conscience - philosophie.
Publié le 08/05/2013
Extrait du document
«
monde pour nous, elle impose et développe tout un réseau de significations autour de nous qui oriente notre perception du monde.
4. 3 Karl Marx et le déterminisme social
En revanche, selon Karl Marx, « la conscience que chaque homme a de lui dépend du monde qui l’entoure et dépend surtout de l’état économique et matériel de la société.
La conscience est le reflet de la société et elle subit tous ses
bouleversements.
» Dans l’histoire de la philosophie, l’origine de la conscience morale était tantôt considérée comme le résultat de directives extérieures progressivement assimilées par le sujet — l’éducation ou la volonté divine —, tantôt comprise
comme venant du sujet lui-même — la sensibilité ou la raison.
Avec Karl Marx et le matérialisme historique, c’est la conscience de soi qui est conditionnée par l’extériorité et qui s’offre comme un reflet du monde social.
L’idéologie comme « ensemble d’idées erronées produit par la classe dominante qui explique le monde à partir de son point de vue » subit aussi l’influence de la base matérielle et économique de la société : « Les hommes se sont toujours fait
jusqu'ici des idées sur eux-mêmes, sur ce qu'ils sont ou devraient, c'est d'après leurs représentations de Dieu, de l'homme normal, etc., qu'ils ont organisé leurs relations.
Les inventions de leur cerveau ont fini par les subjuguer.
Eux les créateurs, ils
se sont inclinés devant leurs créations.
»
Aux yeux du matérialisme marxiste, la conscience est prédéterminée et uniformisée par les conditions matérielles de son existence, à son insu.
Elle est dupée par la société qui forge pour elle des représentations spécifiques.
Les conditions de sa
légitimité dans le processus de connaissance restent encore à définir.
Notre conscience peut-elle en effet rester vierge de toute influence ?
5 LES LIMITES DE LA CONSCIENCE
5. 1 Conscience et subjectivité
À supposer que la conscience individuelle puisse s’épanouir au-delà de cette conscience collective que dénonçait Karl Marx, elle reste avant tout une instance qui donne sens, elle est par essence relative puisqu’elle découle de l’expérience de chacun.
La conscience est le reflet de la subjectivité, et par conséquent, elle ne peut pas être considérée comme un modèle de vérité absolue ni comme une expérience communicable à autrui.
De plus, nous n’avons pas toujours conscience de tout ou nous
pouvons être influencés par nos sentiments ou par des événements.
La conscience est tantôt partielle, tantôt sélective et tributaire de nos sens.
N’a-t-on pas le sentiment que plus on cherche à s’atteindre, plus le Moi recule ? Il semble que nous n’accédions qu’à certains aspects de notre personnalité, c’est le sens de la
célèbre formule de Rimbaud « Je est un autre ».
D’autre part, dire que la conscience révèle le sujet à lui-même, cela ne signifie pas qu’elle le révèle toujours clairement et totalement.
La conscience de soi est aussi limitée dans le temps : la prise de
conscience n’atteint que ce que je suis actuellement, même si elle peut être conditionnée par des événements passés.
La conscience est un mode subjectif de connaissance et nous avons bien d’autres moyens de nous connaître qui sont parfois plus
sûrs.
5. 2 Paradoxes de la conscience
Jean-Paul Sartre affirme : « ce que je suis par principe ne peut pas être objet pour moi », au sens où je ne peux être à la fois sujet et objet de ma connaissance.
La position sartrienne s’établit donc comme une négation du solipsisme cartésien.
La
connaissance de soi passe alors par ce qu’il nomme « l’intersubjectivité », c’est-à-dire par le regard d’autrui : ce n’est pas dans la solitude que l’on prend conscience de soi, mais au cœur du monde et des autres.
La conscience comme rapport à soi
devient également rapport à autrui.
Le face-à-face cartésien — entre soi et soi-même — serait donc conditionné par l’environnement affectif, intellectuel et social dans lequel il a lieu.
Le « Je » n’est-il alors qu’un jeu de mots, qu’une illusion ou qu’une
fiction ? Peut-on désigner la réalité à laquelle il renvoie ?
La connaissance de soi, loin d’être acquise, est un défi permanent ; c’est ce que nous rappelle l’exhortation de Socrate : « connais-toi toi-même ».
La connaissance de soi apparaît comme un idéal jamais atteint, objet d’un progrès à l’infini puisque la
conscience de soi est déjà une gageure.
Au-delà, la conscience est marquée par un paradoxe irréductible : parce qu’elle permet à l’homme de répondre de soi, elle l’« élève infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivants » et lui confère ainsi une dignité propre, mais parce qu’elle
l’arrache à l’innocence du monde naturel, l’homme prend du même coup la mesure de sa misère.
Blaise Pascal a symbolisé cette conscience métaphysique et malheureuse dans ses Pensées en comparant l’homme à un roseau pensant : « il ne faut pas
que l’Univers entier s’arme pour l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer.
Mais si l’Univers l’écrasait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’Univers a sur lui, l’Univers n’en
sait rien.
»
5. 3 Conscience et doute
La conscience n’est donc pas uniquement une caractéristique parmi d’autres qui servirait à définir l’humain et sa condition.
Elle est ce par quoi l’homme a le devoir de se penser et de s’interroger ainsi que de penser le monde et de l’interroger.
Car,
entre la distance que la conscience instaure entre soi et le monde ou entre soi et soi, un horizon s’étend qui est celui du doute, du questionnement et de la curiosité.
En ce sens, on peut donc affirmer que la conscience, avant d’être une question pour
la philosophie, est la condition a priori de son exercice.
La conscience, premier pas vers la connaissance de soi et du monde semble souvent nous échapper car elle peut être influencée par ce qui n’est pas elle : le corps pour Baruch Spinoza puis Sigmund Freud, la société pour Karl Marx ou les instincts les
plus vils pour Friedrich Nietzsche.
Si le sens d’une majorité de pensées et d’actes échappe à l’homme, peut-il encore être jugé responsable de ce qu’il pense et de ce qu’il fait ? Baruch Spinoza ne nous dit-il pas que « l’expérience elle-même
n’enseigne […] pas moins clairement que la raison que les hommes se croient libres pour la seule raison qu’ils sont conscients de leurs actions et ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés ; elle montre en outre que les décrets de l’esprit
ne sont rien en dehors des appétits mêmes, et sont, par conséquent, variables selon l’état du corps » ?
5. 4 Conscience de soi ou conscience contre soi ?.
»
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