Commentaire Littéraire Rédigé Sur "L'Enfant" De Victor Hugo Dans Le Recueil Les Orientales
Publié le 15/09/2006
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En 1822, la Grèce proclame son indépendance à l'empire ottoman, aux Turcs. Ceux-ci répliquent en massacrant les populations grecques. Les habitants de l'île de Chio, située dans la Mer Égée, non loin de la Turquie, en sont les principaux témoins. L'écho du massacre retentira dans toute l'Europe et plusieurs nations embraseront la cause des insurgés, ainsi que plusieurs artistes et personnalités. Le peintre Eugène Delacroix illustrera la scène dans "Scène des massacres de Scio", l'autre nom de Chio, en 1824. Victor Hugo, très célèbre auteur romantique du XIX ème siècle, fait aussi partie de ces gens défendant les droits de l'Homme, défendant les Grecs. Il a écrit "L'enfant" paru dans le recueil Les Orientales en 1829. Les Orientales est un recueil invitant à l'exotisme, à l'époque où l'Orient fait rêver. "L'enfant" raconte le triste épisode de l'île de Chio, raconte l'horreur et les méfaits de la guerre à travers l'image d'un enfant survivant du massacre, et aborde aussi quelques thèmes du romantisme : la Nature et l'Orient. Hugo invite le lecteur à prendre parti lui-aussi pour la cause helléniste. En quoi ce poème montre-t-il l'engagement du poète? Nous verrons que ce texte en insistant sur l'horreur de la guerre et en décrivant les beautés passées de l'île de Chio, est une plaidoirie contre la guerre, et que c'est une poésie engagée grâce au thème de la jeunesse. Tout au long du poème, Victor Hugo rappelle au lecteur que malgré la beauté de l'île de Chio en Orient, la guerre est parvenue jusqu'à ce lieu qui a jadis été un havre de paix. Dans presque chaque strophe l'écrivain a inséré une ou plusieurs expressions du champ lexical de la guerre et du massacre pour ne pas l'oublier. Ainsi on trouve « ruine et deuil « au premier vers, « murs noircis [...]grand ravage « dans les vers 7 et 12 de la deuxième strophe, « pleurs « v.14, « qui du fer n'ont pas subi l'affront « v.22, et « de la poudre et des balles « au dernier vers. La seule indication nous permettant de trouver l'auteur du massacre est la première hémistiche du premier vers de la première strophe : « Les Turcs ont passé par là «. L'auteur plonge donc le lecteur dans le contexte historique dès le début de son œuvre. Cette ellipse pousse le lecteur en avant de la scène, ainsi que l'utilisation du présent de l'indicatif dans l'hémistiche et le vers suivants qui rendent le lecteur témoin direct. Tandis que l'imparfait utilisé dans le reste de la description marque une certaine distance. Cette ellipse frappe aussi par le sentiment d'implacabilité qu'elle dégage. On dirait que les Turcs ne sont qu'une machine dénuée de sentiments et de raison. La guerre reflète ainsi les tristes profondeurs de l'être humain. D'ailleurs la présence de la citation en exergue de William Shakespeare dans Macbeth, qui explore les plus sinistres tréfonds de l'âme humaine n'est pas anodine : « Ô horror ! Horror ! Horror! «. De plus l'allitération en [k] dans la première strophe renforce l'idée de dureté du massacre passé : « Turcs,[...]Chio,[...]qu'un sombre, [...]qu'ombrageaient,[...]qui,[...]coteaux,[...]quelquefois,[...]chœur «. Impression rappelée au vers 2 : « Chio […] n'est plus qu'un sombre écueil «, ainsi le fait de passer d'île à écueil renforce le sentiment de dureté, d'isolement, de perte. En outre, la guerre ici a ravagé une île grecque. Or la Grèce était considérée comme le berceau de la civilisation et de la démocratie, et détruire ce berceau, c’est également détruire ce qui est humain en l’homme, c’est-à-dire les arts et les sciences qui différencient l’homme de l’animal. Il ne reste alors que « les rocs anguleux « v.13, évocateurs des premières cavernes. Mais bien que le but de l'auteur soit d'inviter le lecteur à prendre parti, à s'intéresser à la cause grecque, il n'a pas oublié qu'il doit aussi le faire rêver. D'où la présence du thème de la Nature. L'un des thèmes du romantisme est l'Orient, et Victor Hugo, en bon auteur romantique, a usé de ce thème dans son recueil Les Orientales. C'est pourquoi il parle de l'île de Chio située dans la Mer Égée, et des beautés passées de ses lieux. Il aborde ainsi le thème de la Nature, thème très présent dans le mouvement romantique, synonyme de paix et de bonheur, mais aussi nature blessée. Le fait d'alterner des expressions du vocabulaire de la guerre et celui de la nature évite le lecteur à rêver de ce lieu sans oublier ce qui s'est passé. Par contre cela atténue la notion de massacre. C'est pour cela que le vocabulaire du champ lexical de la nature est très présent. On peut tout d’abord voir la Nature comme un havre de paix : sur l’île de Chio poussent des vignes, les « charmilles « (allées d'arbustes et de charmes) protègent du soleil, tandis que des jeunes filles chantent et dansent. On sent, notamment par l’anaphore « Chio « au début des deuxième, troisième et quatrième vers, que le poète est fasciné, par l’atmosphère de calme et de richesse qui régnait sur cette île. L'île de Chio était aussi paradisiaque, par les plantes symboliques comme le tuba arbre du paradis musulman, et le lys qui désigne une fleur rare et donc très précieuse et peut-être imaginaire ; et même aphrodisiaque par le vin qu'on y boit. L'auteur se réfère plusieurs fois à des pays arabes tels que la Turquie et l'Iran par souci d'exotisme, pour faire rêver le lecteur. Mais la Nature a été blessée par la guerre, Chio n'est plus qu'un « sombre écueil « (v.2) « désert « (v.7) sur lequel tout est « ruine et deuil « (v.1), et où les murs sont noircis par le feu de la guerre (v.7). La rage des hommes a tout détruit, et il ne reste des « palais « et des « coteaux « (v.5) qu'une « blanche aubépine « v.11 qui a été « oubliée « v.12. Oubliée comme le jeune garçon qui apparaît dans la deuxième strophe. Hugo va se "servir" de ce jeune garçon pour montrer son engagement contre la guerre et bien sûr l'espoir d'un monde nouveau. L'auteur n'a pas intitulé le poème "L'enfant" sans raison. C'est un bon moyen pour lui de montrer son engagement. L'enfant est ici synonyme d'espoir et de renaissance. Tout d'abord le poète décrit l'enfant. Ce dernier rappelle l'ancienne île de Chio car le champ lexical de la beauté est utilisé : « bel enfant « v.19, « beau front « v.23. L'utilisation de couleurs gaies s'oppose aux couleurs de l'île après le ravage, et là encore rappelle l'ancienne île : « tes yeux bleus comme le ciel et l'onde « v.14-15, « ta blanche épaule « v.21 comme la « blanche aubépine « v.11, « tète blonde « v.18. Le mot « gaîment « v.20 surprend car peu de mots évoquent la joie. On en vient presque à oublier le ravage passé. Hélas Hugo nous le rappelle là encore en éprouvant de la pitié pour lui : « Ah ! Pauvre enfant « v.13, « Hélas « v.14. Et il fait de nouveau allusion à l'île de Chio en disant que l'enfant est « seul « v.7, humilié et oublié (v.9-12). Le champ lexical de la tristesse est également présent : « pleurs «v.14, « larmes « (vl6), « chagrins nébuleux « (v25). Ainsi la beauté de l'enfant s'oppose à sa tristesse et l'auteur veut par là bien montrer la perversité des hommes quand ils font la guerre, et dénonce à nouveau celle-ci. À partir de la deuxième strophe, l'auteur s'adresse à l'enfant. En effet on retrouve l'emploi de la deuxième personne à partir de la troisième strophe : « tes « v.14, « ta «v.18. C'est une sorte de dialogue car il y a un échange question-réponse entre le poète et le petit garçon : « Que veux-tu? « v.19 et v.34. C'est au cours de cet échange que Hugo montre son engagement. En effet aux vers 26-27 : « Est-ce d'avoir ce lys, bleu comme tes yeux bleus, Qui d'Iran borde le puits sombre? «, il y a une métaphore ; le puits sombre représente la domination turque, l'Iran est lui aussi soumis c'est le lys, les yeux bleus c'est le peuple grec, le bleu lie l'Iran et la Grèce. Ou encore aux vers 29-30 : « Qu'un cheval au galop met, toujours en courant, Cent ans à sortir de son ombre ? « ; l'ombre du tuba est la domination turque, le joug turc, le cheval est le peuple grec qui veut s'en séparer. Ainsi par deux fois il montre que la Grèce veut être indépendante. Le lys, le fruit du tuba, et le « bel oiseau des bois « (v.31) sont tous merveilleux et font rêver. Hugo demande à l'enfant si pour se consoler il veut l'un des trois. La réponse de l'enfant (vers 35-36) dans la dernière strophe nous stupéfait. « Ami « commence-t-il, comme si sa réponse présageait la paix et la vie, ce qui provoque d'ailleurs chez le poète une certaine impatience mêlée d'affection, de désir d'en savoir plus, car Hugo fait ensuite : « dit l'enfant grec, dit l'enfant aux yeux bleus «. Et le dernier vers arrive, nous laissant une réponse simple mais ferme de l'enfant, du peuple grec : « Je veux de la poudre et des balles «. Ainsi l'espoir d'une renaissance est très rapidement déçu. L'auteur nous dit à travers ce poème que la guerre entraîne la guerre, détruisant la jeunesse et l’humanité, rendant impossible toute volonté de pardon, dans une horrible violence. La guerre sort victorieuse de son combat contre les hommes et la Nature, et l’enfant, victime de la guerre et protégé de la nature, devient lui aussi un soldat. Ainsi, ce poème est une plaidoirie dans laquelle Victor Hugo s'engage bien contre la guerre et ses ravages. On retrouve d'autres textes qui sont des plaidoiries contre tout ce qui est barbare chez l'homme, comme Le dernier Jour d'un condamné, ou encore Claude Gueux.
«
aubépine » v.11, « tète blonde » v.18.
Le mot « gaîment » v.20 surprend car peu de mots évoquent la joie.
On en vient presque àoublier le ravage passé.
Hélas Hugo nous le rappelle là encore en éprouvant de la pitié pour lui : « Ah ! Pauvre enfant » v.13,« Hélas » v.14.
Et il fait de nouveau allusion à l'île de Chio en disant que l'enfant est « seul » v.7, humilié et oublié (v.9-12).
Lechamp lexical de la tristesse est également présent : « pleurs »v.14, « larmes » (vl6), « chagrins nébuleux » (v25).
Ainsi la beautéde l'enfant s'oppose à sa tristesse et l'auteur veut par là bien montrer la perversité des hommes quand ils font la guerre, etdénonce à nouveau celle-ci.À partir de la deuxième strophe, l'auteur s'adresse à l'enfant.
En effet on retrouve l'emploi de la deuxième personne à partir de latroisième strophe : « tes » v.14, « ta »v.18.
C'est une sorte de dialogue car il y a un échange question-réponse entre le poète et lepetit garçon : « Que veux-tu? » v.19 et v.34.
C'est au cours de cet échange que Hugo montre son engagement.
En effet aux vers26-27 : « Est-ce d'avoir ce lys, bleu comme tes yeux bleus, Qui d'Iran borde le puits sombre? », il y a une métaphore ; le puitssombre représente la domination turque, l'Iran est lui aussi soumis c'est le lys, les yeux bleus c'est le peuple grec, le bleu lie l'Iranet la Grèce.
Ou encore aux vers 29-30 : « Qu'un cheval au galop met, toujours en courant, Cent ans à sortir de son ombre ? » ;l'ombre du tuba est la domination turque, le joug turc, le cheval est le peuple grec qui veut s'en séparer.
Ainsi par deux fois ilmontre que la Grèce veut être indépendante.
Le lys, le fruit du tuba, et le « bel oiseau des bois » (v.31) sont tous merveilleux etfont rêver.
Hugo demande à l'enfant si pour se consoler il veut l'un des trois.
La réponse de l'enfant (vers 35-36) dans la dernièrestrophe nous stupéfait.
« Ami » commence-t-il, comme si sa réponse présageait la paix et la vie, ce qui provoque d'ailleurs chez lepoète une certaine impatience mêlée d'affection, de désir d'en savoir plus, car Hugo fait ensuite : « dit l'enfant grec, dit l'enfant auxyeux bleus ».
Et le dernier vers arrive, nous laissant une réponse simple mais ferme de l'enfant, du peuple grec : « Je veux de lapoudre et des balles ».
Ainsi l'espoir d'une renaissance est très rapidement déçu.
L'auteur nous dit à travers ce poème que laguerre entraîne la guerre, détruisant la jeunesse et l'humanité, rendant impossible toute volonté de pardon, dans une horribleviolence.
La guerre sort victorieuse de son combat contre les hommes et la Nature, et l'enfant, victime de la guerre et protégé dela nature, devient lui aussi un soldat.
Ainsi, ce poème est une plaidoirie dans laquelle Victor Hugo s'engage bien contre la guerre et ses ravages.
On retrouve d'autrestextes qui sont des plaidoiries contre tout ce qui est barbare chez l'homme, comme Le dernier Jour d'un condamné, ou encoreClaude Gueux..
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