu’elle n'était plus amenée à combattre, mais également parce que depuis quelques décennies, la noblesse avait réactivé ses droits féodaux originaires de l’époque médiévale et taxait lourdement les revenus de la paysannerie.
Ce groupe social appartenait lui-même à un ordre fondamental mais jugé comme inférieur aux autres ordres : le Tiers Etat.
II. LA PLACE D’UN ORDRE PRIMORDIAL MAIS DECONSIDERE : LE TIERS ETAT
Le Tiers Etat possédait une fonction essentielle dans la société, particulièrement d’un point de vue économique, mais il restait cependant un ordre non reconnu et absent de la scène politique du royaume. C’est cette accumulation d’injustices face à ses pairs pendant près de deux siècles, qui poussa probablement ce dernier à la révolution (B).
A.) Le Tiers Etat, un ordre incontournable mais délaissé
Qu'est-ce que le Tiers état ? - Tout. Qu'a-t-il été jusqu'à présent dans l'ordre politique ? - Rien. Que demande-t-il ? - À être quelque chose. « écrivit Sieyes l’année de la Révolution. Avec 25 millions d’individus rattachés à cet ordre, le Tiers Etat représentait la quasi totalité de la population française de l’époque. Composé du « commun «, le Tiers se définissait toujours négativement comme au Moyen Age : il englobait tous ceux qui n’étaient ni clercs, ni nobles et incarnait la diversité. De par le fait qu’il était prédestiné aux activités et au travail, le Tiers Etat était indiscutablement l’ordre qui contribuait le plus à l’apport de richesses à la nation. Il était également l’ordre qui devait subvenir aux besoins des deux autres, à qui il fournissait l’ensemble de leurs denrées alimentaires et de leurs biens. L’ensemble de la société féodale ainsi que les privilèges des clercs et des nobles étaient alimentés par le Tiers Etat qui jouait donc, un rôle économique majeur. Cette classe était en faite condamnée à être la plus « faible « par sa condition même, car en plus d’être victime des deux autres ordres à qui elle devait taille, capitation, vingtième, gabelle, les plus pauvres de cette société délaissée (notamment la paysannerie) vivaient au rythme des saisons, subissant ainsi la tyrannie du climat tout en continuant malgré tout, à être en proie à la fiscalité qui leur était imposée.
En outre, bien que la richesse économique du pays était incontestablement issue du fruit de son travail, celui-ci ne possédait aucune influence en ce qui concernait la direction des affaires politiques de l'Etat. Conscient de supporter à lui seul l'enrichissement du clergé et de la noblesse, le « commun état « souhaitait être reconnu et obtenir une place à la mesure de sa contribution qu’on ne lui accorda pas jusqu’à la révolution.
B.) Le dernier ordre à la veille de la Révolution française
Insociabile regnum, soit « la prérogative royale ne se partage pas « écrivit Tacite. En effet, elle ne se partageait pas en France sous l’Ancien Régime: le monarque était parfaitement souverain et seul le clergé et la noblesse étaient entendus par ce dernier. La vie n'a jamais été simple pour le tiers état et sa tolérance vis à vis d'un pouvoir royal qui l'ignorait se restreignait d'avantage chaque jour. Ne bénéficiant d'aucune structure représentative, il était représenté aux états généraux et provinciaux uniquement par les bourgeois soit les officiers, les lettrés et les professions libérales. La paysannerie elle, était absente ou bien sous représentée. Le Tiers-état a revendiqué alors, au moyen de la bourgeoisie des villes, une reconsidération de ses pouvoirs et de ses droits après une évolution économique qui avait conduit à une nouvelle redistribution des richesses au XVIIIème siècle.
La classe la plus aisée du troisième ordre, la bourgeoisie, a joué un rôle important dans le processus révolutionnaire dans la mesure où celle-ci était frustrée de ne pas être représentée malgré son appartenance à de nombreuses professions intellectuelles. Le roi n’incarnait plus les intérêts de la Nation qui avait pris conscience de son existence en dehors de lui. Le roi perdit ainsi progressivement le fondement de sa souveraineté et, l’absolutisme, qui était jusqu'alors considéré comme "nécessaire", fut désormais dénoncé comme "usurpateur". Le 17 juin 1789, le Tiers Etat se proclama Assemblée Nationale et rédigea le 4 Août la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen dans laquelle il y inscrit que la Nation était la Loi et non plus le roi. Le 6 juillet, l’Assemblée se déclara constituante. Ce fut la fin de l’ancien régime : on assista au transfert de la souveraineté à la Nation qui, auparavant, était détenue légitimement et sans partage par le roi et les classes privilégiées.
De pouvoir constituant, le roi devint pouvoir constitué. En définitive, il est plus que probable, que la Révolution a davantage été menée par des individus éclairés, mais les révoltes paysannes, notamment celle des croquants, paysans pauvres du Limousin en 1637, ont assurément provoqué une prise de conscience chez tous, de la nécessité de réformer les institutions de l’époque.
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