Commentaire Composé: Colline, rédigé par Jean Giono
Publié le 15/09/2006
Extrait du document
Le passage étudié est tiré de Colline, rédigé par Jean Giono en 1928. Cet extrait est une description qui narre le parcours d’un incendie, ravageant tout sur son passage. Pourquoi l’auteur a-t-il décidé de décrire cet embrasement de manière métaphorique ? Les aspects étudiés dans ce texte seront la métaphore filée de l’incendie, ainsi que la passivité de l’Homme et de l’environnement. La métaphore filée de l’incendie est prédominante dans cet extrait. Néanmoins, le point de vue du narrateur sur ce feu va changer le long de ce passage. Jean Giono évoque l’incendie d’une manière particulière. En effet, il utilise une métaphore filée pour le décrire. Il s’apparente à une chimère qui possède des caractéristiques provenant de divers animaux, avec le champ lexical de l’organisme, tels les insectes (« dard « l.16), les mammifères (« gueule «l.15, « langue «l.16, « tête « l.11). Ce brasier se déplace également comme un animal, tantôt de manière furtive (« a bondi «l.3 « saute «l.13), tantôt de manière plus lente (« rampe ; avance « l.13). L’auteur montre ainsi le caractère changeant et farouche de cette « bête «. Les éléments sont fréquemment mentionnés dans cette description. Le feu, élément principal, est logiquement utilisé pour le brasier. Un abondant champ lexical de la chaleur et de la couleur rouge est employé comme « les braises « (l.12), « les cendres « (l.13) ou bien encore le « sang « (l.17). L’élément aquatique est également usé pour montrer l’immensité du feu, possédant un « corps pareil à un torrent « (l.9-10). L’air est personnifié, à travers « le vent « (l.16), qui sert à guider et à maîtriser la fougue du feu « pour prendre la direction « (l.16). C’est cette combinaison des éléments qui caractérise la puissance démesurée de l’embrasement. L’intensité et l’ampleur de l’incendie se modifient au cours de l’extrait, entre « trois heures du matin « (l.4) jusqu’au lendemain à « l’aube « (l.8). Dépeint de manière assez vague au départ comme s’il était anodin, (« ça « ; « là-bas « l.1) il se révèle être beaucoup moins inoffensif au fur et à mesure que la description se poursuit. En effet, si l’auteur loue les qualités de ce feu, qualifié de « robuste « (l.8) et « joyeux « (l.9) à travers une personnification, il exprime ensuite le caractère vorace (« dévore « l.14) et irascible (« un coup de griffe à droite, un à gauche « l.13-14) de ce monstre de feu. Au final, il devient même repoussant (« mufle dégouttant de sang « l.18). Une gradation s’établit donc tout au long du texte pour montrer la montée en puissance de cette bête qui saccage tout sur son passage. L’auteur met en avant la férocité et l’étendue de ce feu. Un rapport de force s’établit ainsi entre l’incendie, l’Homme et la nature. La puissance de celui-ci contraste avec l’Homme et l’environnement qui ne peuvent être que les victimes et les spectateurs de ce brasier. La présence de l’environnement est marquée dans cette description où un champ lexical de la végétation de Haute-Provence est présent (« bruyères « l.3, « pinèdes « l.5, « landes «). Cette nature luxuriante est accompagnée par l’Homme qui se retrouve aux prises de l’incendie dont il est le responsable. Une personnification prouve sa culpabilité : « deux villages [qui] brûlaient des fanes de pomme de terre « (l.1-2). Le lieu de cette catastrophe « Tonnerre de Dieu « (l.1) accentue la gravité de l’incendie où l’Homme et la nature sont désarmés. La végétation est dévastée durant l’embrasement. En effet, celui-ci est sous-estimé (« on a cru pouvoir la maîtriser sans trop de dégâts « l.5-6) avant qu’il soit jugé incontrôlable (« c’était trop tard «l.10). Rien ne lui résiste, « une chênaie « est « éventrée « (l.14) et même « vingt chênes blancs et trois pompons de pins « sont « dévorés « (l.14-15) avec une facilité déconcertante. « Maurras « (l.18) découvre alors que le feu va s’attaquer à « la combe « (l.19), impuissant, et ne peut que suivre son parcours (« elle était à ce moment-là « l.4) avec des compléments circonstanciels de lieu (« ici «, « là « l.14). Jean Giono assiste sur la durée importante du saccage. Il dure plus d’une journée, de « trois heures du matin « (l.4), jusqu’au lendemain matin où « l’aube pointait « (l.8). Durant toute cette période, « les gars « (l.8) considèrent l’incendie un peu comme un enfant qui fait « le diable à quatre « (l.5) .Cependant, il voit le feu d’un tout autre œil durant la nuit où il devient vigoureux et use Maurras et ses camarades. Le champ lexical du corps humain est donc employé avec les termes « bras «, « cervelles « (l.7) avec une hyperbole pour montrer leur épuisement et l’énergie dépensée pour tenter d’éteindre l’incendie (« elle a rompu les bras et fatigué les cervelles « l.7). La durée de cette catastrophe a donc raison des personnages qui sortent perdants de cette bataille. Ils passent d’acteurs (« on a cru pouvoir la maîtriser « l.5-6) à spectateurs (« Maurras a aperçu « l.18) de ce désastre. La métaphore filée prend tout son sens dans l’extrait Colline, où elle sert à amplifier l’importance de l’incendie en lui donnant des vertus animales. L’auteur l’oppose à des hommes dominés, sans aucune ressource, et à une nature prise au piège. A la manière d’Albert Camus, la nature est omniprésente et l’homme n’est que très peu mentionné. Néanmoins, cet environnement est beaucoup moins serein que dans Noces à Tipasa.
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