Commentaire composé de la lettre CLXI du roman « les lettres persanes » - Mntesquieu
Publié le 03/08/2010
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Dans cette lettre, on voit bien que Roxane profite de la distance qui la sépare de son mari pour lui faire toute une série de reproches qu’elle n’aurait probablement jamais osé aborder en sa présence. En les mettant par écrit, elle évite toute éventuelle représailles ce qui lui permet d’être franche. Elle l’accuse tout d’abord d’avoir été capricieux, jaloux, mais surtout de l’avoir forcée à se rabaisser en lui devant fidélité. Elle l’accuse de l’avoir cru naïve. De l’avoir soumise à toutes ses fantaisies. Elle lui reproche également de l’avoir rabaissée au rang d’esclave : « J’ai pu vivre dans la servitude. « (l.10). Pour énumérer ses défauts, Roxane utilise des anaphores : elle répète à quatre reprises l’expression « de ce que je « : « de ce que je me suis abaissée (…( « (l.12), « de ce que j’ai lâchement gardé dans mon cœur (…( « (l.13), « de ce que j’ai profané la vertu (…( « (l.15). Cette figure de style insiste non seulement sur l’intensité des reproches qu’elle lui fait mais surtout sur l’infinité de reproches qu’elle pourrait encore lui faire. Roxane profite également de cette distance pour lui faire des aveux. Elle lui révèle de façon cynique qu’elle l’a trompé, qu’elle s’est « jouée de sa jalousie « (l.2), mais également qu’elle va mettre fin à ses jours. Elle revendique la liberté qu’elle prétend avoir toujours eu malgré la servitude dans laquelle il la faisait vivre. « Ton affreux sérail « (l.2), montre bien l’endroit où elle était supposée vivre (sérail : lieu où étaient enfermées les femmes chez les peuples musulmans). Ces révélations vont faire prendre conscience à Usbeck qu’il ne connaissait en fait pas vraiment sa bien-aimée. Cette femme en qui il avait toute confiance, se révèle être une parfaite inconnue. Il n’imaginait pas qu’elle puisse le tromper, il croyait qu’elle adorait ses caprices, etc. Mais Roxane lui fait comprendre à l’aide d’expressions comme : « Si tu m’avais bien connue (…( « (l.17). Elle cherche à le faire souffrir le plus possible : « après t’avoir accablé de douleurs « (l.22). Au lieu de dire explicitement qu’elle va se suicider, elle emploie une périphrase : « le poison va couler dans mes veines « (l.3), ce qui permet d’insister sur la lenteur de cette mort, ça montre bien l’idée qu’il l’a tuée à petit feu. Elle insiste de nouveau à la fin sur cette mort prochaine : « le poison me consume ; ma force m’abandonne ; la plume me tombe des mains ; je sens affaiblir jusqu’à ma haine : je me meurs. « (l.24-25). Nous avons là une mort très lent qui a pour effet de faire durer le supplice d’Usbeck. Roxane arrive donc à lui affliger un maximum de souffrance, non seulement en le faisant assister à la mort de sa femme, mais surtout en faisant durer le supplice de la défaite à laquelle il doit faire face. Il comprend là que cette fois, il ne pourra pas se venger. C’est là toute la victoire de Roxane. Cette lettre constitue une plaidoirie contre la tyrannie masculine. Les règles du sérail sont simples: soit plaire, soit être tué. Une femme est gardée pour sa beauté et ses talents érotiques. Ce sérail réalise le rêve d'un homme tout puissant (puissance arbitraire). Roxane dans cette lettre parle de servitude, de fantaisie pour montrer l'arbitraire des lois d'Usbeck. Usbeck est un despote, un tyran qui utilise tous ses pouvoirs, agit selon son bon plaisir. Il ne connaissait même pas sa préférée: Roxane utilise plusieurs fois le verbe croire. Cette dernière portait un masque, était un personnage. Ce passage est également un plaidoyer contre le despotisme. Usbeck trouve qu'à l'étranger le pouvoir d'un seul n'est pas bien, il se montre libéral, seulement dans sa vie privée il n'est pas capable de laisser la liberté, même celle de l'amour puisque Roxane emprisonnée dans le harem est contrainte de lui donner son corps. Néanmoins elle apporte un démentît éclatant à ce manque de liberté puisqu'elle arrive à introduire y son amant. Grâce à la séduction des eunuques elle fait du harem un lieu de plaisir. Elle a « réformé ses lois sur celles de la nature « (l.10-11). Montesquieu par la voix de Roxane proclame les libertés de la nature et critique le despotisme oriental. A travers celle d'Usbeck, il critique le despotisme occidental. En conclusion, cette lettre a plusieurs visages. La mort de Roxane marque à la fois la fin de la lettre, la fin du roman, la fin de la relation entre Usbeck et Roxane, mais aussi la fin de l’autorité d’Usbeck au sérail et la fin de se régime totalitaire qui retenait Roxane. Ce passage est très intéressant car tout d’abord, il revendique l’un des avantages majeurs de l’écriture : la liberté d’expression, pouvoir s’exprimer librement sans crainte de représailles. Ensuite il dénonce bien évidemment le despotisme oriental et occidental qui régnait à l’époque. Mais ce qui mérite le plus la réflexion, est le fait que la soi-disante victime du despotisme, qu’était Usbeck, n’est rien d’autre que lui même un tyran. Peut-être voulait-il dire que c’était dans la nature de l’homme.
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