CONTINUATION DES AMOURS RONSARD
Publié le 11/09/2006
Extrait du document
Introduction:
Dans une langue élaborée et étincelante, propre aux acrobaties rhétoriques et aux complexités de tous genres, le recueil de Cassandre, nous l'avons vu, se compose de décasyllabes au rythme dansant. Cependant, l'héroïne du second livre est une paysanne, Marie, et le style qui la chante, familier et enjoué, se différencie de celui qui convenait à Cassandre. Ronsard, dans la Continuation des Amours, abandonne le décasyllabe et adopte l'alexandrin au profit d'une écriture plus simple, toutefois encore liée à la tradition courtoise. Ce sonnet est composé de deux quatrains accordant une place toute particulière à l'être aimé et de deux tercets. Dans ce sonnet, Ronsard place l'objet de son amour au centre de ses préoccupations, formulant ses pensées, ses sentiments avec simplicité Nous pouvons alors nous demander en quoi Ronsard, dans ce sonnet numéro quinze, développe-t-il ses sentiments entre simplicité et maniérisme, artifice et sincérité.
I] Le maintien d'un cadre traditionnel, entre tradition courtoise et néo-platonisme
Maintien de la tradition courtoise Ce sonnet propre à la Continuation des Amours, inscrit sa dimension poétique dans l'héritage courtois, faisant intervenir l'influence de Pétrarque déjà fortement présente dans les Amours. La construction symétrique du sonnet est préservée, avec la présence d'anaphores, caractéristiques des Amours. La symétrie n'est cependant jamais totale afin d'accorder un certain dynamisme à la pièce. -Les deux premiers quatrains de ce sonnet accordent une place toute particulière à la dame, unique cible amoureuse du poète, illustrée ici par l'anaphore du pronom personnel « Vous «. La structure anaphorique du poème est tout à fait Pétrarquiste. Ce pronom personnel désignant donc l'objet de son amour est tout d'abord mis en valeur par sa position dans le vers: dans le premier quatrain et dans le premier et deuxième vers du second quatrain, le pronom « vous « est situé à la césure, coupe centrale de l'alexandrin qui marque une pause après la sixième syllabe. Aussi le poète octroie-t-il une place centrale à sa bien aimée, témoignant de l'attachement qu'il lui porte. Placé en tête de vers aux second et troisième vers du second quatrain, Marie est alors une nouvelle fois illustrée avec insistance. D'autre part, dans le premier quatrain et dans le premier et dernier vers du second quatrain, ce pronom est encadré syntaxiquement de manière à être davantage mis en valeur. Il est précédé de la conjonction « sinon « qui équivaut à la locution « si ce n'est que « permettant de rehausser encore plus la position de Marie. Il est également suivi de la négation « ne « qui produit ici un accent d'insistance renvoyant sur l'importance du pronom « vous « qui précède. Cette position permet également le rapprochement de la personne du poète avec la Dame. En effet, une phrase plus simple aurait été celle-ci « Ma plume ne sait autre sujet que vous «. Cependant, la désignation de l'être aimé aurait été située en fin de phrase et son importance aurait dès lors été bien amoindrie. -Dans ce sonnet, toute pensée et geste du poète aboutit à la Dame. Ce poème s'inscrit ainsi dans une permanence de l'esprit médiéval , exploitant les thèmes du service et de la fidélité. Ronsard mentionne tout d'abord diverses parties de son corps (« mon pié «, « ma langue «, « mon oeil «) toutes reliées au pronom « vous « désignant l'objet de son amour ce qui suggère une idée de soumission: le poète est ainsi mentalement mais également physiquement lié à Marie. S'inscrivant dans la lignée de Pétarque, Ronsard apparaît tel l'amant vassal qui cherche à s'élever. Ce sonnet est relié au thème de la lyrique courtoise, passant de l'évocation de l'être aimé à son idéalisation. Aussi jaillit une rhétorique de la passion avec l'emploi d'hyperboles: les sentiments sont alors exaltés. Les deux derniers tercets de ce sonnet , composés beaucoup plus librement que les deux premiers quatrain, donnent une impression de continuité et de legato. Le poète mentionne qu' « il aime trop mieus cent fois qu'il ne le dit «. Les mots ne suffisent donc pas à représenter la puissance de ses sentiments et l'association des deux adverbes « trop « et « mieux « suivis par la suite par l'emploi du nombre « cent « souligne le caractère excessif de la pulsion amoureuse, propre à la manière Pétraquiste de chanter l'amour. Si une certaine idéalisation de l'être aimé apparaît ici, les tensions du désir lié à la souffrance n'en sont pas moins absentes: toujours de manière hyperbolique, le poète affirme dans les trois derniers vers (..) -La souffrance du poète: L'empreinte du Néoplatonisme -Le pétrarquisme se conjugue avec le néoplatonisme de la Renaissance. Le néoplatonisme introduit un seul visage de l'amour, un idéal de l'amour. Pour les néoplatonistes, l'amour n'est pas une émotion chaude, passionnante et folle mais une émotion tranquille, contemplative et transcendante. Les néoplatonistes voient l'amour comme un chemin vers la vérité absolue et vers la perfection. Aussi Ronsard, au vers huit, mentionne-t-il que « seulement en vous (Marie), tout mon rond se parfait.. «. La sphère est un objet qui, tout au long de l'histoire humaine, a passionné, incarnant beauté, totalité et perfection divine. L'amant néoplatoniste est donc toujours fidèle et constant dans son amour. -La vue est un sens primordial propre au néoplatonisme. C'est en effet par le regard que l'amour nait.
II] Infléchissement de la poétique Ronsardienne et nouveauté du style dans la Continuation des Amours
Si les liens avec le Pétrarquisme ne sont pas définitivement rompus et si nous avons pu considérer la transmission poétique qui s'est opérée à partir des traditions courtoises, nous pouvons cependant noter l'infléchissement qui se produit par rapport à la poétique des Amours. Un tournant poétique Du décasyllabe à l'alexandrin Comme nous l'avons déjà mentionné, Ronsard, dans la Continuation des Amours, rompt avec certains traits caractéristiques du recueil des Amours. Ce sonnet est propre à la continuation: En effet, il est tout d'abord composé en alexandrins. L'alexandrin, plus ample, a détrôné le décasyllabe en tant que grand vers français à la Renaissance. Ronsard le qualifie de vers héroïque dans ses Hymnes de 1555. Et il en confirme la dignité dans son Abrégé de l'art poétique français (1565). « Les alexandrins tiennent la place en nostre langue, telle que les vers heroïques entre les Grecs & et les Latins (..). La composition des Alexandrins doibt estre grave, hautaine, & (si fault ainsi parler) altiloque, d'autant qu'ilz sont plus longs que les autres, & sentiroyent la prose, si n'estoyent composez de motz esleus, graves, & resonnans, & d'une ryme assez riche, afin que telle richesse empesche le stille de la prose, & qu'elle se garde tousjours dans les oreilles jusques à la fin de l'autre vers. « « Le beau style bas « Le recueil de la Continuation des Amour diffère des Amours de 1552. De fait, le style élevé des Amours est abandonné au profit d'un « beau style bas « pour chanter les amours de Marie. Le ton devient ainsi « plaisant « et « populaire «, laissant place à un lexique plus simple, plus léger et moins recherché. Les seules références au « pi é « au vers 2 et à la « langue « au vers 3 suffisent à en témoigner. Se déploie un lexique plus brut et plus naturel qui va de pair avec la recherche d'une sincérité. De cette manière, Ronsard rompt avec les complexités voire les obscurités dont il usait dans les Amours. Les métaphores et allégories se font moins présentes. On quitte ainsi le style élevé qui est celui du mouvement Absence de toute perspective charnelle Contrairement à la poétique des Amours, l'amour est ici conçu comme une expérience spirituelle. La poésie est le truchement par lequel l'amant-poète va parvenir à la Beauté et à la Vertu. La sexualité est donc bien moins affirmée. (Ronsard )
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Le néoplatonisme introduit un seul visage de l'amour, un idéal de l'amour.
Pour les néoplatonistes, l'amour n'est pas une émotionchaude, passionnante et folle mais une émotion tranquille, contemplative et transcendante.
Les néoplatonistes voient l'amourcomme un chemin vers la vérité absolue et vers la perfection.
Aussi Ronsard, au vers huit, mentionne-t-il que « seulement en vous(Marie), tout mon rond se parfait..
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La sphère est un objet qui, tout au long de l'histoire humaine, a passionné, incarnant beauté,totalité et perfection divine.
L'amant néoplatoniste est donc toujours fidèle et constant dans son amour.
-La vue est un sens primordial propre au néoplatonisme.
C'est en effet par le regard que l'amour nait.
II] Infléchissement de la poétique Ronsardienne et nouveauté du style dans la Continuation des Amours
Si les liens avec le Pétrarquisme ne sont pas définitivement rompus et si nous avons pu considérer la transmission poétique quis'est opérée à partir des traditions courtoises, nous pouvons cependant noter l'infléchissement qui se produit par rapport à lapoétique des Amours.Un tournant poétique Du décasyllabe à l'alexandrinComme nous l'avons déjà mentionné, Ronsard, dans la Continuation des Amours, rompt avec certains traits caractéristiques durecueil des Amours.
Ce sonnet est propre à la continuation: En effet, il est tout d'abord composé en alexandrins.
L'alexandrin,plus ample, a détrôné le décasyllabe en tant que grand vers français à la Renaissance.
Ronsard le qualifie de vers héroïque dansses Hymnes de 1555.
Et il en confirme la dignité dans son Abrégé de l'art poétique français (1565).« Les alexandrins tiennent la place en nostre langue, telle que les vers heroïques entre les Grecs & et les Latins (..).
Lacomposition des Alexandrins doibt estre grave, hautaine, & (si fault ainsi parler) altiloque, d'autant qu'ilz sont plus longs que lesautres, & sentiroyent la prose, si n'estoyent composez de motz esleus, graves, & resonnans, & d'une ryme assez riche, afin quetelle richesse empesche le stille de la prose, & qu'elle se garde tousjours dans les oreilles jusques à la fin de l'autre vers.
»« Le beau style bas »Le recueil de la Continuation des Amour diffère des Amours de 1552.
De fait, le style élevé des Amours est abandonné au profitd'un « beau style bas » pour chanter les amours de Marie.
Le ton devient ainsi « plaisant » et « populaire », laissant place à unlexique plus simple, plus léger et moins recherché.
Les seules références au « pi é » au vers 2 et à la « langue » au vers 3 suffisentà en témoigner.
Se déploie un lexique plus brut et plus naturel qui va de pair avec la recherche d'une sincérité.
De cette manière,Ronsard rompt avec les complexités voire les obscurités dont il usait dans les Amours.
Les métaphores et allégories se font moinsprésentes.
On quitte ainsi le style élevé qui est celui du mouvement
Absence de toute perspective charnelle Contrairement à la poétique des Amours, l'amour est ici conçu comme une expériencespirituelle.
La poésie est le truchement par lequel l'amant-poète va parvenir à la Beauté et à la Vertu.
La sexualité est donc bienmoins affirmée.
(Ronsard ).
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