Dans ses Conjectures sur le début de l'histoire humaine, publiées en 1786, Kant s'efforce d'interpréter d'une manière rationnelle les textes sacrés pour montrer qu'en définitive l'homme est seul responsable de son destin et qu'il ne faut pas accuser la Providence.
Publié le 22/10/2012
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«
117 Les débuts de l'histoire humaine
puisque je me lance ici simplement dans un voyage de plaisance,
puis-je demander une faveur, celle d'utiliser comme carte un texte
sacré et de
rn 'imaginer en même temps que mon itinéraire, que je parcours sur les ailes de 1 'imagination, mais non sans garder
un fil conducteur relié par la raison à 1 'expérience, retrouve
exactement le même chemin déjà tracé dans ce texte d'un point
de vue historique.
Le lecteur consultera les pages de ce texte
(Genèse 1, chap.
n-v1), et vérifiera pas à pas si le chemin où
s'engage la philosophie en suivant des concepts s'accorde avec
celui que l'histoire indique.
Si on ne veut pas se perdre en de pures conjectures,
il faut
prendre pour point de départ ce que la raison humaine ne saurait
déduire d'aucune cause naturelle antécédente, c'est-à-dire
l'exis
tence de l'homme, et encore faut-il le considérer à son complet
développement, car il doit se passer des soins maternels; nous
admettons un couple, afin que puisse se propager l'espèce; mais
un couple unique, pour éviter que la guerre n'éclate immédia
tement entre hommes vivant en voisinage, mais étrangers les uns
aux autres, et aussi pour ne pas rejeter sur la nature la responsa
bilité
d'avoir par la diversité des souches négligé 1 'organisation
la plus parfaite du point de vue de la sociabilité, considérée
comme
fin essentielle de la destinée humaine; car 1 'unité de famille d'où devaient descendre tous les hommes fut sans doute le meil
leur agencement en vue de cette fin.
Je situe ce couple à l'abri des attaques des animaux de proie, en un lieu où la nature
pourvoit abondamment à sa nourriture, c'est-à-dire dans une
sorte de
jardin, sous un climat d'une douceur toujours égale.
Et qui plus est, je le considère seulement après qu'il a fait un pas
considérable dans 1 'art de se servir de ses forces, et par conséquent
je ne pars pas de sa nature à 1 'état absolument brut; car le lecteur
trouverait aisément trop de conjectures et trop peu de vraisem
blance, si j'entreprenais de combler cette lacune qui embrasse
probablement un très grand laps de temps.
Le premier homme
pouvait donc
se tenir debout et marcher; il savait parler (Cf.
Gen.
Ch.
II, V.
20), je dis même s'exprimer, c'est-à-dire parler
en enchaînant des concepts (V.' 23), donc penser.
Autant d'apti
tudes techniques qu'il a dû acquérir entièrement par lui-même
(car, si elles lui étaient innées, elles seraient aussi héréditaires,
ce qui est contredit
par l'expérience); et cependant j'admets
dès maintenant qu'illes possède pour ne faire entrer en considé
ration dans sa conduite que le développement de 1 'élément.
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