Char, Fureur et Mystère (extrait).

Char, Fureur et Mystère (extrait). La poésie de René Char est inséparable d'une métaphysique de la réconciliation et de la requalification du monde par l'amour. Seul l'acte poétique, qui unit des objets indifférents, peut rendre à l'univers l'unité de la Beauté par la fureur incantatoire de son Verbe créateur. Ce n'est pas à une lecture mais à une initiation que Char invite son lecteur qui plonge alors dans la perception immédiate et sensuelle d'un monde nécessaire. On peut ainsi lire « Allégeance « comme le poème de la poésie moderne qui tente de fonder son espace dans la contrée du désir saisi dans sa nécessité conciliatrice. Fureur et Mystère de René Char (« Allégeance «) Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l'aima ? Il cherche son pareil dans le voeu des regards. L'espace qu'il parcourt est ma fidélité. Il dessine l'espoir et léger l'éconduit. Il est prépondérant sans qu'il y prenne part. Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. À son insu, ma solitude est son trésor. Dans le grand méridien où s'inscrit son essor, ma liberté le creuse. Dans les rues de la ville il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour, chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus ; qui au juste l'aima et l'éclaire de loin pour qu'il ne tombe pas ? Source : Char (René), Fureur et Mystère, Paris, Gallimard, coll. « Poésie «, 1967. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.