CE QUE RACINE APPORTE DE NOUVEAU

       On demande parfois de montrer ce que Racine a apporté de nouveau à la scène française, soit en comparant la première d'Andromaque à celle du Cid, soit en faisant porter l'analyse sur l'ensemble de son œuvre.    Voici les points essentiels à considérer :    — Le succès à*Andromaque rappelle celui du Cid : même conflit des enthousiasmes et des critiques. Les deux pièces ouvrent une voie nouvelle à la tragédie :    Elle était héroïque : l'amour n'est pas l'essentiel chez Corneille : il n'y est qu'un ornement. Grands sentiments, intérêts d'état, politique.    Elle devient passionnée : l'amour est tout l'objet de la pièce ; mais il cesse d'être galanterie (romans de l'époque ; objet des entretiens ou des poésies de salon) ; il devient passion violente.    Le héros cornélien appartient à une humanité d'exception alors que le héros racinien participe à l'humaine faiblesse.    — Pour loger un grand intérêt ou un grand caractère, Corneille avait besoin d'une situation invraisemblable développée en une action chargée. Il suffît à Racine d'« une action chargée de peu de matière «.    — La tragédie de Corneille est éloquence (ex. : Emilie, Auguste, Cinna, etc...). Celle de Racine est évocation poétique, suggestion. Ce qu'il ne dit pas élargit ce qu'il exprime.    D'où : Chez Corneille : forme profondément sculptée, relevée d'antithèses, vers frappants, éclat. Chez Racine : douce musique (voir la poésie de Racine).