Beaucoup de lecteurs pensent que le compte rendu d'une oeuvre par un critique suffit à en donner la connaissance. Or, Alain a écrit dans ses Propos sur l'esthétique, en 1949 : « Ce que dit l'oeuvre, nul résumé, nulle imitation, nulle amplification ne peut le dire... » Vous examinerez ces deux points de vue opposés, en appuyant votre réflexion sur des exemples précis, empruntés à votre expérience et à vos lectures.
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
Notons un parallèle entre cette distorsion oeuvre/compte rendu et la distorsion oeuvre/réel du sujet . Là encore, il existe une réponse plus ou moins attendue (même si les livres sur la dissertation vous expliquent que vous pouvez soutenir n'importe quelle thèse). Cette réponse peut se ramener à l'idée qu'aucun résumé, aucun compte rendu ne peut remplacer le contact direct avec l'oeuvre. Un cours, un ouvrage critique sont des incitations, des aides, mais non des substituts.
Cependant, il est quand même possible de distinguer des oeuvres plus « résumables » que d'autres ; par exemple les ouvrages théoriques, les essais. Plus une oeuvre est littéraire et moins elle peut se résumer. La pointe extrême de la littérature — la poésie — est non seulement « inrésumable », mais aussi impossible à traduire.
Dans la section « Littérature » de Rhumbs, Paul Valéry écrit :
« Rien de beau ne peut se résumer. Les barbares pédagogues résument et font résumer des oeuvres dont l'absurdité de les résumer est l'essence même. Leurs squelettes de l'Enéide ou de l'Odyssée sont privés des mouvements et des forces et des grâces qui font tout le prix de ces ouvrages aux yeux des personnes positives.»
Liens utiles
- En préface à un recueil de textes de critique littéraire, Tout feu, tout flamme, Jean-Louis Bory écrit: « Curieux métier que le métier de professeur. Le public le plus vivant qui soit (le plus égocentrique aussi), nous devons l'intéresser coûte que coûte au commerce des morts. Par chance, ces morts-là sont bien plus vivants que bien des vivants. Il ne s'agit plus que d'en persuader les jeunes vivants qui nous écoutent. » Vous commenterez et, au besoin, discuterez ce propos, en vous fon
- « L'oeuvre n'est pas une série de réponses, elle est une série de questions, elle n'est pas des explications, elle est des demandes d'explication, des demandes d'éclaircissement... C'est bien cela une œuvre : une série d'interrogations... Au bout du compte, il n'y a pas de réponse à donner... Ainsi, ce n'est pas la réponse qui éclaire, c'est la question. » Commentez librement cette réflexion d'Eugène Ionesco sur la fonction de l'œuvre littéraire en vous servant d'exemples précis tirés
- Montherlant écrit dans ses Carnets « Le temps use les oeuvres littéraires ; les chefs-d'oeuvre même, quoi qu'on en dise. » Expliquez et éventuellement discutez ce propos en exprimant votre opinion personnelle et en vous appuyant sur des exemples précis tirés de vos lectures.
- Jean-Claude Renard, rendant compte de son expérience de poète, analyse dans les lignes qui suivent la relation qu'il entretient avec son propre langage : « Il a ses racines en moi comme j'ai mes racines en lui. Il est un miroir à double réflexion où je reconnais ce que je suis et ce que je ne suis pas. Par suite, c'est un miroir qui me trahit- aux deux sens de ce verbe. Car il donne de moi une image à la fois plus vraie et plus fausse que celle que je puis, consciemment ou inconscie
- En 1865, dans la préface à son roman Une vieille maîtresse, Barbey d'Aurevilly écrit : « La moralité de l'artiste est dans la force et dans la vérité de sa peinture. En peignant la réalité, en lui infiltrant, en lui insufflant la vie, il a été assez moral : il a été vrai. Vérité ne peut jamais être péché ou crime ». En appuyant votre argumentation sur des exemples précis empruntés notamment à la littérature, vous analyserez et apprécierez ce point de vue. ?