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Charles Baudelaire : « Le goût du néant » extrait des Fleurs du Mal

Publié le 22/02/2012

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Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte, L'Espoir, dont l'éperon attisait ton ardeur, Ne veut plus t'enfourcher! Couche-toi sans pudeur, Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle bute. Résigne-toi, mon coeur; dors ton sommeil de brute. Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur, L'amour n'a plus de goût, non plus que la dispute; Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte ! Plaisirs, ne tentez plus un coeur sombre et boudeur! Le Printemps adorable a perdu son odeur! Et le Temps m'engloutit minute par minute, Comme la neige immense un corps pris de roideur; Je contemple d'en haut le globe en sa rondeur Et je n'y cherche plus l'abri d'une cahute. Avalanche, veux-tu m'emporter dans ta chute? Charles BAUDELAIRE (poème paru le 20 janvier 1859 dans la Revue française et joint en 1861 à la seconde édition des Fleurs du Mal (Section Spleen et Idéal). Dans la première section des Fleurs du Mal, intitulée Spleen et Idéal, Baudelaire a réuni des poèmes d'inspiration contraire : certains célèbrent les séductions de l'art et de l'amour, grâce auxquelles le poète tente de dissiper l'ennui qui l'accable; les autres consacrent en revanche le triomphe du spleen, qui finit par écraser l'âme vaincue. « Le goût du néant », un poème joint en 1861 à la seconde édition des Fleurs du Mal, dit ainsi la détresse du poète qui a perdu son idéal, et qui, résigné, aspire au néant.



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