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Commentaire composé « du Lac » d'Alphonse de Lamartine

Publié le 15/09/2006

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Introduction. Les Méditations poétiques est un recueil poétique publié en1820 qui regroupe vingt-quatre poèmes. La publication de ce recueil fut un événement littéraire : il est en quelque sorte le premier manifeste du romantisme français. L'auteur, Alphonse de Lamartine, y transcrit ses états d'âme, ses impressions. L'ensemble apparaît comme une sorte de journal intime des expériences vécues entre 1815 et 1820, expériences dont la plus célèbre fut inspirée par Julie Charles, une jeune femme malade de la poitrine rencontrée sur les bords du lac du Bourget, la femme évoquée par le poète dans « Le lac «. Ce poème est le modèle même du poème romantique. Après avoir étudié l'importance de la nature, on verra comment le thème de la fuite du temps occupe également une place essentielle, puis on verra comment face à l'épreuve le poète réagit, comment il donne à entendre une voix particulièrement pathétique. Développement. La nature dans « le lac « s'impose par deux aspects : par son caractère grandiose, et par le fait qu'elle apparaît pour le poète comme une sorte de confidente. On est loin de l'alcôve. Dans ce poème, la nature s'étend, se présente comme un vaste, un grandiose paysage digne des tableaux de Caspar David Friedrich. Le lac tout d'abord occupe les strophes 2, 3, 4, 5 ; il est question au vers 6 des « flots chéris «, au vers 11 de « tes ondes «, au vers 16 de « tes flots harmonieux « . Ensuite la nature tout entière envahit la fin du poème. Ainsi le poète apostrophe celle-ci à travers une énumération : « Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure ! « qui appelle une autre courant sur les quatre dernières strophes : « tes riants coteaux «, « dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages «, « dans le zéphyr «, « dans l'astre au front d'argent «, « le vent «, « le roseau «. Le paysage offre un horizon immense qui va du petit, « le roseau « à l'infiniment grand, le ciel avec la lune, « l'astre au front d'argent «, une nature aussi bien minérale que végétale, une nature des trois éléments comme l'air avec le « zéphyr «, comme la terre avec « la grotte «, comme l'eau avec « le lac «, une nature absolue, une nature du « tout « qui fait appel à un grand nombre de sens, trois exactement, l'ouïe, la vue et l'odorat : « Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire «. La nature, a elle seule occupe la moitié du poème, huit strophes sur seize. Cette nature majestueuse ne se s'inscrit pas dans le poème seulement comme un décor. Elle est bien plus pour le poète dans la mesure où elle apparaît à travers le lac comme une confidente. Dès la deuxième strophe, le poète interpelle le lac par une apostrophe, « Ô lac «. L'impératif « regarde ! « et le tutoiement systématique marqué par les pronoms, « Où tu la vis s'asseoir «, « tu te brisais «, « t'en souvient-il «, instaurent entre les deux une véritable intimité, un véritable tête à tête puisque le poète « vient seul «. On est proche de la prosopopée. Le lac est de cette façon personnifiée et apparaît comme un confident recueillant les souvenirs et les sentiments du poète. Dans cette nature immense le poète se recueille et médite sur la condition humaine, sur la finitude de l'homme. L'évocation des jours heureux, l'évocation des souvenirs pose alors la question de la fuite du temps, un thème ici obsédant que le poète rend véritablement tangible. L'une des caractéristiques les plus marquantes du romantisme tient avant tout à l'expression des sentiments personnels, notamment aux interrogations métaphysiques que se posent alors les écrivains romantiques. D'une façon exemplaire, presque totale, Alphonse de Lamartine s'empare de la question du temps qui passe. Cette question l'obsède, le tourmente. C'est une métaphore marine, imposante, elle aussi grandiose, qui dès le tout début donne le ton : « Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges / Jeter l'ancre un seul jour ? «. La métaphore du temps assimilé à « l'océan des âges « donne en comparaison de la petitesse du lac, une impression d'immensité, d'infini. Par ailleurs, la question est rhétorique. Peut-être éloigne-t-elle un peu une réponse de toute évidence désespérée pour le poète. Le thème de la fuite du temps occupe une grande partie du poème, une place centrale, huit strophes sur seize comme pour la nature, les strophes 1, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12. Le champ lexical du temps a lui seul est impressionnant : « éternelle «, « âges «, « l'année «, « ô temps «, « heures «, « jours «, « passés «, « éternité «, « néant «, « rajeunir «, « souvenir «, « souvient-il «, celui de la fuite aussi : « sans retour «, « coulez «, « m'échappe et fuit «, « hâtons-nous «, « nous passons «, « s'envolent «. Cette obsession du temps qui passe n'aurait sans doute pas le même retentissement sans le génie de Lamartine, lequel tient dans le fait qu'il rend concret, sensible le mouvement de la fuite du temps. Si on entend filer « l'heure fugitive «, on entend les « sombres abîmes « engloutir « les jours «, c'est grâce au rythme de l'alexandrin combiné tout d'abord à l'énumération de mots renvoyant à l'idée de temps au vers 45 : « Eternité, néant, passé, sombres abîmes, « énumération auquel fait écho une autre énumération, celle des éléments naturels au vers 49 : « Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure ! «. Ensuite l'accumulation de procédés de répétition, les anaphores « qu'il soit « , « dans «, « que « liées aux parallélisme de construction, « gardez de cette nuit, gardez, belle nature «, « qu'il soit dans ton repos «, « qu'il soit dans tes orages «, « et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages «, « que le vent qui gémit, le roseau qui soupire «. Les mots, Les formules comme des heures, des jours, ainsi s'égrènent, s'enchaînent, s'entraînent et s'emballent. Les phrases courent d'une strophe à l'autre. Les nombreux enjambements précipités en fin de strophe par un hexasyllabe accèlèrent la cadence aux vers 39 et 40, aux vers 43 et 44, aux vers 47 et 48 , aux vers 51 et 52 et aux 55 et 56. Les vers filent pour s'arrêter brusquement à deux propositions lapidaires, définitives mais essentielles : « Tout dise : Ils ont aimé ! «. Enfin le passé simple du quatrième quatrain, « frappèrent « et « laissa «, par opposition à l'imparfait des trois strophes précédentes reproduit le caractère bref et inattendu des moments de l'existence, une suite brèves d'actions temporelles. Pour le poète les questions aussi s'enchaînent : « Eh quoi ! N'en pourrons-nous fixer au moins la trace ? «, « Que faites-vous des jours que vous engloutissez ? / Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes / que vous nous ravissez ? «. Face à cette terrible condition, Alphonse de Lamartine, abattu, réagit, fait entendre sa voix en suppliant la nature, sa confidente et en utilisant un des pouvoirs de la poésie. Emporté par le temps le poète se désespère et se tourne évidemment vers le lac, vers la nature pour lui adresser une supplication pathétique. Des questions interpellent le temps. Celles-ci sont ponctuées, marquées par de nombreuses exclamations qui trahissent l'émotion, le désespoir, l'incompréhension, la révolte du poète : « Eh quoi «, « Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus ! Passés «. L'impératif, « gardez « et le subjonctif « qu'il soit, rendent compte de la demande, elle aussi marquée par l'émotion soulignée par les quatre exclamations qui ponctuent le vers 59 : « Ô lac ! rochers muets ! grottes! forêt obscure ! «. Du lac le poète passe à la nature toute entière et amplifie d'une certaine façon la confidence, la rend exceptionnelle. Il en appelle à la nature pour garder le témoignage de l'existence passée, de l'amour passé. Ce registre pathétique, cette tonalité élégiaque est nuancée par une note optimiste. Ainsi, le vers 64, « Tout dise : ils ont aimé ! « apparaît comme la concentration de tout ce qui a été dit dans le poème. Ce vers est la chute et l'apogée du poème : avec lui le poète constate le pouvoir des sentiments. Le passé composé signale la conséquence sur le présent : le fait d'avoir aimé l'emporte sur toutes les constatations négatives et amères. De plus le poète ne fait-il pas par son poème revivre Julie Charles morte en décembre 1818, un an après leur dernière rencontre ? C'est bien la voix de celle-ci, « la voix qui m'est chère «, que l'on entend à travers le discours direct des strophes 6, 7, 8, 9 et qui occupe la partie centrale du poème. De cette façon Alphonse de Lamartine répond à la demande de celle qu'il aime, « suspend « pour elle le temps, lui offre l'éternité. Les deux hexasyllabes dans chaque quatrain semblent à chaque fois marquer cette suspension. Les deux voix évidemment s'accordent parfaitement à travers les impératifs ; leur constat est le même : « L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive « ; leur demande est la même : « suspendez votre cours «, « laissez-nous savourer les rapides délices / Des plus beaux de nos jours ! «. Elle n'est pas sans rappeler le fameux « carpe diem « d'Horace. Conclusion. Même si la poésie de Lamartine ne nous contente plus, en lisant ce poème nous entendons la première voix romantique française, nous voyons naître une poésie neuve où vibre l'existence. Le lac, la nature grandiose, n'est pas un décor magnifique, mais bonheur ou tristesse, lieu véritable du recueillement ; l'ombre, au penchant du coteau, est celle de la vie ; le langage poétique n'est pas un discours, mais une exaltation de l'amour ou face à la fuite du temps un désespoir sans nom. C'est une façon de dire cette fuite, une façon également de l'arrêter et de ressusciter en quelque sorte l'être aimé. C'est tout simplement la traduction sensible d'une expérience vécue douloureuse : Alphonse de Lamartine et Julie Charles se retrouvent à Paris au cours de l'hiver 1817 et promettent de se revoir à Aix l'été suivant ; mais le poète a la douleur de se trouver seul au rendez-vous ; la maladie de Julie la retient à Paris où elle meurt en décembre 1818. Victor Hugo au moment de la parution des Méditations poétiques s'écriait dans un journal, « le Conservateur littéraire « : « Voilà enfin des poèmes qui sont d'un poète, de la poésie qui est de la poésie ! «. Marchant dans les pas de celui que l'on considéra longtemps comme le plus grand poète de son siècle, il écrira « Tristesse d'Olympio « dans lequel lui aussi en romantique s'interroge sur les effets du temps, évoque les jours heureux passés avec Juliette Drouet et se console par le souvenir, un souvenir lumineux et vivant.


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« le fait qu'il rend concret, sensible le mouvement de la fuite du temps.

Si on entend filer « l'heure fugitive », on entend les « sombresabîmes » engloutir « les jours », c'est grâce au rythme de l'alexandrin combiné tout d'abord à l'énumération de mots renvoyant àl'idée de temps au vers 45 : « Eternité, néant, passé, sombres abîmes, » énumération auquel fait écho une autre énumération, celledes éléments naturels au vers 49 : « Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure ! ».

Ensuite l'accumulation de procédés derépétition, les anaphores « qu'il soit » , « dans », « que » liées aux parallélisme de construction, « gardez de cette nuit, gardez,belle nature », « qu'il soit dans ton repos », « qu'il soit dans tes orages », « et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages »,« que le vent qui gémit, le roseau qui soupire ».

Les mots, Les formules comme des heures, des jours, ainsi s'égrènent,s'enchaînent, s'entraînent et s'emballent.

Les phrases courent d'une strophe à l'autre.

Les nombreux enjambements précipités enfin de strophe par un hexasyllabe accèlèrent la cadence aux vers 39 et 40, aux vers 43 et 44, aux vers 47 et 48 , aux vers 51 et52 et aux 55 et 56.

Les vers filent pour s'arrêter brusquement à deux propositions lapidaires, définitives mais essentielles : « Toutdise : Ils ont aimé ! ».

Enfin le passé simple du quatrième quatrain, « frappèrent » et « laissa », par opposition à l'imparfait destrois strophes précédentes reproduit le caractère bref et inattendu des moments de l'existence, une suite brèves d'actionstemporelles. Pour le poète les questions aussi s'enchaînent : « Eh quoi ! N'en pourrons-nous fixer au moins la trace ? », « Que faites-vous desjours que vous engloutissez ? / Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes / que vous nous ravissez ? ».

Face à cette terriblecondition, Alphonse de Lamartine, abattu, réagit, fait entendre sa voix en suppliant la nature, sa confidente et en utilisant un despouvoirs de la poésie. Emporté par le temps le poète se désespère et se tourne évidemment vers le lac, vers la nature pour lui adresser une supplicationpathétique.

Des questions interpellent le temps.

Celles-ci sont ponctuées, marquées par de nombreuses exclamations quitrahissent l'émotion, le désespoir, l'incompréhension, la révolte du poète : « Eh quoi », « Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! toutentiers perdus ! Passés ».

L'impératif, « gardez » et le subjonctif « qu'il soit, rendent compte de la demande, elle aussi marquéepar l'émotion soulignée par les quatre exclamations qui ponctuent le vers 59 : « Ô lac ! rochers muets ! grottes! forêt obscure ! ».Du lac le poète passe à la nature toute entière et amplifie d'une certaine façon la confidence, la rend exceptionnelle.

Il en appelle àla nature pour garder le témoignage de l'existence passée, de l'amour passé. Ce registre pathétique, cette tonalité élégiaque est nuancée par une note optimiste.

Ainsi, le vers 64, « Tout dise : ils ont aimé ! »apparaît comme la concentration de tout ce qui a été dit dans le poème.

Ce vers est la chute et l'apogée du poème : avec lui lepoète constate le pouvoir des sentiments.

Le passé composé signale la conséquence sur le présent : le fait d'avoir aimé l'emportesur toutes les constatations négatives et amères.

De plus le poète ne fait-il pas par son poème revivre Julie Charles morte endécembre 1818, un an après leur dernière rencontre ? C'est bien la voix de celle-ci, « la voix qui m'est chère », que l'on entend àtravers le discours direct des strophes 6, 7, 8, 9 et qui occupe la partie centrale du poème.

De cette façon Alphonse deLamartine répond à la demande de celle qu'il aime, « suspend » pour elle le temps, lui offre l'éternité.

Les deux hexasyllabes danschaque quatrain semblent à chaque fois marquer cette suspension.

Les deux voix évidemment s'accordent parfaitement à traversles impératifs ; leur constat est le même : « L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive » ; leur demande est la même :« suspendez votre cours », « laissez-nous savourer les rapides délices / Des plus beaux de nos jours ! ».

Elle n'est pas sansrappeler le fameux « carpe diem » d'Horace. Conclusion. Même si la poésie de Lamartine ne nous contente plus, en lisant ce poème nous entendons la première voix romantique française,nous voyons naître une poésie neuve où vibre l'existence.

Le lac, la nature grandiose, n'est pas un décor magnifique, mais bonheurou tristesse, lieu véritable du recueillement ; l'ombre, au penchant du coteau, est celle de la vie ; le langage poétique n'est pas undiscours, mais une exaltation de l'amour ou face à la fuite du temps un désespoir sans nom.

C'est une façon de dire cette fuite,une façon également de l'arrêter et de ressusciter en quelque sorte l'être aimé.

C'est tout simplement la traduction sensible d'uneexpérience vécue douloureuse : Alphonse de Lamartine et Julie Charles se retrouvent à Paris au cours de l'hiver 1817 etpromettent de se revoir à Aix l'été suivant ; mais le poète a la douleur de se trouver seul au rendez-vous ; la maladie de Julie laretient à Paris où elle meurt en décembre 1818.

Victor Hugo au moment de la parution des Méditations poétiques s'écriait dansun journal, « le Conservateur littéraire » : « Voilà enfin des poèmes qui sont d'un poète, de la poésie qui est de la poésie ! ».Marchant dans les pas de celui que l'on considéra longtemps comme le plus grand poète de son siècle, il écrira « Tristessed'Olympio » dans lequel lui aussi en romantique s'interroge sur les effets du temps, évoque les jours heureux passés avec JulietteDrouet et se console par le souvenir, un souvenir lumineux et vivant.. »

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